La sénatrice LR des Bouches-du-Rhône a également siégé à l’Assemblée nationale pendant treize années. Elle revient sur les avantages d’un régime bicaméral, qu’elle juge adapté à l’examen du projet de réforme des retraites.

Décideurs. Vous connaissez bien les deux chambres. Lors de l’examen d’un texte de loi, quelles sont les différences entre les deux ?

Valérie Boyer. Il existe une idée reçue qui consiste à dire que les débats sont plus policés au Sénat qu’à l’Assemblée nationale. Ce n’est pas forcément le cas puisqu’au Palais du Luxembourg les échanges sont également vifs. Mais la nouvelle législature marque un point de rupture. Pour la première fois un groupe politique, en l’occurrence LFI, assume une stratégie d’obstruction et de vocifération qui a privé les Français de débats et empêché les députés de travailler sereinement. L’examen au Sénat qui a commencé le 2 mars devrait éviter cela.

Vraiment ?

Les sénateurs, y compris de gauche, sont des élus locaux enracinés qui sont habitués à travailler dans l’ombre et à chercher les compromis. Ils ne sont pas dans une logique populiste et il n’existe pas de Nupes au Sénat. Socialistes, communistes et écologistes vont donc continuer à travailler avec une méthode qui a fait ses preuves et n’ont pas l’intention de transformer l’hémicycle et les commissions en ZAD.

Quelle va être la plus-value du Sénat dans le cadre de l’examen du projet de loi ?

Les débats à l’Assemblée nationale ont montré que le gouvernement était insuffisamment préparé. Il a notamment été incapable de répondre précisément à des questions portant sur les carrières longues ou la retraite à 1 200 euros. Examiner à nouveau le texte au Sénat lui permettra de revoir sa copie, d’apporter plus de précisions. Le Sénat permet donc de respecter la Constitution qui indique, dans son article 24, que le Parlement "contrôle l’action du gouvernement". Le Palais du Luxembourg est un organe de contrôle indispensable, surtout aujourd’hui. Cela prouve les bienfaits d’un régime bicaméral. Précisons que les rares moments de notre Histoire sans système à deux chambres ne sont pas les plus démocratiques puisqu’il s’agit de la Terreur et du régime de Vichy.

Quels sont les points importants que LR va essayer de défendre ?

Notre groupe déplore que la réforme portée par Élisabeth Borne soit un projet de financement plus qu’un projet holistique. Pour résoudre durablement la pérennité du système de retraite, il faut revoir de nombreuses politiques publiques : réindustrialiser le pays, augmenter la productivité, relancer la natalité, pourquoi pas instaurer un peu de capitalisation… Mais les articles 40 et 45 de la Constitution ne permettent pas d’aborder ces termes. Notre champ d’action est restreint. Nous allons donc essayer de faire bouger les lignes sur les points suivants : les retraites des mères de famille, point sur lequel rien n’a été prévu, ce qui est étrange pour un gouvernement qui se dit féministe. Il en est de même pour les petites retraites. Autre chantier, proposer des mesures pour mieux lutter contre la fraude sociale en nous basant sur le rapport rédigé par le député du Bas-Rhin Patrick Hetzel. Nous avons bon espoir que certaines de nos idées seront reprises en commission mixte paritaire et figureront in fine dans le projet de loi.

Propos recueillis par Lucas Jakubowicz

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