Le brutal hiatus provoqué par la crise sanitaire aura de profondes conséquences pour la conception et l’incarnation du leadership. Portrait d’un dirigeant aux pieds solidement ancrés par Carly Abramowitz, fondatrice du cabinet expert en matière de soft skills, CA Consulting Group.

DÉCIDEURS. Quelle(s) difficulté(s) les leaders d’aujourd’hui rencontrent-ils ?

Carly Abramowitz. J’observe de plus en plus une difficulté à prendre du recul, sur la situation mais aussi sur soi-même. Les dirigeants ont également le plus grand mal à trouver la bonne vitesse visù-à-vis de leurs équipes. Parfois, ils vont trop vite, parfois pas assez. Parfois, la période de crise les plonge dans un état de sur-analyse, parfois elle accentue leur affection pour le changement. Certains sont déjà dans l’étape d’après, alors que les collaborateurs n’ont pas encore pris toute la mesure, ni saisi l’opérationnalité de celle en cours.

 

"Un leader bien dans ses baskets n’a pas besoin de tomber dans l’autoritarisme pour se sentir exister dans sa fonction" 

 

Le leader fait face à un certain dérèglement sans avoir, à portée de main, des recettes toute faites pour répondre aux besoins des équipes. Besoins dont les managers n’ont, d’ailleurs, pas toujours conscience.

Est-ce conjoncturel ou est-ce la traduction d’un phénomène plus large ?

Pour moi, cela précède la période actuelle. Dès la fin de l’année 2015, nous avons constaté des changements assez homogènes chez nos clients. Peu importait leur secteur d’activité ou la culture de leur entreprise, tous ont pris de plein fouet l’accélération du monde et ressenti, avec elle, l’impression d’une réduction du temps disponible pour affronter des mutations toujours plus nombreuses. Cela a eu un impact énorme sur la manière de concevoir et d’incarner le leadership. Peu à peu, s’est imposée la nécessité d’un leader avec un ancrage solide. Un leader bien dans ses baskets en somme.

Justement, à quoi ça ressemble un "leader bien dans ses baskets"  ?

C’est un leader qui n’a pas besoin de tomber dans l’autoritarisme pour se sentir exister dans sa fonction. La verticalité continue, bien sûr, d’être essentielle dans le leadership. Mais elle s’exprime différemment. Le dirigeant porte une vision, donne du sens tout en étant plus humble, plus connecté. C’est pourquoi on le reconnaît à sa générosité. Il transmet aux équipes pour des raisons d’efficience mais sait se mettre en retrait, ne serait-ce que pour ne céder à la tentation d’un management à l’ancienne. Je crois, en effet, qu’un leader bien dans ses baskets inscrit l’autonomie et la responsabilisation des collaborateurs au coeur de sa mission. Mais, pour ce faire, il doit disposer d’une bonne connaissance de luimême, de ses points forts comme de ses points faibles. Difficile sinon de lâcher prise ou d’ajuster les objectifs.

De quelles compétences a-t-il spécifiquement besoin ?

Bien communiquer s’avère indispensable pour donner du sens et pour remobiliser des collectifs de travail mis à rude épreuve. Il s’agit, bien sûr, de rassurer mais surtout d’insister sur le fait que les changements sont là pour durer. D’où l’importance, pour le leader, de faire preuve moins d’agilité que d’adaptabilité.

 

"L’adaptabilité touche au coeur des relations humaines"

 

Pour vous, ce n’est pas la même chose ?

Non, car je crois plutôt que la seconde contient la première. En effet, l’adaptabilité n’est pas associée à une méthode de travail particulière. Elle touche au coeur des relations humaines. Quand l’agilité peut renvoyer à la capacité presque gymnastique d’une personne, elle rend compte d’une manière d’interagir avec les autres, l’environnement et… soi-même. Un leader qui s’adapte est celui en mesure de tenir compte de sa propre situation, de l’analyser et, in fine, d’agir.

Comment, le cas échéant, cultiver ce savoir-être/savoir-faire ?

Pour accompagner les leaders dans leur voyage de développement, nos coachs actionnent trois leviers : inspiring, learning, practising. La première phase cherche à provoquer un déclic. Une fois qu’ils ont compris pourquoi et ce qu’ils veulent changer ou acquérir, nous mettons à leur disposition des outils pour qu’ils se mettent en action ou s’essaient à la co-knowledge. La partie la plus importante et la plus sensible est celle de l’ancrage. La manière d’exercer son leadership repose sur des traits de comportement présents depuis longtemps et dont il n’est pas aisé de se défaire. Mais, à force de pratique et de rituels de management, les lignes des softs skills commencent à bouger, les dirigeants construisent une meilleure connaissance d’eux-mêmes qui les pousse à se faire davantage confiance. Or, tout ce qu’un leader va cultiver chez lui, il va vouloir le semer autour de lui. Au plus grand bonheur de l’efficacité des équipes et des performances des organisations.

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