Le dispositif Dutreil, aussi appelé "pacte Dutreil" a été initié par la loi de finances 2001. Ce dispositif évolue sans cesse mais un point est clair, c’est un formidable outil de transmission de l’entreprise familiale permettant d’alléger le coût des droits de donation ou de succession que l’on sait très pénalisant pour la pérennité de ces entreprises.
L’intérêt du pacte
Transmettre est une histoire de lien qui suppose un dialogue et un partage. Le dispositif Dutreil repose sur l’engagement d’assurer la stabilité du capital et le maintien de la direction de l’entreprise au moment de sa transmission. En 2019, la loi Pacte est venue modifier le pacte Dutreil, et ce, dans le but de le rendre bien plus attractif pour les entreprises. D’ailleurs, ce régime fiscal n’est pas réservé qu’aux PME, mais à toutes les entreprises, et ce quelles que soient leur taille. Ainsi, l’objectif du pacte Dutreil est simple :
  • il permet de bénéficier d’une exonération maximale de 75 % de la valeur des titres ou de la valeur de l’entreprise individuelle à l’occasion d’une donation ou lors du règlement d’une succession ;
  • il permet de profiter d’une réduction de droits de 50 % lorsque les donations portent sur la pleine propriété de titres dès lors que le donateur est âgé de moins de 70 ans.
Et ce, sur toute société ayant une activité prépondérante industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale. Le dispositif peut également concerner des titres de sociétés holding animatrices de groupe, ou des titres de sociétés interposées dans la limite de deux niveaux d’interposition (attention, en cas d’interposition de sociétés, les participations devront demeurer inchangées à chaque niveau durant toute la durée des engagements de conservation). C’est pour cela que ce dispositif séduit de plus en plus de chefs d’entreprise (plus de 2000 pactes signés en 2018). En effet, bien souvent, les titres de l’entreprise constituent l’essentiel du patrimoine du dirigeant. Sans ce dispositif, les héritiers seraient soumis à des taux marginaux d’imposition de 45 % en ligne directe et de 60 % sans lien de parenté. Pendant longtemps, ces taux conduisaient la plupart du temps à considérer la vente partielle ou totale de l’entreprise pour payer les droits de succession.
Désormais, en cas de donation, l’assiette taxable des droits de mutation à titre gratuit est égale à 25 % de la valeur des titres donnés. Par ailleurs, les donations en pleine propriété consenties par un donateur ayant moins de 70 ans bénéficient d’une réduction de droits de 50 % (article 790 du CGI). Enfin, les donations consenties avec réserve d’usufruit ne bénéficient pas de cette réduction de droit mais bénéficient, en outre de l’exonération partielle de 75 %, d’une diminution de l’assiette taxable résultant de l’usufruit réservé, en application de l’article 669 du CGI EX : 50 % pour un chef d’entreprise qui transmet entre 51 et 60 ans, 40 % si celui-ci a entre 61 et 70 ans.

 

Les engagements de conservation à respecter après la transmission
Pour pouvoir bénéficier de ce régime fiscal, l’entreprise et les donataires, ou les héritiers doivent respecter plusieurs conditions. La notion d’engagement collectif de conservation est complétée par un engagement unilatéral de conservation. En effet, le chef d’entreprise doit prendre avec au moins un autre associé/actionnaire, l’engagement de conserver l’ensemble de leurs parts/actions pendant au moins deux ans (sauf engagement réputé acquis), à compter de la date d’enregistrement de l’acte le constatant ou, le cas échéant, de la date de l’acte authentique. Enfin, à la transmission, les héritiers doivent eux aussi s’engager à conserver leurs titres pendant au moins quatre ans, et ce, individuellement.
Enfin, l’un des bénéficiaires doit poursuivre l’exploitation et prendre en charge la direction de l’entreprise pendant la durée de l’engagement collectif, et pendant les trois années qui suivent la transmission par l’un des donataires ou par l’un des signataires de l’engagement collectif. L’engagement collectif doit porter sur au moins 17 % des droits financiers et 34 % des droits de vote (seuil de 10 % des droits financiers et 20 % des droits de vote pour les sociétés cotées). Tolérances ne remettant pas en cause le principe de l’exonération : cessions entre signataires du pacte ou apports à holdings lorsqu’il y a une reprise d’engagement.
 
Holding familiale animatrice et pacte Dutreil
Par nature, les sociétés holding ne rentrent pas dans le cadre d’une transmission Dutreil. Aujourd’hui, la plupart des entreprises sont structurées sous forme de groupe de sociétés avec à leur tête la société holding. En détenant plusieurs participations dans la ou les sociétés opérationnelles, elle assure le contrôle des filiales et participent activement à la conduite de la politique du groupe. Son rôle n’est pas nécessairement commercial mais elle chapote les structures et on l’appelle holding animatrice de ses filiales. Lorsque la holding est reconnue "animatrice du groupe", le dispositif Dutreil pourra s’appliquer, comme les prestations de services réalisées au profit des filiales. Elle est l’outil privilégié de la transmission de l’entreprise, car elle est considérée comme une entreprise à part entière, elle ne se contente pas de gérer les participations.
 
Holding patrimoniale
Il est possible de transmettre les titres d’une société holding patrimoniale mais avec au maximum deux niveaux d’interposition. Par ailleurs, il faudra proratiser la quote-part des titres de la société holding pouvant bénéficier de l’exonération partielle (quote-part "dutreillable").
 
Donation démembrée
Le pacte Dutreil permet également de mettre en place une donation ayant pour objet la nue-propriété des titres de la société :
  • ainsi, au titre du démembrement, le donateur diminuera de l’assiette taxable la valorisation de son usufruit réservé en application du barème de l’article 669 du CGI ;
  • ensuite, il conviendra d’appliquer l’exonération partielle des 75 % au titre du dispositif Dutreil ;
  • enfin, il conviendra de déduire les abattements légaux disponibles (Ex : 100 000 euros par parent/enfant).
Attention toutefois, la donation de la seule nue-propriété de la société sous le régime Dutreil impose la réduction des pouvoirs du dirigeant donateur. En effet, le droit de vote de l’usufruitier devra nécessairement être limité à l’affectation du résultat de la société. En cas d’interposition de société, ce sont les statuts de la société dont les titres seront effectivement transmis qu’'il conviendra de modifier préalablement à la donation. En conséquence, des arbitrages pourront être effectués par le donateur afin de ne pas se dessaisir totalement des droits politiques. Par exemple, une donation en nue-propriété portant sur 49 % des titres sociaux, lui permet alors de conserver le contrôle de la société et la majorité au sein des assemblées dans lesquelles il exercera son droit de vote. En tant que conseil, Allure Finance accompagne ses clients chefs d’entreprise dans la transmission de leur patrimoine sur le plan fiscal. Cette réflexion s’accompagne d’autres conseils, comme les donations, l’ouverture de contrats d’assurance-vie, le démembrement de contrats…

 

Mathilde Reverberi, associée, Allure Finance

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