Présidente du directoire de KPMG France, Marie Guillemot est la preuve que le plafond de verre dans le conseil peut être percé. Mais beaucoup reste à faire pour arriver à une parité satisfaisante dans le secteur.

Décideurs Magazine. Globalement, est-t-il plus difficile pour un homme que pour une femme de percer dans le conseil ?

Marie Guillemot. Plus rien n’est impossible dès lors qu’à compétence et à performance égale, les talents sont repérés, accompagnés, encouragés et promus. La preuve, je préside depuis 2021 le directoire de KPMG en France, après en avoir intégré le comex au sein duquel j’étais plus particulièrement en charge depuis 2017 de la stratégie de développement des grands comptes et des secteurs. C’était un vrai challenge et une marque de confiance. Depuis, le portefeuille de KPMG, en audit comme en conseil couvre 100 % du CAC 40 et 200 sociétés cotées.

Il est vrai que je reste à ce jour la seule femme à présider l’un des Big Four. Le sens de l’histoire est que l’on s’approche résolument du jour où l’on cessera de considérer l’accès d’une femme à un poste de responsabilité comme une sorte d’exception, alors que ce ne doit être le fruit que d’un processus totalement paritaire d’évaluation des compétences pour un poste donné.

Si plafond de verre il y a, se résorbe-t-il peu à peu ? Reste-il toujours présent ?

Pour les femmes comme pour les hommes, la question est plus d’affirmer et de déployer sans complexe ses compétences et ses expertises que de surmonter des difficultés. Les femmes représentent 57 % de nos effectifs et 42 % des managers de KPMG en France sont des femmes.

J’ai une conviction : pour faire la différence auprès de nos clients, mieux appréhender les mutations ou les sujets complexes, les visages de nos équipes doivent être multiples et nos regards divers. Entreprise à mission, KPMG en France est un acteur engagé au cœur de l’économie et des territoires et porte la responsabilité d’accueillir, de faire grandir et de former tous les talents.

C’est particulièrement vrai de la parité dans les fonctions dirigeantes qui n’est plus un objectif mais un prérequis business. Les entreprises ont de plus en plus conscience de cette nouvelle donne et se transforment pour ne pas décrocher.

J’ajoute que KPMG en France, ce sont 11 000 collaborateurs, 600 associés, 2 700 recrutements pour 130 000 CV reçus chaque année : les 1 200 jeunes diplômés recrutés annuellement sont non seulement plus sensibles à la question de la parité mais ils la porte véritablement dans leur ADN. Notre crédibilité en matière de parcours de parité règle notre niveau d’attractivité auprès des jeunes femmes et des jeunes hommes qui font le choix de nous rejoindre.

"Le sens de l’histoire est que l’on s’approche résolument du jour où l’on cessera de considérer l’accès d’une femme à un poste de responsabilité comme une sorte d’exception"

Comment tendre vers plus de parité dans les postes à responsabilité ?

Avec une feuille de route qui vise la performance durable de KPMG et la diversité des talents, en miroir de celle à l’œuvre chez nos clients. C’est une question de leadership et d’intentionnalité à la tête de l’entreprise. C’est la conviction que la performance naît de la richesse des approches et des personnalités, c’est la formation et la mise en place de dispositifs concrets et transparents qui garantissent à court, moyen et long terme une progression équitable des carrières et des chemins d’accès aux postes de responsabilité.

Notre volonté est de développer un leadership mixte, inclusif et performant. Nous avons procédé en 2023 à la nomination de 46 nouveaux associés, parmi lesquels 24 femmes. Ce renforcement de notre équipe d’associées donne le signal fort d’une volonté en ligne avec la trajectoire de diversité portée par le cabinet, et j’en suis fière.

Quelles sont les initiatives mises en place par KPMG pour favoriser la parité ?

Ce qui compte, et ce qui est efficace pour la performance durable de l’entreprise, c’est le travail sur le changement des comportements, sur les biais cognitifs ainsi que les formations ciblées tout au long de la vie professionnelle. Depuis 2010, avec "Emergence", le cabinet propose à ses collaboratrices un programme interne, unique et complet en faveur du développement du leadership au féminin, alliant formation, coaching et mentoring.

Autre accélérateur de parité, avec la semaine de 4 jours parentale, nous avons ouvert depuis 2022 la possibilité pour le parent, père ou mère, d’opter pour un temps partiel à 80 % payé 100 % pendant une durée de 6 mois. Et ce choix de l’agilité, de la responsabilité et de la flexibilité marche puisque sur les 800 collaborateurs éligibles à la mesure, plus de 50 % y ont eu recours, dont 284 femmes et 154 hommes.

Au travers du programme Eve, programme de leadership créé en 2010 à l’initiative de Danone, et dont KPMG est partenaire, près de 300 collaborateurs des entreprises membres, dont 50 KPMG, abordent chaque année plusieurs thématiques clés du dirigeant de demain. Je veux ajouter que ce bouillonnement d’initiatives, au sein de KPMG comme pour de nombreuses entreprises, a été rendu possible par la formidable impulsion donnée par des forums internationaux de réflexion et d’échange de bonnes pratiques, au premier rang desquels le Women’s Forum, qui a été précurseur, ou encore Women In Africa.

Propos recueillis par Lucas Jakubowicz

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