Entretien avec Christiane Féral-Schuhl, nouveau bâtonnier des avocats de Paris. 03/12/2010.

Entretien avec Christiane Féral-Schuhl, nouveau bâtonnier des avocats de Paris. 03/12/2010.

Décideurs. L’un des points clés de votre campagne a été de faire de l’Ordre un partenaire des avocats au quotidien. Quels projets souhaitez-vous mettre en place à ce titre ?
Christiane Féral-Schuhl. L’un de mes objectifs est de créer une centrale d’achat pour tous les avocats du barreau de Paris et de me servir de la force économique que représente notre profession pour négocier des accords-cadres, dans des secteurs aussi variés que l’informatique, l’archivage numérique, l’affacturage, les crèches, les assurances, etc. Ce projet permettra de créer un intérêt économique d’appartenance à notre barreau. Tout est prêt pour entamer les négociations. Vous trouverez sur mon blog de campagne les statuts de la centrale d’achat, le cahier des charges type et même une étude en droit de la concurrence réalisée par un confrère expert en la matière. Nous n’avons plus qu’à faire des appels d’offre, référencer les prestataires et proposer l’adhésion aux membres du barreau, de manière facultative.


Décideurs. Vous êtes une spécialiste reconnue en droit des technologies de l’information. De quelle manière percevez-vous la dématérialisation des procédures ?
C. F.-S. Nous vivons dans une société numérique et les avocats doivent pouvoir, dans un tel contexte, se prévaloir de leur secret professionnel comme d’un avantage et le défendre. La communication électronique imposée par la Chancellerie est une véritable opportunité pour le barreau de Paris car, appréhendée comme un axe stratégique, elle lui permet de se positionner comme une profession forte et détentrice d’un secret professionnel sécurisé. L’objectif est de réussir cette figure imposée en élargissant le Réseau privé virtuel avocat (RPVA) à tous les avocats, et pas uniquement aux avocats spécialisés en contentieux.


Décideurs. Que signifie pour vous un « barreau impliqué » ?
C. F-S.
Il faut rassembler les avocats autour d’un barreau qui mutualise et fédère les compétences de ses avocats. Je propose pour cela d’organiser un lobbying efficace, en liaison avec le Conseil national des barreaux (CNB) et l’antenne de Bruxelles. En effet, je souhaite développer le lien avec les commissions ouvertes et  les associations professionnelles qui peuvent mettre en œuvre, dans leur spécialité respective, une procédure d’alerte permettant de réagir en amont sur les textes réglementaires ou législatifs. Un barreau impliqué, c’est également mettre en lumière les belles actions menées par les avocats du barreau de Paris. Lorsque les notaires font une journée de consultation gratuite, toute la France est au courant ; ce n’est pas le cas pour les avocats. Et pourtant, les initiatives existent. Il faut les mettre en avant. À ce titre, je voudrais créer une fondation Barreau de Paris Solidarité, mettre en place une journée des droits fondamentaux et un prix pro bono.


Décideurs. Les élections interviennent en pleine réforme du Code de la procédure pénale, de la garde à vue, etc. Comment vous positionnez-vous sur ce sujet ?
C. F.-S.
Il s’agit d’un point essentiel de mon programme. Le bâtonnier doit être une vigie des libertés. Il est donc clair que nous devons poursuivre les différents combats de la profession concernant la garde à vue, la réforme du Code de procédure pénale et la défense des libertés professionnelles et économiques menacées quotidiennement par les nouvelles technologies. Sur ce terrain, pour ne vous donner qu’un exemple, la LOPPSI 2, dont l’objectif sécuritaire a été rappelé par les autorités publiques, va étendre la visioconférence devant le tribunal correctionnel. Si la visioconférence constitue un progrès pour les audiences de procédure et dans un certain nombre de cas, je pense qu’elle ne doit en aucun cas devenir le droit commun d’audition des prévenus.


Décideurs. Les jeunes avocats sont les premiers à souffrir sur un marché réputé difficile. Quelles mesures allez-vous mettre en place pour les aider à se lancer dans la profession ?
C. F.-S.
Les jeunes avocats sont l’avenir de notre profession. Il existe de nombreux gisements d’activités inexplorés. Je propose donc, en amont de la formation dispensée à l’École de formation du barreau (EFB), un observatoire rendant compte des ouvertures au sein de notre profession. Aujourd’hui, il pourrait être utile aux futurs avocats de savoir qu’il y a des demandes en droit social, en droit fiscal et dans tous les nouveaux métiers qui s’ouvrent aux avocats.
Par ailleurs, il faut développer l’enseignement, dans le cadre de la formation initiale mais aussi continue, de matières transversales pour accompagner l’installation ou l’intégration des jeunes avocats en cabinet : des cours en langues étrangères, de psychologie, de gestion des relations humaines, etc. Un avocat est, par essence, un entrepreneur. Il doit être formé pour cela.
Il faut aussi tenir compte de l’inquiétude des jeunes et les protéger dans le contexte d’une perte de collaboration. Plusieurs mesures sont prévues : faciliter la domiciliation, réduire les cotisations sur cette période et négocier, via la centrale d’achat, un accord-cadre d’assurance perte de collaboration facultative (prime déductible). Mais, en aucun cas le problème des jeunes collaborateurs ne doit être réduit à une question d’assurance. Je veux revoir le statut du collaborateur et développer un label des cabinets pour favoriser la gestion des carrières des collaborateurs.


Décideurs. Et le statut d’avocat en entreprise ?
C. F.-S.
Je considère qu’aucune concession ne doit être faite sur les attributs de l’avocat : secret professionnel, indépendance et respect du conflit d’intérêt. Dans ce contexte, il faut reprendre le dossier d’un point de vue pédagogique et trouver des paliers intermédiaires. Il s’agit, en d’autres termes, de mettre en avant les avantages que cela aurait pour les avocats, et de favoriser, dans un premier temps, le détachement en entreprise en veillant au respect des principes essentiels. Ce n’est qu’une première étape, mais elle est indispensable pour emporter l’adhésion des avocats à ce projet.

Décideurs. On comptait cette année deux candidates au bâtonnat et une candidate au vice-bâtonnat. De quelle façon voyez-vous l’augmentation du nombre de femmes dans la profession ?
C. F.-S.
Il me semble important de travailler dans deux directions : d’une part, favoriser la mise en place de liens intergénérationnels pour aider les jeunes avocates, les accompagner dans leur vie professionnelle et répondre à leurs interrogations au fil des décisions qu’elles doivent prendre ; d'autre part defavoriser l’aide à la personne au quotidien (accords-cadres pour faciliter l’obtention de places de crèche, SOS nounou, etc.). J’ai toujours vécu comme une chance d’être une femme et une avocate. Je voudrais communiquer aux plus jeunes cet enthousiasme.


Résultats des élections du bâtonnat de Paris du 2 décembre 2010.

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