Alors que les nouvelles technologies s’invitent plus que jamais dans le secteur de la santé, la médecine intégrative fait de plus en plus d’adeptes. Dernièrement, la toute première chirurgie à distance s’est déroulée grâce au métavers. Pour Décideurs, Nathaniel Scher, cancérologue-radiothérapeute, revient sur les avancées technologiques et les changements systémiques qui, selon lui, feront la santé de demain.

Décideurs. Quelles synergies s'opèrent entre l’Institut de radiothérapie et de radiochirurgie H. Hartmann et l’Institut Rafaël, la maison de l’après cancer ?

Nathaniel Scher. Concrètement, tandis que l’Institut Hartmann pratique une médecine conventionnelle, l’Institut Rafaël propose une médecine intégrative. Celle-ci combine ainsi des soins classiques, tels que la radiothérapie, avec des pratiques alternatives comme l’art-thérapie. Grâce à cette approche complète, le patient favorise notamment sa tolérance aux traitements, sa qualité de vie et peut, par moment, diminuer son usage de médicaments. En outre, il peut être suivi simultanément au sein des deux instituts afin de bénéficier d’un accompagnement, pendant et même après sa maladie à l’Institut Rafaël. Outre la synergie entre ces deux établissements, celle qui lie mes deux fonctions en leur sein tient aux différents projets de recherche relatifs à l’oncologie, la radiothérapie et la santé intégrative que je mène de front.

La réalité augmentée constitue un outil de pédagogie tant pour les patients, que pour les médecins. Pouvez-vous nous en détailler les perspectives ?

En premier lieu, la réalité augmentée constitue une perspective d’optimisation de la formation des soignants. Pendant leurs études, les élèves infirmiers ne disposent que de quelques stages pratiques pour apprendre à examiner un patient. Dans l’optique de les confronter à tous les cas de figure possibles, une immersion, y compris dans un monde virtuel, représente une opportunité de formation globale.

À mi-chemin entre la réalité virtuelle et le métavers, donner la chance aux chirurgiens en devenir de réaliser leurs premières opérations dans un système artificiel constitue un vrai bouleversement. En outre, la réalité augmentée pourrait permettre la projection de l’anatomie du patient en 3D ou la possibilité de zoomer sur la zone souhaitée dans l’objectif d’affiner le champ de vision du chirurgien.

"Une immersion dans un monde virtuel représente une opportunité de formation globale"

Une visée thérapeutique est également envisagée. C’est le cas de patients sujets à des phobies telles que le vertige. Aujourd’hui, grâce à un casque de réalité virtuelle, ils peuvent se retrouver en haut de grands édifices. De cette manière, leurs peurs sont traitées de manière progressive. Dans The Lancet, un article fait notamment état des conclusions optimistes de cette thérapie cognitivo-comportementale.

Toujours à l’aide d’un casque de réalité virtuelle, nous avons imaginé une immersion dans une première séance de radiothérapie. En règle générale, comme celle-ci se déroule plusieurs semaines après la prescription, cela favorise l’anxiété chez les patients. Afin de les aider à se projeter, l’Institut Rafaël a développé un casque à cet effet avec le concours de Dassault Systèmes. Cependant, bien que novateurs, ces différents systèmes n’en sont qu’à leurs balbutiements.

Selon vous, quelles avancées technologiques amorcent le plus de promesses pour le secteur de la santé ?

À mon sens, la réalité virtuelle et le métavers auront une incidence considérable dans le domaine de la santé d’ici une dizaine ou une vingtaine d’années. Non seulement pour la pédagogie du patient mais également pour la formation du corps médical, ces avancées pourraient s’imposer comme des révolutions.

Toutefois, certaines technologies déjà effectives s’inscrivent d’ores et déjà dans un processus de soins optimisé pour le patient. Afin de réduire les effets secondaires des radiothérapies, l’Institut Rafaël et l’Institut Hartmann prodiguent des traitements par lumière infrarouge aux malades lors de leurs séances. La photobiomodulation par LED, de son nom scientifique, tend ainsi à atténuer le phénomène de radio-épithélite. Ces irritations de la peau dues aux rayonnements touchent notamment les personnes atteintes d’un cancer du sein. De même, les personnes traitées pour des cancers ORL endurent l’apparition de sortes d’aphtes induisant des douleurs et, par conséquent, des difficultés à s’alimenter. Très peu pratiquée en France, la luminothérapie fait activement ses preuves et certaines séances commencent à être remboursées par la Sécurité sociale. Publier des articles sur ces avancées dans des revues scientifiques s’avère alors essentiel pour le faire savoir, et nous avons à cœur de nous y tenir.

En parallèle, la personnalisation de la médecine prend de plus en plus d’ampleur. De fait, il est déjà possible d’adapter un traitement au patient en analysant les caractéristiques génétiques de sa maladie.

Quels projets dans le domaine de la santé avez-vous en ligne de mire en 2022 et au-delà ?

Quelle que soit la maladie et les traitements qui s’y prêtent, l’un des objectifs principaux du secteur de la santé est d’en réduire les effets secondaires. Avec 400 000 nouveaux cas de cancer par an en France, une partie d’entre eux devra malheureusement faire face à une rechute. Pour ceux-là, il est essentiel d’accroître l’efficacité des traitements. C’est ce que propose la médecine intégrative par le biais de la prévention et de soins parallèles tels qu’un recentrage vers de meilleures habitudes alimentaires ou la prise en compte de l’après-maladie. Il faut faire accepter à la société et à la Sécurité sociale la qualité de ces soins complémentaires afin qu’ils soient remboursés au même titre que les soins conventionnels.

En outre, à destination du soignant, le développement de l’intelligence artificielle en santé incarne une aide à la décision plus que décisive. En radiothérapie, nous disposons déjà du cyberknife, un système d’intelligence artificielle capable de suivre les tumeurs mobiles afin de savoir où les irradier, comme celles pulmonaires qui bougent lors du cycle respiratoire.

Propos recueillis par Léa Pierre-Joseph

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