Il y a quelques mois, Yves Rocher devenait la première entreprise à mission de France. Un aboutissement logique pour le groupe qui, depuis ses origines, il y a soixante ans, a fait du respect de l’environnement et du souci de l’intérêt collectif la clé de voûte de son business model et le cœur même de son identité.

Décembre 2019. Alors que la loi Pacte, fraîchement adoptée, peine encore à se frayer un chemin dans les consciences et plus encore à déboucher sur des mises en œuvre concrètes dans la plupart des entreprises françaises, l’une d’entre elles prend les devants en devenant la première à accéder au statut d’entreprise à mission. Il s’agit d’Yves Rocher, groupe de cosmétique bio fondé il y a soixante ans dans le Morbihan et qui, depuis, n’a jamais dévié de son positionnement de départ : celui d’une marque bâtie sur la naturalité. Soucieuse, autrement dit, de profiter non pas uniquement à des actionnaires mais à tout un écosystème. 

"Devenir une entreprise à mission nous donne un cadre, des garde-fous et un certain niveau d'exigence"

« Une marque, quelle qu’elle soit, doit s’opposer à quelque chose, déclarait il y a peu Bris Rocher, petit-fils du fondateur à la tête du groupe depuis dix ans ;  s’engager dans une cause. » Celle sur laquelle Yves Rocher va construire sa légitimité et son succès s’enracine dans ce choix historique de proposer exclusivement des produits sains, écolos et accessibles. Un positionnement sur lequel nombre d’acteurs l’ont rejoint depuis. Ce qui n’empêche pas Bris Rocher de revendiquer « dix crans d’avance sur les autres » et la légitimité qui va avec. De quoi faire de la transformation récente du groupe en entreprise à mission non pas un levier de notoriété supplémentaire mais l’aboutissement logique d’un engagement de toujours.

Evidence

« Depuis soixante ans, le groupe mène de nombreuses actions en matière de RSE, explique son directeur général adjoint, Yann-Étienne Le Gall. C’est aujourd’hui une nouvelle page de notre histoire que l’on adopte en devenant entreprise à mission, au sens de la loi Pacte, mais cela s’inscrit dans la continuité de la bataille engagée par Yves Rocher. Nous avons commencé ce travail avant la loi qui nous permet de régulariser notre situation, ajoute-Yann-Étienne Le Gall pour qui le nouveau statut du groupe « s’est imposé comme une évidence ». Évidence qui, pour se voir traduite en engagement formel, n’en aura pas moins nécessité une année de concertation et de brainstorming au sein de l’entreprise. « Le comité exécutif a travaillé sur le sujet avec le concours d’un shadow comex de millennials composé de 24 personnes basées en France et aux États-Unis, poursuit Yann-Étienne Le Gall. Des conférences, menées par un facilitateur, ont été organisées avec ces deux comités qui ont reçu carte blanche pour écrire la feuille de route du groupe sur les dix prochaines années. Au programme : des projets et innovations visant, les uns à intensifier les actions menées en faveur de la biodiversité et de l’agroécologie, les autres à réduire la consommation de plastique et les émissions de gaz à effet de serre des différents sites de production, voire, pour certains, la création de jardins partagés à usage des salariés…

"Nous avons voulu accompagner ce  mouvement car il s'inscrit dans nos racines"

Levier pour l'avenir

Quelles que soient l’envergure et la portée du projet, l’ambition demeure inchangée et vise à promouvoir cette démarche d’intérêt général qui, pour le groupe, représente non seulement un engagement historique mais aussi un levier pour l’avenir. « Nous avons voulu accompagner ce mouvement car il est inscrit dans nos racines, expliquait ainsi Bris Rocher dans une interview récente. Quand mon grand-père a créé l’entreprise, dans les années 1950, dans le village de La Gacilly, c’est avec l’idée de démocratiser la beauté mais aussi de stopper l’exode rural. » Pari réussi puisque, 2,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires plus tard, la petite entreprise aujourd’hui présente dans près de 120 pays conserve cet ancrage local en terre bretonne qui, en décembre dernier, contribuait à justifier son changement de statut juridique. Changement qui, reconnaît-on à la direction, aura eu pour effet immédiat de renforcer la cohésion interne. Idéal, donc, se félicite Yann-Étienne Le Gall, pour promouvoir l’image de la marque à l’extérieur tout en suscitant une émulation au sein des équipes. « Les collaborateurs sont très fiers de notre nouveau statut qui s’inscrit dans la continuité de l’œuvre de M. Rocher auquel ils sont très attachés, se réjouit-il. Cela renforce le sentiment d’appartenance au groupe au sein des équipes et consolide notre marque employeur en externe. Les retours que l’on nous fait sont très positifs. » Et d’autant plus bénéfiques qu’à cet avantage « réputationnel » s’en ajoute un autre, aux effets plus immédiatement quantifiables.

Objectif B Corp

« Devenir entreprise à mission nous donne un cadre, des garde-fous et un certain niveau d’exigence. À nous, désormais, d’embarquer tout le monde, même nos franchisés et nos collaborateurs en usine », reprend le directeur général adjoint du groupe avant de revenir sur l’ambition globale. « Au-delà de la mission à proprement parler, nous nous sommes fixé des objectifs comme la baisse des émissions des gaz à effet de serre, faire de 100 % de nos sites des refuges de biodiversité, planter 100 millions d’arbres dans le monde à travers notre fondation Yves Rocher en 2020 et au moins 200 millions en 2030. » Le but : permettre à l’ensemble des marques du groupe – au nombre desquelles figurent Petit Bateau, Daniel Jouvance, Sabon ou encore Stanhome et Arbonne… – d’accéder d’ici dix ans au Graal des entreprises vertueuses : la labellisation B Corp, cette certification venue des États-Unis qui, depuis 2006, récompense sur la base de 200 critères stricts les sociétés privées ayant apporté la preuve de leur engagement social, sociétal et environnemental. Une reconnaissance d’autant plus valorisée que, pour l’heure, seules 2 788 entreprises dans le monde, dont une centaine en France peuvent s’en prévaloir. Pour un groupe tel qu’Yves Rocher, dont le business model repose depuis les origines sur une vocation d’entreprise écoresponsable, obtenir la certification B Corp relèverait, une fois encore, de l’aboutissement logique. La reconnaissance d’un engagement historique plus que la mise en conformité avec les attendus d’une époque.

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Le siège social du groupe est installé dans le village breton de La Gacilly, berceau de la famille Rocher.

Du client au citoyen

 « La Nature Academy est en cours de création et formera nos collaborateurs à une conscience écologique encore plus militante ; ce sont eux, par exemple, qui plantent des arbres. Ils sont associés aux actions RSE du groupe afin d’en être les ambassadeurs », ajoute Yann Étienne Le Gall avant de préciser que, à plus petite échelle, le groupe s’emploie à réduire chaque année sa consommation d’eau et d’électricité sur l’ensemble de ses sites. Une cohérence qui, en ayant contribué à justifier la transformation d’Yves Rocher en entreprise à mission, lui permet aujourd’hui de s’inscrire dans un mouvement inéluctable. Celui voulant que, désormais, une marque ne puisse plus se contenter de s’adresser à des clients, mais soit dans l’obligation de le faire « à des citoyens qui veulent acheter en conscience ». Sans sacrifier l’intérêt général au leur.

Caroline Castets et Roxane Croisier

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