En France, il manque entre 10 000 et 20 000 ingénieurs chaque année par rapport aux besoins de l’économie. S’orienter vers l’ingénierie est bel et bien la garantie de trouver un emploi bien rémunéré. Mais le secteur offre surtout la possibilité de changer le monde et de travailler pour le bien commun.

La fin de l’année scolaire est là, et avec elle, l’heure de choix difficiles pour les futurs étudiants et les futurs diplômés. À tous ces jeunes, s’ils lisent ces lignes, je voudrais dire : contrairement à ce que l’on entend souvent, vous vivez une époque enthousiasmante, et nous avons besoin de vous pour la rendre encore plus belle. "Nous", c’est à la fois les grandes entreprises qui façonnent le monde de demain, mais aussi, plus largement, le monde.

Ingénieur

Oui, les temps sont durs, mais vous avez le "privilège" de l’épreuve. Les défis posés à votre génération sont immenses, avec des transitions inédites dans l’histoire humaine et l’obligation de réaliser en un temps record les transformations industrielles les plus ambitieuses de tous les temps. Ce propos ne minimise pas l’écrasante responsabilité des générations précédentes dans la situation dont vous héritez ; mais constate simplement la charge qui sera la vôtre, maintenant que le compte à rebours est enclenché.

Transition environnementale, transition énergétique, transition digitale : chacune représente à elle seule un chantier d’une ampleur et d’une complexité vertigineuses. Prenons la transition énergétique : pour son succès, nous devons investir pas moins de 4 000 milliards de dollars par an, afin simultanément d’inventer de nouvelles solutions (celles qui existent aujourd’hui ne suffiront pas à atteindre la neutralité carbone à l’échelle de la planète) et dans la foulée, de les déployer à grande échelle, à une cadence inouïe.  

Le défi posé par les technologies digitales n’est pas moindre : les progrès de l’intelligence artificielle, révélés au grand public par ChatGPT, sont spectaculaires. Ils offrent des perspectives d’innovation passionnantes, et parfois un peu effrayantes. Un vrai basculement de l’humanité a commencé, avec un rapport inédit à la machine, qui suscite des questionnements fondamentaux et passionnants.

"C'est dans les grandes entreprises que l'on a le plus de moyens de changer le système"

Et dans ce monde de bouleversement, qui est en première ligne ? Les ingénieurs. Des femmes et des hommes en mesure d’exploiter les progrès scientifiques et technologiques les plus pointus, pour transformer le monde et le rendre plus durable. Malheureusement, nous ne formons pas assez d’ingénieurs. Rien qu’en France, le Syntec Ingénierie estime qu’il en manque entre 10 000 et 20 000 chaque année par rapport aux besoins de l’économie.

Alors, à tous les jeunes qui choisissent leur orientation, je lance un appel : embrassez la voie de l’ingénierie. Elle vous conduira à des métiers plus passionnants que jamais. Aux jeunes diplômés qui vont bientôt entrer dans le monde du travail, dont certains tournent aujourd’hui le dos aux plus grandes entreprises, dans un mouvement de contestation sans précédent, je voudrais dire : ne vous trompez pas de combat, ne laissez pas passer les plus belles opportunités d’agir. C’est dans ces grandes entreprises que vous aurez le plus de moyens pour changer le "système" dont vous dénoncez les dysfonctionnements. Aux parents et aux enseignants de ces jeunes à la croisée des chemins, je souhaite dire : à vous de bien conseiller la jeunesse en expliquant tous ces enjeux, pour l’aider à faire les meilleurs choix. Et à nous enfin, dirigeants économiques, il revient également une grande responsabilité : parler avec pédagogie et passion de nos métiers (nous ne le faisons pas assez !) pour les rendre plus attractifs auprès d’une génération parfois désabusée.

À nous d’écouter les interpellations : nous avons beaucoup à en apprendre. À nous aussi d’y répondre avec humilité et ténacité, afin de renouer les fils d’un dialogue parfois difficile, et de convaincre que les grandes entreprises à capitaux privés sont les véhicules les plus efficaces pour réaliser les indispensables transformations de notre temps.

Chronique de Charles-Edouard Delpierre, CEO Tractebel Infrastructures Europe

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