Souiller des œuvres d’art pour se faire entendre. Telle est la dernière trouvaille de certains activistes. Dans un monde au futur incertain, s’en prendre à la Joconde, Monet, Van Gogh ou Gauguin n’est pas le meilleur des symboles, bien au contraire.

Depuis un peu plus d'un an, s'en prendre à des œuvres d'art semble être la dernière mode pour gagner ses lettres de noblesse dans le petit milieu de l’activisme écolo. Le dimanche 28 janvier 2024, deux personnes ont aspergé de soupe la Joconde, fleuron du musée du Louvre. Motif ? Promouvoir une "alimentation saine et durable". Pas certain que les agriculteurs ou les consommateurs approuvent l'action qui, heureusement, n'a pas causé de dommage à la toile de Léonard de Vinci protégée par une vitre blindée. Cette action oscillant entre agit prop et vandalisme n'est pas un acte isolé. Le 14 octobre 2022, deux membres de l’association Just Stop Oil ont aspergé de soupe à la tomate Les Tournesols de Van Gogh à la National Gallery de Londres. La revendication de ces "personnes non genrées" comme elles se définissent ? L’arrêt des projets gaziers et pétroliers.

Le 23 octobre de la même année, ce sont deux membres du collectif Letzte Generation qui ont renversé de la purée sur Les Meules, toile de Monet exposée à Potsdam. Leur message ? "Nous sommes dans une catastrophe climatique et vous avez peur pour de la purée de pomme de terre sur un tableau ?" Quatre jours plus tard, La Jeune Fille à la perle de Vermeer a été dégradée à La Haye tandis qu’une tentative contre le musée d’Orsay a été déjouée. Cette fois les cibles étaient Gauguin et Van Gogh, encore lui.

L’activisme environnemental peut avoir du sens lorsqu’il s’en prend à des symboles de la pollution ou du réchauffement planétaire. Il est ainsi possible de trouver des circonstances atténuantes à ceux qui dégonflent les pneus des SUV ou viennent en maillot de bain sur les greens de golf en pleine période de sécheresse. Mais en quoi les hurluberlus barbouilleurs d’œuvres d’art font-ils avancer leur cause ? Quel est le lien entre leur acte et leur revendication ?

Si une chose doit être préservée et traverser les siècles, c'est bien l'héritage artistique de l'humanité

Leurs défenseurs estiment qu’ils réveillent les consciences. Mais nul besoin d’eux pour cela. La fonte des glaciers, les températures anormalement élevées (20 degré au sommet du Mont Dore à 1 800 mètres d'altitude en Auvergne ce week end) et les catastrophes climatiques qui se succèdent nous alertent suffisamment. Oui, des temps difficiles se préparent. Pour y faire face, il faudra faire preuve de rationalité et agir, étudier, consommer en pensant au bien commun. À l’inverse de ces zéros se rêvant héros.

Surtout, dans le monde qui vient, si une chose doit traverser les siècles, c’est bien l’héritage artistique de l’humanité. Nous devons le chérir, le préserver pour montrer que, si l’homme peut détruire, il est capable de créer.

Jusqu’à présent, les seuls régimes politiques qui ont osé brûler des livres ou des tableaux, interdire des formes de musique ou dynamiter des statues sont les pires que l’humanité ait engendrés : Inquisition espagnole, bolcheviks, nazis, Khmers rouges, talibans. Les responsables politiques soutenant les attaques contre l’art devraient s’en rendre compte, eux qui aiment tant incarner le camp du bien…

Lucas Jakubowicz

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