Le code du travail n’est pas la seule cible du gouvernement. Les discriminations à l’embauche le sont aussi. Zoom sur une démarche méritante, pourtant loin de faire l’unanimité.

Le 25 mai 2016, Euro Disney comparaît pour discrimination à l’embauche après la publication d’une offre d’emploi destinée aux candidats de « nationalité européenne ». Mais le gouvernement n’a pas attendu la mésaventure du parc d’attraction pour réagir. Dans le métro, les gares et les kiosques, 2 000 panneaux ont été habillés de l’affiche « Les compétences d’abord ». Cette image scindée en deux montre une personne blanche avec le texte « À demain » et une autre de couleur où il est mentionné « Désolé on ne cherche personne ». Sur le papier, rien à dire. Dans les faits, ces affiches divisent plus qu’elles ne rassemblent. Le sociologue Jean-François Amadieu déplore son caractère uniquement ethno-racial, qui ne concerne que 6 % de la population – avec 88 % des cas discriminants, l’âge reste le premier critère. La mobilisation s’en trouve donc plus limitée. Pour Loïc Mercier, directeur des stratégies de BBDO du groupe Omnicom, « la campagne est trop sage. » Et André Bercoff va même plus loin en dénonçant une discrimination inattendue, celle du « blanc oppresseur, colonialiste et coupable ». Malgré le manque de solutions concrètes et applicables par les recruteurs, cette publicité a tout de même le mérite d’ouvrir la discussion. Car la problématique est réelle. Selon une étude du Bureau international du travail, seulement 11 % des employeurs appliquent un recrutement dont l’égalité de traitement est irréprochable. Pas de panique, le chemin est long mais loin d’être miné. Les Européens sont foncièrement contre toute forme d’inégalité et les Français sont même parmi les plus favorables au durcissement des sanctions à l’encontre de leurs auteurs d’après une étude de Harris interactive pour La Maison des potes. Pour l’instant, le gouvernement préfère simplement miser sur un discours humaniste, qui suscite la prise de conscience plus que l’action. Attendre les résultats de l’enquête terrain initiée par le ministère du Travail dans les grandes entreprises et la fonction publique aurait pu susciter plus d’impact dans la réalisation et la diffusion de la campagne. Une publicité qui reste contradictoire avec la dernière décision des prud’hommes de Paris : traiter un coiffeur de "pédé" n'est pas considéré comme une insulte homophobe. Plus loin que la discrimination à l’embauche, jusqu’où accepter la discrimination en général ?

 

V. L.