À l’heure où une proposition de loi contre le cyber-djihadisme est débattue à l’Assemblée nationale, l’EIIL publie son rapport annuel.
Plus qu’une nouveauté, voici la confirmation d’une nouvelle tendance : l’État islamique en Irak et au Levant, aussi connu sous l’acronyme EIIL [Isis en anglais], vient, comme en 2012, de publier le rapport annuel de ses exactions commises en Syrie et en Irak. Le parallèle est rapidement fait entre ce rapport et celui rendu chaque année par une société cotée afin de dévoiler aux actionnaires les résultats de ses différentes activités et les plans stratégiques de développement à venir. Cela est d’autant plus vrai que le rapport de 2013, intitulé « al-Naba » [Les nouvelles en français], est d’une précision affligeante : 10 000 opérations conduites en Irak par environ 15 000 combattants, 1 000 assassinats, 4 000 attentats à la bombe, des centaines de prisonniers libérés, des centaines d’« apostats » convertis à leur cause et huit millions de dollars de taxes mensuelles recouvrées par l’organisation en provenance de Mossoul avant même que la ville ne soit assiégée. Preuve de la sincérité d’EIIL dans ses déclarations, les données ont été confirmées par l’Institut de la guerre américain (ISW). Est-il donc correct de comparer l’organisation terroriste à une entreprise cotée en Bourse ?

Si EIIL ne revêt pas le statut d’une société - et donc encore moins celui d’une société faisant appel public à l’épargne -, Jessica Lewis, directrice de recherche à l’ISW a confié au Financial Times (édition du 18 juin 2014), que « le rapport fournissait des mesures de performance de la même façon que l’on rend des comptes précis à des donateurs ». L’objectif est donc d’attirer de nouveaux investisseurs, ou tout au moins de rassurer les bienfaiteurs initiaux. EIIL compte parmi eux des fonds privés djihadistes du Golfe. L’optimisation de l’allocation des ressources est aussi un argument retenu au soutien de la publication de son bilan, la prise de Mossoul ayant été programmée depuis des années. Cette dernière était prévisible au regard du rapport de 2012, à l’époque où les attaques se concentraient progressivement autour de cette région. Bien sûr, EIIL s’autofinance au gré des trésors de guerre amassés et autres activités illicites : contrebande de pétrole, racket, enlèvements ou encore braquages de banques font partie de son répertoire. Par ailleurs, l’État islamique d’Irak et du Levant a recours aux nouveaux moyens de communication, les réseaux sociaux Facebook et Twitter, pour attiser la peur et attirer des combattants - notamment européens, en mal d’exposition médiatique. La diffusion d’images provenant de Racca, bastion de l’organisation, en est la parfaite illustration.

Par Firmin Sylla.

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