La planète râle et brûle, ses occupants suffoquent. Certains trient, d’autres polluent, la plupart un peu des deux. Les éco-anxieux s’affolent et le climatoscepticisme progresse.

Produite par l’Observatoire international Climat et Opinions Publiques (EDF et Ipsos), une récente enquête révèle la progression du climatoscepticisme en France. On compte aujourd’hui 37% de climatosceptiques dont 29% qui admettent le changement climatique mais en rejettent son origine anthropique. Un chiffre en hausse de huit points en un an.

Constat

Le changement climatique dispose de quelques arguments de poids pour justifier de sa réalité – températures saugrenues, incendies frénétiques, inondations anachroniques, grêlons hypertrophiés, tempêtes éloquentes – mais son caractère anthropique ne semble convaincre qu’une part de la population. En effet, de plus en plus de Français sont séduits par l’idée qu’ils ne sont pour rien dans le réchauffement climatique, ce qui est intellectuellement confortable et  autorise, en pratique, à ne rien changer de ses habitudes. C’est d’ailleurs un point qui peut être discuté, au moins du point de vue des températures, mais l’empreinte de l’homme sur la nature demeure indiscutable. Et construire une autoroute, même si elle est traversée de petits ponts pour permettre aux animaux de la franchir, évacue pas mal de nature, de même que transplanter des coraux pour restaurer les fonds marins n’empêche pas la destruction de la flore existante. L’instabilité mondiale, les difficultés économiques, peuvent amener à une forme de gestion intellectuelle des priorités et à un partage des préoccupations. La méfiance vis-à-vis de la science, la défiance envers les médias et l’hostilité aux discours politiques, participent également de cette incrédulité.

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Figurines

La neutralité de la presse s’amenuisant, et même s’il ne faut pas s’interdire d’interroger celle du Giec, tout ce qui peut émerger d’un média doit être considéré comme un avis, une opinion. Et les opinions, si elles encouragent à se forger la sienne, affectent la valeur de la vérité. A contrario, le discours parfois outrancier de quelques porte-voix des souffrances planétaires, thérapeutes zélés de Dame Nature, se révèle souvent inefficace, les figures émergentes du combat climatique, qu’ils s’assoient au beau milieu de la route ou aspergent les toiles de soupe, sont caricaturées quand ils ne sont pas, par nature, un peu caricaturaux. Il est légitime de se demander qui, devant ces images, va se dire "Demain, j’arrête la bagnole" ? Il ne s’agit donc pas de confronter le climatoscepticisme à une forme de radicalité écologique qui, bien souvent, ne fait que le nourrir, mais de faire entendre qu’un consensus des meilleurs scientifiques de 195 États ne constitue pas qu’une gageure. Qu’un rapport du Giec mériterait en tout cas un peu plus d’attention que celle que l’on accorde à un présentateur qui interroge la réalité du réchauffement climatique alors qu’il fait froid quelques jours par an. Ce scepticisme ne peut plus être l’expression d’une préoccupation matérielle ou d’une confusion morale.

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Vents contraires

Si cet automne concourt pour être le plus doux recensé au cours du siècle dernier, il sera peut-être aussi le plus frais du prochain. Ce bouleversement généralisé, qui nous promet une fournaise à plus ou moins long terme selon le calendrier ou la rigidité de la prise en main du phénomène, n’a pourtant pas empêché la dernière coupe du monde de se jouer au Qatar, ni les prochains jeux asiatiques d’hiver de se tenir en Arabie saoudite. La lutte contre le dérèglement climatique nécessite des sacrifices et les sacrifices c’est nul. Qu’est-ce qu’une bouteille en verre dans la poubelle ad hoc lorsqu’un kiwi fait le tour de la terre pour arriver dans une assiette ? La plongée en Polynésie c’est mieux que de faire une monodiète de pommes en Dordogne dans une cabane équipée de toilettes sèches et, dans un avion, il demeure plus cohérent d’être climatosceptique qu’écologiste. Ces contradictions finissent d’alimenter un scepticisme qui ne dérangerait personne s’il n’enrayait pas le collectif. Il n’existe pas, aujourd’hui, une solution systémique qui résoudrait toute l’équation comme par magie, sinon un engagement commun de la fonction publique, de la force privée et de la population. Le réchauffement climatique n’est pas un complot comme un autre.

Alban Castres

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