Poésie, littérature, histoire… Voici quelques ouvrages à découvrir en ce début du mois de septembre. Une belle mise en bouche avant d’entamer la traditionnelle rentrée littéraire.

Poésie instantanée

Teboul

Ne le nions pas, aux yeux du grand public la poésie souffre de nombreux clichés : obligatoirement en vers, rédigée par des personnes décédées depuis longtemps, elle n’est bonne qu’à être récitée par cœur sur les bancs des écoles et des collèges. Rien de plus faux ! La poésie est actuelle et ludique. Preuve en est avec le premier ouvrage d’Arthur Teboul, chanteur et compositeur du groupe Feu! Chatterton. Son concept ? Le poème minute, soit un "poème instantané, comme une poésie ou une soupe, souvent en prose, écrit en un temps compté". Une méthode loin d’être nouvelle puisqu’elle correspond à "l’écriture automatique" des surréalistes ou à la "fatrasie" médiévale. L’auteur ne se revendique pas un puriste en matière d’esthétique. C’est faire preuve de fausse modestie. Car si les 98 poèmes sont de qualité inégale, ils méritent que l’on s’y attarde. Oniriques, ils invitent au rêve et transportent le lecteur dans une dimension nouvelle rarement explorée. À lire pour un effet psychotropique. Et pour se réconcilier avec la poésie.

Le déversoir, poèmes minutes, d’Arthur Teboul, Editions Seghers, 256 pages, 18 euros

À plumes et à poils

Animaux

Quel est le point commun entre le commerce sur les routes de la soie, la destruction des empires aztèques et incas ou les épidémies de peste noire ? À chaque fois, les animaux jouent un rôle primordial. Nos amis à plumes et à poils, qu’ils soient sauvages ou domestiqués ont tous participé aux grands événements qui ont marqué le monde. Dans l’anonymat le plus total. Anonymat auquel cet ouvrage à l’angle original met fin. Dans un style érudit et grand public, plusieurs historiens renommés remettent les bêtes à leur juste place. Parmi eux des "poids lourds" comme les médiévistes Philippe Contamine et Michel Pastoureau. Les chapitres reviennent sur l’histoire de la domestication du cheval, l’impact des rats sur l’urbanisme, la puissance symbolique de l’éléphant, le rôle du chameau dans la mondialisation, le rapport des Grecs et des Romains à la faune… Chaque chapitre se lit indépendamment. À savourer avec un chat sur ses genoux ou un chien à côté de soi ?

Les animaux dans l’Histoire, présenté par Éric Baratay, Tallandier, 268 pages, 21,5 euros

Hepburn, la star inconnue

Audrey Hepburn

Si le nom, la silhouette et le visage d’Audrey Hepburn sont familiers du grand public, sa vie l’est beaucoup moins. Pourtant, elle ressemble à un vrai roman que cette BD en noir et blanc met en avant. Fille d’une noble hollandaise et d’un aventurier britannique, elle passe son enfance dans un milieu multiculturel et aisé où les idées nazies ont la cote. Pourtant, la jeune Audrey restera marquée dans sa chair par le second conflit mondial. Sa taille de guêpe est surtout liée aux séquelles de la famine de 1944-1945 aux Pays-Bas. La paix revenue, celle qui se rêve danseuse classique rejoint Londres puis New York. Elle se retrouve par hasard sur les planches de Broadway où elle triomphe et bascule dans le cinéma. La voici dans le monde du septième art des années 1950 et 1960 où elle tourne avec des stars comme Gary Cooper, Cary Grant, Gregory Peck et Mel Ferrer qu’elle épousera. Les auteurs nous plongent dans le monde glamour de ces années passées entre France, Italie et Hollywood. Ils reviennent également sur les célèbres amitiés d’Audrey Hepburn : Colette, Maurice Chevalier et Hubert de Givenchy dont elle sera la confidente et la muse. Contrairement à ses pairs elle ne veut pas mourir sur scène et abandonne peu à peu le star-system pour se centrer sur sa famille et ses actions humanitaires. Un destin peu commun enfin mis en bulles !

Audrey Hepburn, d’Eileen Hofer et Christopher, Michel Lafon, 315 pages, 25,95 euros

Vive Albert Camus !

Camus

L’amitié entre Albert Camus et JeanPaul Sartre n’aura pas résisté à leurs différentes conceptions de la politique. « Ils ont bonne mine les non-violents: ni victimes, ni bourreaux », écrivait le second dans une allusion à peine voilée aux positions du premier. La volonté d’Albert Camus de toujours verser dans la modération lui a valu bien des critiques. "Choisir la voie du dialogue au siècle de la polémique, de la nuance sous le règne du manichéisme tout-puissant (…) revenait, Camus le savait, à se condamner à l’exil parmi ses contemporains", écrit Marylin Maeso en préambule de l’abécédaire qu’elle lui consacre. Un ouvrage dans lequel cette professeure agrégée de philosophie espère restituer la complexité de la pensée de l’auteur venu d’Algérie. À chaque définition, elle accole un pan de texte du célèbre romancier en lien avec le mot choisi. De quoi donner l’envie de rouvrir La Chute, Le mythe de Sisyphe ou encore les correspondances avec la femme de sa vie, Maria Casarès.

L’Abécédaire d’Albert Camus, de Marylin Maeso, Alpha, 285 pages, 8 euros

Tombeau poétique

Editis voit naître sa 53e maison d’édition. À sa tête? L’ancienne directrice générale de Plon, Céline Thoulouze. Pour sa première rentrée littéraire, Récamier a sélectionné deux romans d’auteurs qui ont fait leurs preuves. L’un d’eux n’est autre que l’ancien avocat et scénariste Oscar Lalo qui signe là son cinquième ouvrage. Le dernier amant conte, mêle et superpose les violences auxquelles les femmes sont exposées et celles que l’homme inflige à la nature. Le lecteur qui navigue entre les petits chapitres ne saurait pas toujours dire si le narrateur évoque les premiers ou les seconds excès. La plume est tenue par le bourreau lui-même. Cet homme, qui pourrait être tant d’autres, oscille entre maltraitance, négligence et lucidité dans un style métaphorique, presque poétique, qui relève de l’oraison funèbre.

Le dernier amant, d’Oscar Lalo, Récamier, 304 pages, 20 euros

Lucas Jakubowicz, Olivia Vignaud

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