La France compte 5 400 entreprises de taille intermédiaire. Le co-président du Mouvement des ETI, Frédéric Coirier, dresse le bilan de la situation de ces moteurs de l’industrie française et expose les besoins en fonds propres d’un quart d’entre elles.

Décideurs. Comment se portent les ETI françaises au premier trimestre 2021 ?

Frédéric Coirier. En dehors des secteurs complètement fermés avec des baisses d’activité supérieures à 50 %, les chiffres d’affaires des ETI ont baissé de 6 % en moyenne. Un résultat meilleur que prévu, à comparer avec un recul du PIB français de 8 %. Résilientes, les ETI ont conservé, voire créé des emplois. Dans une période d’augmentation du chômage, elles sont à l’origine de près de 5 000 créations nettes contre plus de 22 000 en 2019, tandis que les grands groupes ont détruit des emplois. L’activité au premier trimestre 2021 s’améliore et les chiffres d’affaires progressent légèrement. On retrouve une certaine normalisation malgré un manque de visibilité sur la situation sanitaire.

Quelle est leur situation d’endettement ?

Alors que 60 % des ETI ont sollicité un PGE, moins de la moitié d’entre elles l’ont utilisé. En dehors des secteurs fragilisés, elles n’ont pas augmenté leur endettement de manière excessive. De manière générale, la situation des entreprises de taille intermédiaire se maintient. Un quart, dans des secteurs porteurs, performent particulièrement bien, la moitié sont stables et le dernier quart rencontrent des difficultés importantes. Pour celles-ci, la continuité des mesures de soutien, tant que l’activité ne sera pas revenue à la normale dans leur domaine, sera nécessaire. Elles auront besoin de renforcer leurs fonds propres, à la fois pour financer leurs investissements et éviter la prédation.

"Les dispositifs obligataires ou les prêts participatifs enlèvent la pression du court terme"

À quelles solutions les entreprises les plus affectées peuvent-elle recourir ?

Au-delà des programmes sectoriels spécifiques, les entreprises fermées par décret, saines et rentables avant la crise, auront besoin d’un soutien en quasi-fonds propres pour stabiliser leurs bilans le temps qu’elles se refassent une santé. Cette mesure permettra également de financer les investissements de sociétés qui en ont besoin en attendant le retour des niveaux de rentabilité pré-Covid. Dans cette optique, les dispositifs obligataires ou les prêts participatifs, avec une maturité de 8 ans et des coûts raisonnables, enlèvent la pression du court terme, liée notamment aux remboursements. La crise est telle que l’ensemble des parties prenantes des entreprises doit faire preuve de patience et de raison afin de préserver le tissu économique français. Jouer collectif sera la clé de la survie des entreprises et de la relance. Aujourd’hui, le portefeuille de possibilités de financements et d’offres à des coûts raisonnables est inédit. Charge aux dirigeants de faire preuve de transparence et de communiquer sur leurs projets pour accéder à davantage de moyens.

Comment éviter la prédation par des entreprises étrangères ou des fonds vautours ?

Fers de lance de notre économie, pour la plupart positionnées sur des niches, les ETI pèsent 1 000 milliards d’euros de chiffre d’affaires. En outre, implantées dans les territoires, elles créent de l’emploi et ont pour 70 % d’entre elles un actionnariat majoritairement français. Ce capitalisme français, vertueux, est à privilégier. Et ce, quelle que soit la forme de financement. Ensuite, tout dépend de la situation de l’entreprise et de son projet. Le fonds d’investissement constitue un mode de financement parmi d’autres. Celui-ci peut être une solution pour éviter qu’elles passent sous pavillon étranger. En tout état de cause, il faut empêcher que les entreprises françaises se vendent pour de mauvaises raisons.

"Les ETI pèsent 1 000 milliards d’euros de chiffre d’affaires"

Les fonds d’investissement représentent-ils un actionnaire pertinent pour renforcer les bilans ?

Un actionnariat stable et de long terme permet de traverser les crises plus sereinement quand une société gérée à court terme tend à surréagir. C’est la façon dont la croissance à long terme est envisagée, en continuant sur ses fondamentaux et en poursuivant les investissements, qui détermine la reprise. Un quart des ETI comptent dans leur actionnariat des fonds d’investissement, régionaux ou nationaux, avec lesquels elles collaborent. Si certains fonds, impatients ou gourmands, freinent le développement de l’entreprise, de nombreux investisseurs financiers ont compris qu’il fallait accorder du temps.

Propos recueillis par Anne-Gabrielle Mangeret

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