Le mouvement souhaite défendre la social-démocratie française, tout en soutenant l’action du président de la République. Son délégué général, Gilles Savary, revient sur la genèse et le futur de ce relatif nouveau venu sur la scène politique.

Décideurs. Territoires de progrès souhaite incarner la social-démocratie, mais en dehors du PS. Pourquoi ?

Gilles Savary. La plupart des fondateurs de ce mouvement viennent du parti socialiste. Certains ont été élus ou ont été nommés au gouvernement sous François Hollande voire Lionel Jospin avec cette étiquette et la volonté de mener une politique inspirée de la gauche allemande ou scandinave. Nous constatons que le PS n’est plus apte à défendre cette ligne. Il est dommage qu’il soit resté engoncé dans ses travers. Sa base ne s’est pas renouvelée et, peu à peu, il est devenu un parti de fonctionnaires avec trop peu de représentants de la société civile. Tout était dirigé par une poignée d’éléphants en lutte intestine à la tête de leurs écuries, qui faisaient campagne à gauche afin de flatter la base. Tout cela pour mener une politique réformiste non assumée. Désormais, il n’a plus de leader, plus d’idées, n’est plus central à gauche et risque de devenir un simple parti protestataire avec un rôle marginal dans la vie publique.

Quand a commencé la réflexion de rompre avec le PS ?

Lors de la victoire de Benoît Hamon aux primaires de 2017. Une fois nommé candidat, il a demandé de ne pas défendre le bilan de François Hollande, de porter des idées démagogiques et irréalisables conçues par les frondeurs. Pourtant, sur bien des points, nous n’avions pas à rougir de notre travail. De toute manière, il aurait été inimaginable de renier le travail effectué depuis cinq années. De quoi aurions-nous eu l’air ? C’est à ce moment-là que l’idée d’un départ a été prise. Nous ne voulions plus créer un énième courant interne, il était temps d’agir.  Emmanuel Macron a émergé au bon moment.

Désormais, vous soutenez sans faille l’action du président…

C’est un soutien exigeant. La majorité présidentielle n’est pas un bloc unique qui obéit le doigt sur la couture du pantalon. Pour reprendre l’expression de Jean Castex, il faut bâtir une "maison commune" qui rassemble le centre droit avec Agir, le Modem, mais aussi le centre gauche avec Territoires de progrès.

"Notre soutien est exigeant mais nous n'avons pas quitté un parti miné par les frondeurs pour apporter la fronde dans la majorité"

En revanche, nous n’avons pas quitté un parti miné par les frondeurs pour apporter une fronde dans la nouvelle majorité. Territoires de progrès fera campagne pour Emmanuel Macron, n’a pas lancé son propre groupe parlementaire. Mais, pour les prochaines élections, nous souhaitons que la commission d’investiture investisse des candidats de notre bord pour que la social-démocratie française bénéficie d’élus locaux et nationaux. Comme nos homologues allemands, autrichiens, scandinaves, nous sommes prêts au compromis, au dépassement des clivages. Mais cela n’est pas possible au sein d’un parti unique. C’est pourquoi, pour 2022, nous aimerions construire un contrat de gouvernement.

Territoires de progrès, combien de divisions ?

Politiquement, nous sommes une force qui commence à peser puisque nous avons dans notre parti une dizaine de ministres tels que Jean-Yves Le Drian, Élisabeth Borne, Florence Parly issus du PS, mais aussi de plus jeunes membres du gouvernement appelés à un bel avenir. Je pense notamment à Emmanuelle Wargon, Clément Beaune, Jean-Baptiste Djebbari. Une cinquantaine de parlementaires ont rejoint nos rangs et la plupart sont élus sur des terres de gauche. De même, nous disposons d’un bon maillage territorial grâce à des maires et des militants engagés et, surtout, venus d’horizons sociaux différents.

Propos recueillis par Lucas Jakubowicz

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