Entretien avec Pierre Kosciusko-Morizet, p-dg et co-fondateur de PriceMinister.

Entretien avec Pierre Kosciusko-Morizet, p-dg et co-fondateur de PriceMinister.

Décideurs. Avec le rachat de Price-Minister par Rakuten, vous avez perdu en indépendance. Pourquoi avoir fait ce choix ?
Pierre Kosciusko-Morizet. Tout est une question d’opportunité. En 2008, nous souhaitions réaliser une IPO pour pouvoir lever plus d’argent afin de financer notre développement. Malheureusement, la crise économique a rendu difficile une telle opération. Par la suite, de nombreux groupes nous ont contactés en manifestant beaucoup d’intérêt. À ce moment-là, Rakuten est arrivé un peu par surprise. Leur proposition a retenu mon attention. Elle offrait une perspective de business très intéressante. Nous devenons l’équipe Europe de Rakuten mais nous gardons une certaine autonomie. De plus, au niveau de l’aspect financier, c’était un deal particulièrement intéressant pour les actionnaires. L’équipe dirigeante s’est engagée à rester durant encore cinq ans.

Décideurs. Quels ont été les objectifs fixés par Rakuten ?
P. K.-M. PriceMinister doit devenir le numéro un européen en cinq ans. Mais pour y arriver, Rakuten ne nous laisse pas seul. Il nous apportera les moyens financiers nécessaires. Le groupe Rakuten a réalisé un chiffre d’affaires de trois milliards de dollars en 2009. Nous sommes actuellement en train de réfléchir à des acquisitions en Allemagne et en Angleterre afin de renforcer notre position. De notre côté, nous apportons notre savoir-faire et notre expérience sur ce marché.
De plus, l’expertise du groupe japonais dans le BtoC va nous permettre de développer cette activité. Au Japon, leur principal métier est une place de marché BtoC, «?le shopping mall de Rakuten ». Aujourd’hui, 40?% du chiffre d’affaires de PriceMinister proviennent de vendeurs professionnels. Cela grossit très vite chez nous et ils vont nous aider à accélérer ce pôle business.


Décideurs. L’obligation de résultat semble omniprésente. Quelles sont vos exigences envers vos salariés à ce niveau ?
P. K.-M. Fortes. Mais cela n’a rien à voir avec l’arrivée de Rakuten. J’ai toujours eu un niveau d’exigence très poussé. Chez PriceMinister, les salariés sont autonomes et la hiérarchie est peu marquée. En revanche, il y a une obligation de résultat. Ce mode de fonctionnement est propre au secteur d’Internet. En effet, on peut facilement quantifier les résultats. Et ces derniers sont visibles rapidement.

Décideurs. Aujourd’hui, vos sources de financement sont la commission que vous touchez sur chaque vente et la publicité. Avec le développement du BtoC, êtes-vous tenté de mettre en place des abonnements en échange de services supplémentaires ?
P. K.-M. Pour le moment, non. À termes, oui. Mais il ne faut pas tomber dans la facilité et facturer tout et n’importe quoi. Les services supplémentaires que nous proposerons doivent apporter un plus à nos vendeurs. Nous sommes actuellement en train de réfléchir à ce qui pourrait intéresser les vendeurs en BtoC : plate-forme modulable, mise en avant de certains objets… De plus, il ne s’agira pas forcément d’abonnement. Cela pourrait être des achats à l’unité. Nos vendeurs doivent pourvoir rester libres s’ils le souhaitent.

Décideurs. Au niveau de votre organisation, l’arrivée de Rakuten va-t-elle changer beaucoup de choses ?
P. K.-M. Non, pas tant que ça. Malgré notre «?petite » taille, nous avions déjà une organisation très stricte axée autour des fonctions administratives et des activités. Ainsi, lorsque nous faisions une acquisition, les postes clés de la société rachetée n’étaient pas remis en cause par la fusion. Seules les fonctions administratives sont communes à toutes nos activités. Il y a un directeur général pour chaque filiale. Mon rôle est de vérifier le travail de chacun et de m’assurer de la cohérence de la stratégie de chaque entité.
Néanmoins, l’arrivée de Rakuten nous pousse à aller encore plus loin dans ce domaine. C’est une bonne chose. Plus une entreprise grossit, plus elle a besoin d’être structurée afin de ne pas perdre en efficacité. On peut profiter de leur expérience pour nous organiser au mieux.