Le quasi-centenaire a commencé par un petit commerce de riz et s’est peu à peu construit un empire qui comprend des plantations d’huile de palme ou la chaîne d’hôtels Shangri La.

Si un jour vous demandez à un Malais la principale caractéristique des milliardaires locaux, il est fort probable que l’adjectif le plus fréquemment mentionné soit le suivant : vieux. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. La moyenne d’âge des dix plus grosses fortunes du pays est de 80 ans. Le plus riche d’entre eux, Robert Kuok, affiche pour sa part 98 printemps et 11,7 milliards de dollars.

Au service du Tigre

Né en 1923 dans ce qui était alors une possession de l’empire britannique, il grandit dans une famille de commerçants qui lui donne une éducation soignée, c’est-à-dire en langue anglaise. Sa mère est une bouddhiste fervente, son père un communiste mort dans le maquis pendant la guerre d’indépendance. Très jeune, accompagné de ses frères William et Philip, il reprend le commerce de riz familial et décide de se diversifier dans celui du sucre (culture, raffinage, exportation…). Fier de ses origines chinoises et doté d’un sens aigu de l’anticipation, il vend à prix cassé du sucre au régime maoïste qui lui renverra l’ascenseur au moment de la libéralisation économique.

Au milieu des années 1960, Robert Kuok est déjà milliardaire. Le gouvernement malais dont la politique mélange dirigisme et capitalisme favorise l’émergence de tycoons locaux et la création de conglomérats pour faire du pays un « tigre asiatique », soit une nation à très forte croissance vouée à passer de pays du tiers-monde à État développé en quelques décennies. Robert Kuok en profite pour tisser sa toile.

Montée en gamme

Au-delà du commerce de sucre, Robert Kuok et sa société PPB Group Berhad se lancent dans l’huile de palme, l’embouteillage de Coca Cola pour l’Asie du Sud-est, la construction d’infrastructures. Dans les années 1970, la Chine de Deng Xiaoping lui ouvrira ses marchés en souvenir des services rendus quelques années plus tôt.

L’empire de Robert Kuok se diversifie aussi dans le secteur des services et accompagne la tertiarisation de son pays natal. En 1971, il fonde la chaîne d’hôtels haut de gamme Shangri La qui possède aujourd’hui 40 000 chambres et plus de 100 établissements sur la surface du globe. Autre corde à son arc, le business des salles de cinéma grâce à la société Golden Screen Cinemas qui possède 70 salles en Malaisie.

Succession ?

Bientôt centenaire, Robert Kuok est plus proche de la fin que du début. Pourtant, celui qui continue à garder un œil avisé sur son conglomérat ne semble pas prêt à passer la main, aucun plan de succession n’a été évoqué. Le patriarche aime d’ailleurs répéter la phrase suivante : « Si mes enfants et mes petits enfants me ressemblent, ils n’ont nul besoin d’hériter de moi. Mais s’ils ne me ressemblent pas, pourquoi faudrait-il que je leur laisse ma fortune ? » L’hésitation du tycoon hésite, est peut-être liée à un certain embarras du choix, lui qui est le père de huit enfants et se repose sur des neveux performants. C’est notamment le cas de Khoon Hong qui a développé avec maestria l’activité spécialisée dans l’huile de palme. Robert Kuok est également un modèle pour de nombreux entrepreneurs locaux qui ont dévoré ses mémoires hissées au rang de best-seller dans les librairies de Kuala Lumpur.

Lucas Jakubowicz
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