En vingt ans, le nombre de fondations a doublé. Pour les aider à se structurer et à définir une stratégie sur le long terme, la Fondation de France met à leur disposition son expertise.

 Décideurs. Quelles sont les missions de la Fondation de France ?

 Axelle Davezac. Pour comprendre notre rôle, il faut remonter aux origines de notre création il y a un peu plus de cinquante ans. Nous sommes le pays des associations, celui de la loi de 1901, et pourtant le général de Gaulle a décidé de mettre sur pied notre fondation car il voulait arriver à développer la générosité et la philanthropie en France. Il a mandaté André Malraux et Michel Pomey pour qu’ils y réfléchissent. Michel Pomey a suggéré l’idée d’une community foundation sur le modèle américain, c’est-à-dire d’une fondation qui travaille à l’échelle d’un territoire. D’où notre nom : Fondation de France. C’est la raison pour laquelle nous soutenons toutes les causes d’intérêt général en accompagnant tous ceux qui souhaitent s’engager de manière à accélérer leur projet et le développement de solutions. La Fondation de France travaille aussi bien avec les particuliers qu’avec les entreprises. Son expertise unique et ses connaissances lui permettent de soutenir 12 000 projets par an.

La philanthropie d’entreprise se développe à grands pas. Dans quelles proportions ?

 Nous avons développé un Observatoire de la philanthropie, qui produit notamment des données et analyses sur l’évolution du secteur des fonds et fondations, son poids économique et sa contribution sociétale dans tous ses domaines d’intervention. En vingt ans, le nombre de fondations a doublé pour atteindre 3 000 structures. Ces organisations répondent aux attentes des entreprises qui s’interrogent sur leur rôle dans la société et leurs stratégies RSE. La crise du Covid a également généré une prise de conscience très forte : les entreprises doivent prendre leur part dans les causes d’intérêt général. La Fondation de France s’est mobilisée dès mars 2020 afin d’aider les soignants et les personnes les plus vulnérables très exposées durant cette crise. Nous avons eu plus de 400 entreprises, avec lesquelles nous n’avions pas de lien, qui nous ont appelés car elles voulaient agir. Le mouvement se poursuit aujourd’hui. La moitié des nouvelles fondations créées chaque année sont des fondations d’entreprise, alors qu’auparavant la proportion était plutôt d’un tiers.

"Ce qui est mauvais pour l’intérêt général ce sont les mouvements incessants dans la législation fiscale"

Pourquoi les entreprises vous contactent-elles ?

De plus en plus d’entreprises viennent nous voir pour s’abriter à la Fondation de France. Il s’agit de sociétés qui souhaitent structurer leur action philanthropique ou de mécénat. Comment construire un projet complémentaire à ce qu’elles font déjà ? Nous travaillons avec elles sur le fonctionnement de la fondation, mais aussi en les accompagnant dans la définition des axes sur lesquels elles désirent s’engager. Ceux-ci doivent être cohérents avec leurs objectifs, leur culture et ce qu’attendent les collaborateurs. Ensuite, nous les aidons à mettre en œuvre leurs différentes actions. Il est toujours complexe de construire un programme sur plusieurs années. Comme dans le milieu des affaires, il est indispensable d’établir une stratégie de philanthropie pour que l’argent soit dépensé de manière efficace. Notre savoir-faire est précieux car nous pouvons non seulement leur présenter différents acteurs grâce à nos comités bénévoles mais aussi les mettre en relation avec des fondations qui s’intéressent aux mêmes sujets. Ce qui permet de monter des programmes puissants.

Plaidez-vous en faveur d’une fiscalité encore plus avantageuse en matière de philanthropie ?

Ce qui est mauvais pour l’intérêt général, ce sont les mouvements incessants dans la législation fiscale. Nous prônons la stabilité des dispositifs. À chaque fois que la législation évolue, cela crée de l’incompréhension et le sentiment qu’il est difficile pour une entreprise de s’engager dans le temps long. Or, quand on s’attaque à des sujets comme l’éducation, l’égalité femme-homme ou la transition écologique, un horizon de cinq ans minimum est nécessaire pour provoquer des changements profonds. Quant au faux débat sur le fait que la fiscalité serait trop avantageuse, je réponds toujours que cela coûte moins cher de ne pas donner.

Propos recueillis par Olivia Vignaud