Philippe Poiget, conseiller à la présidence de la Fédération française de l’assurance (FFA), a été reconduit à la tête de l’Organisme pour le registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance (Orias) pour un nouveau mandat en décembre 2020. Il revient, pour Décideurs, sur la tenue et la mise à jour du registre des intermédiaires durant la crise sanitaire, et expose les tendances actuelles du marché de l’assurance.

Décideurs. Au 31 décembre 2019, l’Orias recensait 64191 intermédiaires, avec un nombre des agents généraux stable et une progression de celui des mandataires d’intermédiaires d’assurance. Avez-vous observé de nouvelles tendances à la suite de la compagne de renouvellement des inscriptions en 2021 ?

Philippe Poiget. Si notre rapport pour l’année 2020 n’a pas encore été publié, nous avons toutefois constaté une bonne tenue du nombre d’immatriculations et d’inscriptions dans les différentes catégories d’intermédiaires. Entre le 31 décembre 2019 et le 31  décembre 2020, nous avons remarqué une augmentation du nombre d’intermédiaires de 5 % sur l’ensemble des différentes catégories, certaines progressant moins que d’autres. Si, au 14  avril 2021, ont été recensés 64 097  intermédiaires immatriculés, dans les prochaines semaines certains se manifesteront sans doute à nouveau et seront régularisés. Il convient de rappeler que l’immatriculation à l’Orias est obligatoire pour toute personne commercialisant des produits ou services dans le secteur de l’assurance, de la banque et de la finance pour les différentes structures par lesquelles elle est habilitée. Il s’agit d’un gage minimum de sécurité pour les consommateurs, qu’ils soient souscripteurs d’assurance, emprunteurs ou épargnants.

La majorité des assurtechs présentes sur le marché sont des courtiers d’assurance, ce qui s’explique en partie par la durée des formalités. Beaucoup préfèrent demander ce statut auprès de l’Orias et non pas auprès de l’ACPR car les formalités sont plus simples. Qu’en pensez-vous?

En termes prudentiels, de gouvernance et de moyens, l’agrément de l’ACPR pour les entreprises d’assurance qui portent le risque présente des exigences qui sont sans commune mesure avec celles qui sont requises pour exercer en tant qu’intermédiaire. Il n’est donc pas étonnant que certaines de ces assurtechs de nouvelle génération préfèrent opter pour le statut de courtier, le plus large en assurance car il permet de travailler avec plusieurs acteurs.

"Chaque année, nous recevons un retour positif des intermédiaires immatriculés ou inscrits à l’Orias, satisfaits de notre fonctionnement"

En suspens depuis plus de deux ans, la proposition de loi portant réforme du courtage a été adoptée définitivement par le Sénat le 1er avril 2021. Quels sont les dispositifs mis en place au sein de l’Orias afin d’assurer la mise en œuvre de cette réforme?

Pour être immatriculés au registre unique tenu par l’Orias, les intermédiaires doivent remplir quatre conditions que l’organisme vérifiera lors de leur enregistrement. Ils doivent présenter des documents justificatifs à savoir une attestation de capacité professionnelle, une garantie financière et une assurance de responsabilité civile professionnelle, l’Orias se chargeant du contrôle de la condition d’honorabilité. Avec la nouvelle loi, l’Orias immatriculera les courtiers d’assurance et leurs mandataires ainsi que les intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement et leurs mandataires à la condition qu’ils soient adhérents à une association professionnelle, elle-même agréée par l’autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR). Ainsi, cette réforme ne touchera pas l’Orias directement car elle ne remet pas en cause le bien-fondé des conditions requises pour être immatriculé au sein de l’organisme.

Vous avez été reconduit cette année pour un nouveau mandant en tant que président de l’Orias, notamment afin d’assurer la continuité de l’organisme durant la crise sanitaire et garantir sa neutralité au regard de la réforme sur le courtage d’assurance. Quel bilan pourriez-vous dresser de votre précédent mandat?

Lors de mon précédent mandat, il avait été convenu que la FFA présidait l’Orias compte tenu des divergences de positionnement des familles d’intermédiaires par rapport au périmètre de la réforme. À la fin de l’année dernière, lorsqu’une nouvelle réforme a été présentée devant le Parlement, il a été convenu de façon consensuelle entre toutes les organisations professionnelles qu’il était préférable que je sois reconduit dans mes fonctions. Et la crise sanitaire a conforté cette décision. S’il fallait dresser un bilan, force est de constater que l’Orias remplit totalement ses missions. Nous sommes l’un des rares organismes assumant une mission de service public délégué ayant progressivement diminué les frais d’inscription. Et cette rigueur budgétaire, nous l’endossons et j’en assume le bien fondé. Par ailleurs, le système de fonctionnement de l’Orias est reconnu par les pouvoirs publics qui lui ont confié l’immatriculation des intermédiaires des secteurs bancaire et financier en 2013. Les nouveaux développements informatiques y afférents ont été menés à bien, ce qui explique la pérennité des immatriculations et le renouvellement des inscriptions pour ces secteurs, notamment durant la crise sanitaire. De même, les délais d’instruction ont été considérablement raccourcis grâce à la digitalisation. Chaque année, nous recevons un retour positif des intermédiaires immatriculés ou inscrits à l’Orias, satisfaits de notre fonctionnement.

Quels sont vos nouveaux objectifs de ce nouveau mandat ?

Une fois les décrets d’application de la réforme du courtage adoptés, nous allons nous assurer de la fluidité du renouvellement des inscriptions des différentes catégories d’intermédiaires pour l’année 2022, date à laquelle la réforme entrera en vigueur. À cet effet, nous nous engageons à informer les catégories concernées quant à leur obligation d’adhérer à une association professionnelle avant leur immatriculation pour qu’il n’y ait pas d’affluence lors du renouvellement. Enfin, nous continuerons à accroître l’autorité de l’Orias en développant ses axes de communications pour informer les consommateurs que l’immatriculation aux registres est un gage de sécurité lorsqu’ils s’adressent à des intermédiaires.

"Les assureurs ont un rôle prépondérant à jouer pour accompagner la reprise de l’économie malmenée durant cette crise sanitaire"

Vous êtes par ailleurs conseiller à la présidence de la Fédération française de l’assurance (FFA). Quelle est votre vision du marché actuel de l’assurance?

Indépendamment de mon rôle de conseiller à la présidence, je suis chargé du Comité de pilotage durabilité de la FFA. Conscients des enjeux concernant la durabilité et impliqués dans la lutte contre le changement climatique, les assureurs ont adopté un plan d’action autour de trois axes stratégiques : démontrer que les assureurs sont des acteurs responsables par nature, intégrer les enjeux de la durabilité dans les offres pour accroître l’impact positif des produits et services, et poursuivre la dynamique engagée en faveur de la finance durable. Depuis le 10 mars 2021, ils doivent renforcer les informations déjà publiées en matière d’intégration des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) dans leurs stratégies d’investissement et donner de nouvelles informations en la matière au niveau des produits financiers. Nous avons pris comme angle de créer un comité transversal de durabilité composé de représentants des différentes Commissions de la FFA afin d’accompagner nos membres dans ces évolutions tendant vers une société plus résiliente.

Quel a été le rôle de la FFA durant cette crise sanitaire?

Il a été d’accompagner au mieux nos membres et l’ensemble du secteur de l’assurance dans les différentes mesures prises à l’égard des assurés et en proposant aux pouvoirs publics dès le mois de juin 2020, une couverture en cas d’événement exceptionnel, telle une pandémie au travers d’un dispositif dénommé "Catastrophes exceptionnelles" (Catex) afin de couvrir les entreprises fortement touchées par une cessation ou une diminution d’activité. La FFA s’est également engagée à soutenir la reprise de l’économie en mettant le programme d’investissement "Assureurs-Caisse des Dépôts Relance Durable France" à destination des PME et des ETI de l’industrie et des services et plus particulièrement de certains secteurs comme ceux du tourisme et de la santé. Les assureurs ont un rôle prépondérant à jouer pour accompagner la reprise de l’économie malmenée durant cette crise sanitaire.

Quels sont les sujets d’attention de demain?

L’assurance participe au développement d’une société : elle se doit d’être au rendez-vous pour offrir une couverture suffisante aux individus comme aux entreprises contre l’émergence de nouveaux risques, comme le risque cyber, ce qui ne peut se faire sans l’innovation et les nouvelles technologies. Il faut également tenir compte de l’impact des changements climatiques par des dispositifs permettant de renforcer la protection des personnes et des biens, notamment dans le cadre de partenariats public-privé, tels que ceux mis en place lors de catastrophes naturelles. C’est d’ailleurs l’enjeu de la proposition de loi visant à réformer le régime d’indemnisation des catastrophes naturelles, débattue au Parlement en ce moment. Néanmoins, toute cette protection face aux risques émergents ne se fait pas uniquement à l’aide de l’innovation technologique : elle repose également sur la participation active des hommes et des femmes qui travaillent dans ce secteur d’activité qui se démarque par une grande diversité de métiers et d’acteurs. 

Propos reccueillis par Jessie Razafindrabe

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