Un peu plus d’un an après son entrée en vigueur, le régime issu de la LME a évolué et il est désormais possible de dresser un premier bilan de la traformation radicale des critères d’autorisation. Cette traformation a bouleveé l’itruction des dossie de demandes aii que leur contenu.

Un peu plus d’un an après son entrée en vigueur, le régime issu de la LME a évolué et il est désormais possible de dresser un premier bilan de la transformation radicale des critères d’autorisation. Cette transformation a bouleversé l’instruction des dossiers de demandes ainsi que leur contenu. En outre, elle conduit à s’interroger sur l’évolution de la notion d’intérêt à agir des requérants.

La loi Royer visait à éviter le gaspillage des équipements commerciaux, en conséquence de quoi les critères d’autorisation étaient essentiellement économiques. La LME a modifié la philosophie de la législation, laquelle fonde désormais l’octroi des autorisations sur des critères d’aménagement du territoire et de développement durable.
 

Une instruction des demandes d’autorisation modifiée

La transformation des critères a modifié l’examen des demandes d’autorisation et la jurisprudence « Guimatho »(1) a été abandonnée. Les dossiers sont instruits et rapportés par les services chargés de l’urbanisme et de l’environnement(2). En outre, l’analyse des décisions de la CNAC permet d’apprécier concrètement les paramètres pris en compte lors de l’instruction des dossiers. Ceux-ci reflètent clairement les critères d’autorisation : la population de la zone de chalandise et son évolution, une desserte routière adaptée, les flux de circulation existants, les accès sécurisés, la desserte en transports en commun et leur fréquence, les caractéristiques de la zone d’implantation (zone urbaine, commerciale…), les mesures en matière de développement durable...
La desserte et les accès du projet ont ainsi une réelle importance, laquelle est justifiée : les commissions apprécient notamment l’effet sur les flux de transport, le modèle de fiche technique d’examen des projets traite du dimensionnement des voies d’accès clientèles et livraisons, des mesures de sécurisation de ces voies, de la nécessité de réaliser des travaux publics pour les accès. De même, doit être indiquée la desserte actuelle et future. La question de la desserte et des accès illustre le rapprochement entre droit de l’aménagement commercial et droit de l’urbanisme, conséquence de la transformation profonde des critères d’autorisation.

 

Un dossier de demande reflet des nouveaux critères

La demande d’autorisation a été précisée par arrêté du 21 août 2009(3). Le pétitionnaire doit notamment présenter les effets sur les flux de déplacement et fournir différentes études (accès, écosystèmes…). La démonstration de la compatibilité avec ces critères ne peut être purement formelle car elle conditionne la délivrance de l’autorisation et sa légalité en cas de contentieux. Ainsi, la CNAC(4) a refusé une autorisation aux motifs que le demandeur avait insuffisamment évalué l’impact sur la circulation et que les informations transmises ne lui permettaient pas de se prononcer sur les mesures prises en matière de consommations énergétiques, de nuisances et sur la qualité de l’insertion paysagère.

Malgré le relèvement des seuils, des informations relatives aux magasins de plus de 300 m² sont exigées, ce qui peut se justifier par l’existence des observatoires départementaux d’aménagement commercial qui doivent(5) établir un inventaire des équipements d’une surface égale ou supérieure à 300 m². En outre, l’indication de l’enseigne n’est plus une condition de recevabilité de la demande, laquelle comprend « la mention éventuelle de la ou des enseignes ». Toutefois, l’indication de l’enseigne pourrait s’imposer dans certains cas. D’une part, la délimitation de la zone de chalandise peut tenir compte « de la localisation des magasins exploités sous la même enseigne(6)» . Dans cette hypothèse, l’enseigne devrait donc être indiquée. D’autre part, « lorsqu’une nouvelle demande est présentée (…) à la suite (…) d’un changement d’enseigne, les renseignements fournis à l’appui de cette demande décrivent les modifications envisagées et leurs conséquences sur les éléments d’information contenus dans la demande initiale(7)» .
 

Une nouvelle appréciation de l’intérêt à agir du requérant ?

Avant la LME, un requérant devait justifier d’un intérêt commercial lésé. Etaient ainsi recevables les recours des concurrents mais pas ceux des voisins. Cette appréciation reste celle retenue par la CNAC. Ainsi, si lors de sa séance du 30 septembre 2008(8) la CNAC dénie l’intérêt à agir de requérants, ce n’est qu’au seul motif que le projet ne concurrence par leur activité. Toutefois, les nouveaux critères permettent d’envisager une évolution de la notion d’intérêt à agir. Il est permis de s’interroger sur un possible élargissement du champ des requérants en soutenant que la démonstration d’un intérêt commercial lésé n’est plus nécessaire. Ainsi, l’article L.752-17 dispose que le recours contre la décision de la CDAC peut être formé par «  toute personne ayant un intérêt à agir », sachant qu’il reconnaît déjà un tel intérêt à certaines personnes. Le texte laisse donc la porte ouverte à une interprétation extensive. Les nouveaux critères et le contenu de la demande vont également en ce sens. Les commissions statuent au vu des effets sur l’inscription harmonieuse dans le paysage ou sur les flux de déplacement. Or, la méconnaissance de ces critères fait davantage grief à un voisin que la violation de critères économiques. Une telle interprétation entraînerait une inflation du contentieux et des risques accrus pour les opérateurs. Il serait donc souhaitable de réserver la reconnaissance d’un intérêt à agir aux seuls concurrents.
Mais quand bien même seuls les concurrents seraient recevables, il pourrait être soutenu qu’un intérêt à agir exclusivement commercial ne serait pas suffisant, le requérant devant justifier d’un impact sur ses conditions d’exploitation résultant d’une violation des nouveaux critères. Ainsi, en matière de permis de construire, le Conseil d’État(9) estime « qu’en dehors du cas où les caractéristiques particulières de la construction envisagée sont de nature à affecter par elles-mêmes les conditions d’exploitation d’un établissement commercial, ce dernier ne justifie pas d’un intérêt à contester (…) un permis de construire délivré à une entreprise concurrente, même située à proximité ». Mais encore une fois, il appartient au Conseil d’État de se prononcer sur cette question.

 

1 CE, 27 mai 2002, n°229187.
2 R.752-16 c. com.
3 A.752-1 c. com.
4 12 nov. 2009, n°160T/173T/183T.
5 R.751-12 et -16 c. com.
6 R.752-8 c. com.
7 R.752-19 c. com.
8 Décision n°116T.
9 22 fév. 2002, Sté France Quick SA, n°216088.