Tristan LecomteP-dg et fondateur d’Alter Eco

Tristan Lecomte
P-dg et fondateur d’Alter Eco

Décideurs. Depuis vos débuts à la tête d’Alter Eco en 1998, vous avez centré votre développement sur l’accompagnement des producteurs. Quelles sont les mesures que vous avez prises dans ce sens ?

Tristan Lecomte. Au sein d’Alter Eco, nous accordons une valeur primordiale à l’Homme et à l’environnement. L’une de nos missions est de remettre l’Homme au cœur des échanges.

Il faut réinvestir dans la terre. Un des moyens pour cela est d’acheter à un prix supérieur à celui du marché aux petits producteurs et de mettre en place des programmes d’agriculture biologique.

Aujourd’hui, Alter Eco accompagne plus de 167 000 producteurs. Nous avons mis en place des outils d’audit spécifiques afin de suivre les filières et de les accompagner au mieux. Nous souhaitons continuer à développer notre réseau. Pour en trouver de nouveaux, nous travaillons avec des organisations non gouvernementales ou des programmes des Nations Unies.Pour que plus de valeur ajoutée reste dans le pays producteur, nous transformons de plus en plus sur place. La majorité de nos thés sont, par exemple, fabriqués par les producteurs eux-mêmes. En revanche, pour des produits qui nécessitent plus de préparation, comme le chocolat, nous sommes encore contraints de préparer le produit fini dans les pays développés.

Décideurs. Quelles sont les axes de développement d’Alter Eco ?

T. L. Nous souhaitons démocratiser le commerce équitable et les produits bio. En 2002, nous étions uniquement distribués dans certains magasins dont Monoprix. Aujourd’hui, nous sommes présents dans plus de 3 500 supermarchés, chez Auchan, Carrefour ou encore Leclerc. Mais il faut encore aller au-delà. Si nous souhaitons améliorer nos ventes, nous devons renforcer notre présence dans les grandes surfaces, notamment en termes de positionnement dans les rayons.
En 2009, nous avons réalisé 80 % de notre chiffre d’affaires en France. Nous souhaitons développer nos ventes à l’étranger. Depuis cinq ans, nous avons ouvert des filiales aux États-Unis et en Australie. Nous distribuons également nos produits au Japon, en Belgique et en Irlande.
Enfin, nous aimerions lancer des produits solidaires avec des agriculteurs français. Le commerce équitable n’est pas limité aux pays en développement. Nous sommes en train de réfléchir à l’adaptation d’une telle démarche ici.

Décideurs. Comment vous démarquez-vous de vos concurrents en constante augmentation ?

T. L. Nous accentuons notre différence en mettant en place des programmes ambitieux. D’ici fin 2010, l’intégralité de la gamme portera la triple garantie : commerce équitable, agriculture biologique et compensation carbone.

De plus en plus de fabricants se lancent dans le commerce équitable. Il s’agit d’un effet de mode. Pour y voir un peu plus clair, Max Havelaar, l’organisme qui s’occupe de donner le label Fairtrade, devrait durcir ces conditions. Aujourd’hui, elles sont trop souples. Au final, cela nuit à l’image du commerce équitable.

Décideurs. Quelles sont les mesures que vous avez mises en place pour l’objectif compensation carbone ?

T. L. Notre premier bilan carbone effectué en 2006 nous a permis de définir les dépenses carbone pour chaque référence. Nous avons pu alors identifier les principaux leviers à actionner pour limiter nos émissions de CO2 : optimisation de l’affrètement, suppression des suremballages, éco-conception des produits, tri sélectif et utilisation d’énergie verte.
Par la suite, nous avons lancé, en 2008, le programme Objectif zéro carbone. Les 4 ?600 tonnes de CO2 émises en 2009, par l’activité globale d’Alter Eco seront compensée par un double programme de reforestation et de déforestation évitée en Amazonie péruvienne. En collaboration avec les producteurs de la coopérative Acopagro, nous allons prendre en concession plus de 120 000 hectares.

Décideurs. L’agriculture biologique a-t-elle les moyens de s’imposer ?

T. L. Oui. C’est une certitude. L’agriculture biologique est plus efficace sur le long terme. L’agriculture chimique booste la productivité les premières années. Mais, les engrais et les pesticides finissent par avoir un impact négatif sur les terres. Résultat, la productivité se met à baisser. Pour tenter d’améliorer les performances du champ, les agriculteurs ont alors recours à encore plus de produits chimiques. On rentre dans un cercle vicieux. Cette politique est dangereuse. L’agriculture est un secteur où il faut raisonner sur la durée. Nous avons le moyen de produire des pesticides et des engrais naturels qui ne remettent pas en cause la productivité sur le long terme.

Juin 2010

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