Après 15 mois de crise sanitaire, le bouleversement de l’organisation du travail sera-t-il définitif ?

Le télétravail : une nouvelle façon de travailler ?

Avec les confinements, puis les mesures persistantes de distanciation sociale, confirmées par le dernier protocole sanitaire, les entreprises ont dû généraliser le télétravail. Ses avantages sont évidents pour réduire les temps de trajet, favoriser délégation et responsabilisation et limiter les coûts de fonctionnement des entreprises. Toutefois, les inconvénients sont également clairs avec la difficile déconnexion, le recul des frontières entre vies personnelle et professionnelle, l’isolement de certains salariés et l’explosion des burn-out.

La généralisation du télétravail pose aussi la question du contrôle du temps de travail. Épée de Damoclès pour les employeurs, levier de négociation pour les salariés, le temps de travail occupe le devant de la scène juridique sociale depuis 20 ans. Force est de constater qu’on ne s’en sort pas. Le télétravail marquerait-il la fin du fléau du présentéisme et de l’impossible contrôle du temps de travail, pour une organisation à la tâche et à l’objectif plus proche de celle des indépendants ? 

De la qualité de vie au travail à la qualité de vie tout court ? 

Nombreux sont les salariés qui sont en cours de reconversion professionnelle pour un retour vers la ruralité, une recherche accrue de sens, une priorité donnée à la famille. L'hôtellerie et la restauration déplorent la fuite de leurs employés qui se sont tournés vers des emplois moins contraignants au niveau des horaires. Ce mouvement remet au centre des débats la formation professionnelle, enjeu encore trop mal adressé. 

Des plus grands pouvoirs pour les employeurs ? 

L’avalanche est partie du sommet : l’Etat Providence, pour ne pas dire providentiel, avec sa politique du “quoi qu’il en coûte”, a payé une part importante des salaires du privé et accru ses pouvoirs sur les entreprises. En contrepartie, l’Etat a augmenté les pouvoirs des employeurs, comme celui d’imposer des modifications du contrat sans l’accord du salarié, et sans réel contre-pouvoir des représentants du personnel. Entre baisses de rémunération, modifications du temps de travail, télétravail imposé et congés payés décidés avec un seul jour de prévenance, dans un contexte de crainte du licenciement, le salarié n’a plus son mot à dire. 

Les fondamentaux de l’organisation du travail ont été bouleversés. Saurons-nous en faire le bilan et saisir cette opportunité pour inventer une organisation du travail innovante et adaptée, pour le monde d’après ? 

Alexandra Sabbe-Ferri, avocate en droit social, fondatrice du cabinet Sagan Avocats et de Mesindemnités.com

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