Économiste de renom, Jeremy Rifkin consacre un ouvrage entièrement dédié à la green economy. En quoi consiste donc la pensée de l’auteur américain ?

Dans l’économie verte, tout est une histoire de coût pour Jeremy Rifkin. L’essayiste américain, auteur d’ouvrages qui ont durablement influencé les sciences sociales (L’Âge de l’accès ; La Nouvelle Société du coût marginal zéro) défend, dans son dernier opus Le New Deal vert mondial, un plan d’action pour endiguer le réchauffement climatique et éviter l’effondrement de notre civilisation. Dans cette logique de sauvegarde et de transition, tout repose sur une seule clé de voûte : le coût moyen des énergies renouvelables. Passé en dessous du coût des énergies fossiles en 2019, il est susceptible de déclencher de futures réactions en chaîne contre lesquelles Jeremy Rifkin propose de se prémunir dès maintenant.

Chaos écologique

L’économie verte, telle que Jeremy Rifkin la décrit, repose sur un fond de chaos écologique que les plus sceptiques réfutent sans même l’examiner. Pourtant, la baisse du coût moyen de l’énergie solaire à l’échelle industrielle, c’est-à-dire à un prix moindre que le nucléaire, le gaz, le charbon et le pétrole, sera l’une des tendances qui feront éclater la bulle financière entretenue par les actifs carbones. Le scénario catastrophe que dresse l’ancien professeur de la Wharton School fait froid dans le dos, d’autant qu’il s’adosse à de solides études sectorielles. Ainsi, le groupe de réflexion anglais Carbon Tracker Initiative définit l’implosion du capitalisme actuel à partir du moment où les sources solaires et éoliennes représenteront 14 % de la production internationale d’électricité. Une situation qui s’apparenterait à de la science-fiction, si l’Europe n’avait atteint ce seuil en 2017 et que le reste du monde risquait d’y parvenir d’ici à 2028.

En 2019, le coût moyen des énergies renouvelables est passé en dessous de celui des énergies fossiles

S’ensuivra de facto une obsolescence de toutes les industries liées aux énergies fossiles, financées par d’importants investissements sur le long terme du fait de la logistique complexe induite par l’exploitation des matières premières et de la lourdeur de ses infrastructures. Des actifs donc invendables et impossibles à rentabiliser. La banque Citygroup les estime à un montant de 90 000 milliards d’euros. Quelles actions sont alors possibles pour dynamiser l’économie actuelle et éviter la banqueroute de notre futur ?

Plan d’urgence ou utopie

Selon l’économiste, la nouvelle donne qui se prépare répond en tous points à une troisième révolution industrielle organisée autour de trois caractéristiques essentielles : l’émergence d’une nouvelle énergie, de nouveaux moyens de transports et de nouvelles voies de communication. Notre système capitaliste se distingue ainsi par la prépondérance du pétrole, de la voiture, du téléphone et de la télévision. La prochaine révolution industrielle prendrait forme grâce aux énergies renouvelables, aux véhicules autonomes et à l’Internet. Dans les analyses de Jeremy Rifkin, le Web tient d’ailleurs une place centrale, permettant l’interconnexion entre les individus, les objets, les moyens de locomotion et les énergies. Elle permettrait d’absorber, à un niveau acceptable, le réchauffement climatique.

La finance joue un rôle central dans ce plan d’action. L’argent bloqué dans les fonds de pension – 41 300 milliards de dollars dans le monde en 2017 – serait massivement investi dans ce New Deal vert pour éviter un effondrement économique. Certains qualifient ces théories d’utopistes. Appelé par les gouvernements de la Chine et de l’Allemagne, Jeremy Rifkin apportera-t-il la preuve par l’exemple que son économie verte est plus réaliste qu’il n’y paraît ?

Nicolas Bauche

A lire : Le new deal vert mondial, Jeremy Rifkin, Les liens qui libèrent, 304 pages, 21,80 euros.

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