Entretien avec Maxime Le Bidois, directeur, et Pierre-Emmanuel Cochet, consultant. KLB Group

Près de la moitié du chiffre d’affaires global serait générée par la communication sur Internet. Pourtant, les dépenses de webmarketing ne représentent qu’un quart des dépenses marketing globales dans les entreprises. Les sociétés doivent donc gagner en maturité sur cet axe de promotion qu’est le Web, comme l’expliquent Maxime Le Bidois et Pierre Emmanuel Cochet.


Décideurs. Le budget webmarketing représente environ un quart des dépenses marketing dans les entreprises alors que selon une étude Forrester Research, près de la moitié du chiffre d’affaires global serait actionné par la communication sur Internet. N’est-ce pas paradoxal??

Pierre-Emmanuel Cochet. En préambule, il convient de rappeler qu’aujourd’hui dans la distribution, le chiffre d’affaires moyen généré sur Internet représente 10 % du chiffre d’affaires global d’une enseigne. Toutefois, la moitié du chiffre d’affaires global est réalisée grâce à de la communication sur le Web. On a longtemps voulu opposer Internet aux magasins physiques, à tort. Car une importante partie du parcours client est effectuée à partir du Web. L’acte d’achat, pourtant, continue de se faire principalement dans les magasins physiques.


Maxime Le Bidois. Ce n’est pas encore paradoxal car, même les entreprises matures qui disposent d’une stratégie digitale établie manquent toujours d’outils de traçabilité sérieux qui leur permettraient de mesurer leur retour sur investissement (ROI). Aujourd’hui, on sait identifier un client, on sait préparer le réassort de manière proactive. Mais les acteurs ont encore du mal à entrer dans une granularité fine. Les grandes entreprises ne savent pas tracer l’ensemble de la chaîne de vente. Il n’y a pas encore eu une démonstration définitive de l’impact du digital dans les entreprises. Le Web évoluant en permanence, les entreprises vont devoir continuer de s’adapter.


Décideurs. Comment faire gagner en maturité les entreprises sur cet axe de promotion qu’est le Web??

M.?Le B. Nous concernant, nous prenons le parti d’apporter un haut degré d’expertise à nos clients. Nous voulons leur donner une vision sur leur marque, leurs consommateurs et leurs fournisseurs. Un grand acteur du marketplace a fait appel à nous pour valider la pertinence de sa plate-forme vis-à-vis des marchands qui y figurent. Nous organisons des réunions tripartites pour guider, faciliter la compréhension et la manière dont nos clients vont pouvoir analyser leurs résultats. Nous challengeons en permanence les positionnements pris.


P.-E. C. Nous nous attachons à comprendre leurs besoins et, le cas échéant, à les recadrer.


M.?Le B. Enfin, nous remettons en cause en permanence les stratégies Web. Les sites doivent être adaptés en fonction des cultures locales de consommation.


Décideurs. Comment optimiser la chaîne de valeur du Web??

P.-E. C. Il ne faut pas se limiter au seul levier Web, mais prendre en considération l’ensemble de la chaîne de valeur. Pour optimiser, il convient de remettre en cause toutes les actions qui ont été conduites à chaque étape de la chaîne de valeur. Par exemple, sur une campagne de promotion, on va challenger les objectifs et les moyens investis. Puis, grâce à l’analyse de toutes les informations récoltées, on trouvera les bons leviers et les bonnes cibles. Par ailleurs, la chaîne de valeur du Web passe aussi par le contenu?: de la page internet jusqu’à la manière d’approcher le client. Notre valeur ajoutée est d’apporter cette vision à 360, et de mettre en place les actions correctives. On s’est rendu compte, chez un de nos clients, que les services marketing digital et traditionnels étaient cloisonnés. Aucun point convergent n’harmonisait leurs campagnes de promotion. Nous avons transformé cette organisation en silo en une structure en réseau pour gagner en cohérence dans les messages et optimiser l’ensemble de la chaîne de valeur.


M.?Le B. Nous accompagnons nos clients sur deux volets principaux. Tout d’abord, l’optimisation des coûts, autrement dit?: faire plus ou l’équivalent, avec moins. Pour cela, nous remettons en cause les pratiques, nous renégocions les contrats, les campagnes et leur efficacité. Puis, la performance. Nous challengeons la stratégie Web et le positionnement de la marque sur Internet, ainsi que l’ensemble des parties constituantes qui contribuent à l’apport de clients. 


Décideurs. Quels outils recommandez-vous pour analyser l’impact d’une stratégie/campagne marketing et en mesurer leur ROI??

P.-E. C. Il existe de plus en plus d’outils. C’est efficace quand on part de zéro, mais au-delà, on se heurte à la problématique de la gestion fine de données. Sur la mesure de la performance, on ne trouve aucun outil qui formulera des recommandations de manière précise. De plus, un retour sur investissement ne se fait pas nécessairement dans le court terme. Bien au contraire, c’est souvent sur du long terme. On doit donc récupérer tout un ensemble d’informations, puis les compiler. Il existe, bien sûr, des solutions de tracking telles que Google analytics, clicktale... Elles proposent des recommandations globales, mais cela reste sommaire. Aujourd’hui, les outils ne sont qu’un premier jalon. Chaque fois, le client veut aller plus loin. La granularité, la finesse de l’analyse sur un ROI sur le Web sont compliquées. Mais les outils progressent vite. 


Décideurs. On assiste aujourd’hui à une multiplication des outils (smart data, mesure de la performance…) dans les départements marketing, ce qui les oblige à adopter des modes de fonctionnement nouveaux. Quel regard portez-vous sur cette évolution??

P.-E. C. Cela fait plusieurs années que les entreprises sont en phase de collecte de données. Aujourd’hui, l’enjeu est de les analyser et profiter de ce gain de visibilité. C’est une vraie opportunité pour lancer de nouvelles actions, affiner les stratégies. Les outils permettent de rectifier le tir lorsqu’une campagne marketing ne connaît pas un ROI suffisant.


Décideurs. Les départements marketing évoluent dans un contexte budgétaire tendu, de plus en plus réduit. Comment transformer cette contrainte en une belle opportunité??

M.?Le B. Les missions d’optimisation des coûts sont souvent pilotées par les directions financières. Les budgets de fonctionnement se trouvent réduits. Nous essayons donc d’actionner tous les leviers d’optimisation des coûts pour assurer le même niveau de prestation. Ce qui passe par une remise en cause des pratiques, des innovations actualisées ou bien une optimisation des processus. On peut réaliser moins de campagnes, mais mieux positionnées avec, en vue, une génération de plus de chiffre d’affaires. On peut aussi travailler sur les stratégies de promotion sur les sites tiers, en repensant les rémunérations proposées par nos clients. Une action peut être menée aussi sur les frais d’hébergement, en challengeant les infrastructures techniques.


P.-E. C. Au global, sur l’ensemble des missions que nous avons menées, nous avons obtenu une réduction de l’ordre de 10 à 15?% des coûts. Il faut souligner qu’il est très rare aujourd’hui d’arriver encore à réaliser des économies, après plusieurs années de crise, quand de nombreux budgets ont déjà été revus à la baisse. Nous remettons assez facilement en cause l’existant pour aller chercher des leviers innovants de performance. Le principal est de payer une prestation au juste prix. Depuis longtemps, les agences facturent des success fees selon un pourcentage uniforme. Pour notre part, nous adaptons ce pourcentage en fonction des difficultés des objectifs.

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