Si Emmanuel Macron et Marine Le Pen disposent d’un électorat plutôt féminin, ce n’est pas le cas d’Éric Zemmour et, dans une moindre mesure, de Valérie Pécresse et Jean-Luc Mélenchon.

À l’été 1974, François Mitterrand entame un véritable travail de relooking sur son style mais aussi sur sa manière de s’exprimer. Objectif : séduire l’électorat féminin qui a largement préféré Valéry Giscard d’Estaing lors du second tour de l’élection présidentielle quelques mois plus tôt. D’après les sondeurs de l’époque, c’est grâce au vote des femmes que le centriste a conquis l’Élysée. Et c’est grâce à elles que le socialiste a pris sa revanche sept ans plus tard. Aujourd’hui encore, les candidats ne peuvent se permettre un vote trop "genré" qui donne une impression de dirigeant clivant. Alors que la campagne électorale de 2022 entre dans sa dernière ligne droite, qui sont les candidats "féminisés" ? Qui sont les "masculinisés" ? Réponse dans le rolling quotidien Ifop dont les chiffres datent du 5 avril.

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Emmanuel Macron, Marine Le Pen : un électorat plutôt féminin

Les deux candidats en tête des sondages semblent obtenir des résultats plus élevés chez les femmes que chez les hommes. Dans les deux cas, la différence est de 4 points : 29 % contre 25 % pour Emmanuel Macron et 25 % contre 21 % pour Marine Le Pen.

En l’absence d’études qualitatives publiques il est difficile d’expliquer ce déséquilibre. Il est toutefois important de souligner qu’en 2017, toujours selon l’Ifop, tous deux avaient un électorat plutôt masculin : 26 % des hommes et 22 % des femmes pour le Marcheur, 22 % des hommes et 21 % des femmes pour la candidate d’extrême droite. Depuis 2017, Marine Le Pen tente de se "féminiser" en posant avec des chats, en mettant en scène son quotidien de mère célibataire, en évitant les propos martiaux, en s’exprimant longuement sur des problématiques chères à l’électorat féminin (pensions de divorce, sorties scolaires…). Cette stratégie inaugurée en 2017 semble porter ses fruits. Soulignons également que, cette année, un second candidat d’extrême droite incarne une ligne masculiniste qui attire une partie des électeurs masculins du RN et fait donc augmenter la proportion de femmes dans l’électorat lepéniste.

Éric Zemmour, Valérie Pécresse, Jean-Luc Mélenchon, un électorat plutôt masculin

Les fans d’Éric Zemmour lancent régulièrement sur Twitter le hashtag #lesfemmesaveczemmour afin de montrer que leur champion est bel et bien l’aspirant à l’Élysée le plus féministe. Dans les faits, son électorat est deux fois plus masculin que féminin : 12 % des hommes, 6 % des femmes, soit le plus gros écart de cette présidentielle 2022. Ses accusations d’agressions sexuelles, ses écrits dans lesquels il estime que "les femmes sont le but et le butin de tout homme doué qui aspire à grimper dans la sociéte" ou qu’ "un garçon, ça entreprend, ça assaille, ça conquiert, ça couche sans aimer" mais aussi ses déclarations telles que "les grands génies sont des hommes", "les femmes n’ont pas la même forme d’intelligence que les hommes" y sont probablement pour quelque chose. Mentionnons également le fait que la quasi-totalité de ses proches soutiens sont des hommes.

Eric Zemmour récolte deux fois plus de voix chez les hommes que chez les femmes

Il existe une idée reçue selon laquelle une candidate part avec un avantage automatique dans l’électorat féminin. Mais cette essentialisation n’est pas automatique, la preuve avec Valérie Pécresse. Si la présidente de la région Ile-de-France séduit 11 % des hommes, elle n’est qu’à 8 % chez les femmes, soit une différence de 3 points. Est-ce parce que la droite républicaine est plus populaire chez les Français que chez les Françaises ? Pas forcément puisqu’en 2017 François Fillon avait récolté 19 % chez les hommes mais 21 % chez les femmes.

Enfin, en 2017, Jean-Luc Mélenchon a obtenu un point de plus chez les hommes que chez les femmes. Cinq ans plus tard, l’écart s’accentue puisqu’il est désormais de 3 points : 15 % contre 18 %. Une fois encore, aucune étude qualitative ne permet d’expliquer cette différence.

Lucas Jakubowicz

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