Dans son allocution du 17 avril, le président de la République a souhaité enjamber la réforme des retraites et fixer un nouveau cap.

Durant sa prise de parole d'un quart d'heure, Emmanuel Macron a joué la partition suivante : assumer la réforme des retraites, tourner la page, vanter son bilan et fixer les chantiers à venir. Cela suffira-t-il à renverser la vapeur, à faire taire la contestation, à ressouder les rangs de la majorité ? L'avenir le dira. Pour le moment, voici les points les plus importants à retenir.

Retraites, une réforme indispensable : Emmanuel Macron a consacré peu de temps à la réforme des retraites. Selon lui, elle semble appartenir au passé et est "nécessaire". Nécessaire car "ne rien faire" aurait mené à une "réduction des pensions". Elle est également indispensable dans le but de "créer des richesses", ce qui est vital pour maintenir la souveraineté et l'indépendance de la France qui peuvent être attaquées par "les forces de la spéculation" ou "les puissances étrangères". Pour le chef de l'Etat, le fait de travailler plus longtemps, même s'il se traduit par "de la justice" et des "améliorations concrètes" demande des efforts.

... Mais rejetée

"Cette réforme est t-elle-acceptée ? D'évidence non", reconnaît Emmanuel Macron. Que faire donc ? D'après lui, la réponse ne se situe ni dans "l'immobilisme" ni dans "l'extrémisme". Selon lui, la colère dépasse la simple réforme des retraites et s'inscrit dans une crise globale : "Colère face à un travail qui, pour trop de Français, ne permet plus de bien vivre, face à des prix qui montent, du plein, des courses, de la cantine (…). Colère parce que certains ont le sentiment de faire leur part, mais sans être récompensés de leurs efforts, ni en aides ni en services publics efficaces". Pour changer les choses, la seconde partie du discours est consacrée à des annonces concrètes articulées autour de trois piliers : travail, justice et l'ordre républicain, progrès.

Le président de la République promet un "Pacte de la vie au travail" en étroite collaboration avec les partenaires sociaux. Reste à savoir si ces derniers accepteront la main tendue...

Travail : Pour les mois à venir, Emmanuel Macron souhaite mettre l'accent sur la question du travail. L'occasion pour lui de revenir sur son bilan en vantant "1.7 million d'emplois créés en six ans" ou encore "200 usines ouvertes depuis deux ans dans nos vallées et nos cantons". Pour accélérer davantage, il a annoncé une réforme du lycée professionnel, un accompagnement des allocataires du RSA et un traitement sans tabou de questions telles que le partage des richesses et l'emploi des seniors. Le point central de son allocution est l'annonce d'un "Pacte de la vie au travail" qui sera mis en place grâce à une concertation avec les partenaires sociaux. Ou du moins ceux qui le souhaitent. "Dès demain je souhaite recevoir les organisations syndicales et patronales, du moins celles qui le veulent. Ma porte sera toujours ouverte".

Justice et ordre républicain : Le président a profité de son discours pour aller au delà des questions sociales et économiques. Il a souhaité évoquer "la justice et l'ordre républicain". Avec tout d'abord un rappel des actions mises en place : recrutement de 10 000 magistrats et agents, déploiement de 200 brigades de gendarmerie. Il a également promis des annonces pour début mai. "L’Etat de droit est notre socle et il n’y a pas de liberté sans loi ni sans sanction envers ceux qui transgressent le droit des autres". Un refrain qui fait office de figure imposée puisque tous les présidents de la Ve République l'ont entonnée. 

Progrès : Une partie de sa majorité reproche au président de la République de délaisser la question du progressisme, genèse du macronisme ? Ce dernier semble avoir entendu le message puisque la troisième de ses priorités est le progrès défini de la manière suivante :  "Je veux que chacun d’entre vous retrouve la certitude que nos enfants pourront bâtir une vie meilleure », a-t-il déclaré. « Et ce sont nos services publics qui devront porter cette espérance de la petite enfance au grand âge. Dès lors, l’Education nationale doit renouer avec l’ambition d’être l’une des meilleures d’Europe. Dès la rentrée, notre école va changer à vue d’œil pour les enseignants qui seront mieux rémunérés, pour les élèves qui seront davantage accompagnés en français et en mathématiques pour leurs devoirs et pratiqueront plus de sport à l’école, pour les parents qui verront le remplacement systématique des enseignants absents."

Autre volet sur lequel Emmanuel Macron est revenu, la santé. Celle-ci sera "rebâtie" puisque, d'ici la fin de l'année : "600 000 patients atteints de maladies chroniques qui n’ont pas de médecin traitant en disposeront. Et d’ici à la fin de l’année prochaine, nous devrons avoir désengorgé tous nos services d’urgence." Outre des promesses, il a rappelé son bilan, notamment le reste à charge zéro.

Le serpent de mer bureaucratique : Pompidou appelait à "arrêter de faire chier les Français", Valéry Giscard d'Estaing appelait son administration au "bon sens", Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy s'attaquaient à la bureaucratie. Emmanuel Macron s'inscrit dans leurs traces puisqu'il a déclaré : "Il nous faut moins de lois, moins de bureaucratie, plus de liberté d’action, d’expérimentation, de pouvoir, d’initiative à l’échelle de nos vies". Seul hic, aucun président de la République n'a réussi à diminuer la bureaucratie. Dommage puisque de la Chine à l'Empire romain en passant par l'URSS, l'Histoire prouve que le déclin d'une puissance se traduit par une administration de plus en plus tentaculaire.

Rendez-vous le 14 juillet : Pour conclure son discours, le président a promis de jouer "l'apaisement" durant "cent jours", un délai souvent évoqué par les responsables politiques, de Napoléon à Dominique de Villepin. Rendez-vous est pris le 14 juillet pour "faire un premier bilan. Nous avons devant nous cent jours d'apaisement, d'unité, d'ambition et d'action au service de la France". L'apaisement semble s'appliquer à lui-même. Et aux autres : "C'est notre devoir et je vous fais confiance".

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