L’ancien patron du géant du divertissement est rappelé seulement trente-trois mois après la nomination de son successeur. Bob Iger, qui reprend du service pour deux ans, devra piloter la société dans une période charnière pour elle.

 

Bob Iger reprend du service chez Disney. Celui qui fut CEO du groupe de divertissement pendant quinze ans vient d’être rappelé pour prendre la suite de son successeur, Bob Chapek, après seulement trente-trois mois d’exercice. Le retour de l’homme de 71 ans, pour deux ans au poste de CEO, a été annoncé à la surprise générale dimanche soir à travers un communiqué. Bob Iger prend ses fonctions "immédiatement" et aura la charge de "définir la direction stratégique pour une nouvelle croissance et travailler en étroite collaboration avec le conseil d’administration pour trouver un successeur à la tête de la société d’ici à la fin de son mandat".

Disney a bien du mal à trouver un homme providentiel. Après avoir retardé à quatre reprises le départ à la retraite de son emblématique patron, le groupe avait finalement décidé de nommer Bob Chapek. Le soixantenaire, jusque-là peu mis en avant devant la communauté financière, connaissait bien la maison pour y avoir œuvré durant trente ans, d’abord au sein de la division VSH et DVD, puis dans les produits dérivés avant de prendre la tête des parcs à thèmes. Mais, dès sa nomination, Bob Chapek accumulait les difficultés, telles que la pandémie qui a notamment conduit à fermer les parcs d’attractions pendant plusieurs semaines.

Un bilan mitigé

Depuis, les visiteurs sont revenus et Disney a réussi le lancement de son service de streaming Disney+. Sur l’ensemble de l’exercice 2022, le groupe fait état de 84 milliards de dollars de chiffre d’affaires (+24 % sur un an) et de 3,2 milliards de dollars de résultat net (+58 %). Ce qui n’a pas empêché les actions du fondre de plus de 40 % cette année sur fond d’inquiétude des investisseurs concernant les coûts liés au streaming (cette année son budget contenu s’élevait à 30 milliards de dollars), à la concurrence et à la hausse des prix sur le segment. Mais aussi à cause de derniers résultats trimestriels inférieurs aux attentes.

Bob Iger prend ses fonctions "immédiatement"

Bob Chapek s’est également retrouvé au cœur d’une polémique sociétale. Il a été reproché au groupe son silence à l’égard d’une loi entrée en vigueur cette année en Floride et surnommée par ses opposants "Don’t say gay" (ne parlez pas des gays). Un texte qui vise à interdire aux enseignants d’évoquer l’orientation sexuelle ou l’identité de genre devant leurs élèves à l’école primaire. L’absence de réaction du géant du divertissement, qui pèse lourd économiquement dans la région d’Orlando où se trouve Disney World, n’a pas manqué d’être critiquée.

Un retour étonnant

Dans son communiqué de dimanche soir, l’entreprise californienne indique seulement que Bob Chapek a "quitté ses fonctions". "Le conseil d’administration a conclu qu’au moment où Disney s’engage dans une période de transformation de l’industrie de plus en plus complexe, Bob Iger est particulièrement bien placé pour diriger la société pendant cette période charnière", précise la présidente du board, Susan Arnold.

Si Bob Iger lui-même s’est dit "un peu étonné" – dans un mémo adressé au personnel dimanche – de son retour dans la société, l’homme était tout de même connu pour être indéboulonnable chez Disney. Il faut dire que les performances de ce journaliste de formation sont remarquables. Lorsqu’il succède à Michael Eisner à la barre du géant du divertissement, il axe sa stratégie autour d’une thématique : la diversification. Quitte à y mettre le prix fort. En 2006, Disney débourse 7,4 milliards de dollars pour acquérir les studios Pixar, principal concurrent sur le marché des dessins animés. Quatre ans plus tard, il investit 4 milliards pour mettre la main sur Marvel et ses rentables super-héros tels que Captain America, Deadpool ou encore Iron Man et les Avengers. En 2012, c’est LucasFilm qui tombe dans l’escarcelle du groupe pour 4 milliards de dollars.

Ces investissements s’avèrent un pari gagnant. Entre 2004 et 2018, le chiffre d’affaires du groupe a pratiquement doublé, (de 33,75 à 56 milliards de dollars). La capitalisation boursière, pour sa part, est passée de 56 à 164 milliards de dollars. Dernier coup de maître en date, le rachat, en mars 2019, de 21th Century Fox pour 71,3 milliards de dollars. L’objectif était clair : enrichir la future plateforme de streaming Disney+ qui souhaitait, et souhaite toujours, concurrencer Netflix et Amazon sur un marché en pleine croissance. À voir quels seront les prochains faits d’armes du CEO.

Lucas Jakubowicz et Olivia Vignaud

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