Ce vaudeville dans l’air du temps s’attaque à la question du sexisme au travail et n’épargne personne. Nommé aux Molières 2024 dans la catégorie meilleure comédie, Mondial Placard mérite le détour.

Molière, Feydeau et Labiche aimaient rire des travers et des postures de leurs contemporains. Ils auraient adoré notre époque où certains profils sont si aisés à tourner en dérision. Le monde du travail est une mine d’or qu’explore avec talent l’auteur et metteur en scène Côme de Bellescize qui s’inscrit dans la trace de ses glorieux prédécesseurs.

Le scénario de Mondial Placard est somme toute assez basique. Un patron paternaliste d’une entreprise de placard se veut inclusif et dans l’air du temps. Il décide de féminiser (un peu) son équipe de direction en promouvant une certaine Marion. Un coup dur pour Laurent qui s’y voyait déjà. Pour lui, les choses sont simples, sa collègue est nulle et n’a obtenu le poste qu’en raison de son genre. Afin de le prouver, il décide de partir puis de revenir incognito déguisé en femme. Place à Laurence ! Pendant ce temps, Marion peine à s’imposer subit le sexisme. Son patron lui propose de faire croire à son départ et de revenir sous des traits masculins. La femme grimée en homme et l’homme grimé en femme seront à l’origine de nombreuses situations qui reprennent tous les codes du vaudeville : quiproquo, intrigues amoureuses, amants dans le placard, portes qui claquent… Avec des petites innovations scénaristiques comme le recours à l’IA. Ce petit bijou servi par la compagnie du Fracas oscille entre Caméra Café, The Office et certaines pièces de Molière comme les Précieuses ridicules.

Des profils que nous connaissons tous

Mention spéciale aux personnages de la pièce qui représentent des collègues que chaque spectateur a probablement cotôyé. Parmi eux, Pascal, le senior bourrin adepte de la blague lourdingue et sexiste qui regrette l’époque des beuveries entre mecs et des mains aux fesses des stagiaires. Il aura maille à partir avec la stagiaire Léa pour qui tout est sexiste et patriarcal. Citons également, le PDG Jean Alibert qui se veut proche de ses équipes mais reste toujours en surplomb ou encore Quentin, geek directeur de la R&D, que les amateurs de séries reconnaîtront sûrement. Et pour cause, l’acteur David Talbot joue le rôle du magistrat Éric de Montgolfier dans la série Tapie où il crève l’écran dans une scène d’anthologie.

Tous les personnages mis en avant nous ramènent à nos propres turpitudes et nos propres défauts au travail. Les spectateurs niant le sexisme, ceux s’accaparant les sujets sociétaux pour se donner bonne conscience ou les "salariés militants" auront matière à réfléchir. Sur les sièges du théâtre Tristan Bernard, tous riront ensemble. Après tout, c’est cela l’inclusion, non ?

Lucas Jakubowicz

Mondial Placard, théâtre Tristan Bernard Mardi 20h - Mercredi 20h - Vendredi 21h - Samedi 16h et 21h

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