Trouver sa place. Pas facile pour l’avocat qui, du statut de collaborateur à celui d’associé, évolue dans un métier en pleine mutation. Yves Boissonnat, grand nom de l’executive search, recrute et accompagne ceux qui portent la robe dans ce parcours du combattant. Il l’analyse pour nous.

Décideurs. Recruter : pourquoi l’exercice est-il si compliqué dans la profession d’avocat ?

Yves Boissonnat. Le recrutement des collaborateurs a toujours été un exercice difficile et le contexte actuel a largement compliqué la chose. L’augmentation très forte de la demande de conseil juridique de la part de clients qui s’internationalisent avait entraîné un fort développement des cabinets d’affaires français et internationaux, créant une forte demande et une grande fluidité dans le marché. Cela a changé avec la crise de 2007, et la gestion des ressources humaine s’en est trouvée modifiée.

Les cabinets ont en effet dû trouver des profils sachant s’adapter à cette nouvelle donne. Contrairement à une idée assez répandue, je ne pense pas qu’il y ait un désinvestissement des collaborateurs de la fameuse génération Y, mais le manque de visibilité et de perspectives auxquelles ils doivent faire face les amène à avoir une approche plus prudente, voire à préférer une approche entrepreneuriale à la carrière plus classique dans une grande firme. De plus, le modèle selon lequel on effectuait sa carrière dans un seul et même cabinet s’est fissuré et il faut accepter que les collaborateurs n’accompagnent la firme que sur une période donnée. Comme ils sont pour nombre d’entre eux très bien formés techniquement et avec une plus grande ouverture sur l’international qu’auparavant, l’essentiel est donc de savoir sélectionner des avocats qui comprennent la culture de la firme.

 

Décideurs. Puis vient le temps de l’association. Quels critères sont observés et pourquoi accompagner cette transition entre les deux statuts ?

Y. B. Outre sa capacité à développer du business, l’associé doit représenter la firme auprès des clients. Pour cela, il doit contribuer au développement de la structure et transmettre les valeurs tant en externe qu’auprès de ses collaborateurs. Être associé, c’est faire partie d’un collectif. Les cabinets repèrent en général assez rapidement les profils correspondant à ces critères. Mais la cooptation est un changement complet de paradigme et un accompagnement est donc fondamental pour poser des objectifs, anticiper les points de progression, gérer la pression – légitime – des clients, prendre du recul sur la fonction… Si des programmes de coaching sont légion dans les comités de direction des grands groupes industriels, dans les cabinets d’avocats, ils se font plus rares. Et pourtant les échecs d’une association reposent parfois sur une erreur de casting mais souvent sur un mauvais accompagnement de la transition.

Cela démontre qu’il manque selon moi un aspect fondamental dans la formation des avocats?: l’apprentissage de la gestion d’entreprise et particulièrement des ressources humaines. Les cabinets investissent un temps fou pour le recrutement des meilleurs collaborateurs, mais une fois l’intégration faite, ils lèvent souvent le pied sans réellement valoriser leur «?investissement?».

 

Décideurs. En tant que cabinet de recrutement spécialisé, vous êtes l’un des pivots de la mobilité des avocats et notamment des associés. Comment s’envisage-t-elle ?

Y. B. Deux facteurs expliquent pourquoi un associé change de cabinet?: le push factor (pourquoi je veux partir??), et le pull factor, ce dernier étant déterminant (qu’est-ce qui m’attire dans un nouveau cabinet??). Ce qui motive réellement un associé à rejoindre une nouvelle structure, c’est l’aventure, le projet qui lui est proposé. J’ai vu nombre d’associés quitter des cabinets de renom pour de plus petites structures qui, au-delà de la marque, leur permettent de développer leur clientèle sans cadre prédéfini. Un collège d’associés soudés qui avancent ensemble fait souvent mouche. En effet, une certaine perte de collégialité qu’on retrouve dans les grandes structures ne convient pas à tout le monde. Mais pour d’autres au contraire, l’appartenance à une marque forte offrant une plate-forme large sera un facteur de motivation important.

Le danger pour un marché c’est de donner l’impression qu’il n’y a qu’un seul modèle. D’où la nécessité d’un accompagnement de ceux qui souhaitent bouger afin de les aider à prendre en compte le modèle qui leur correspond. J’ai vu des avocats persuadés de ne pas faire le bon métier alors qu’ils ne l’exerçaient simplement pas au bon endroit.

Propos recueillis par Julie Atlan

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