Fondé en 2015, Welcome to the Jungle connaît une croissance exponentielle, en levant d’abord 2 millions d’euros en 2017, puis 7 millions en 2018 et 50 millions en janvier 2023. L’entreprise française compte actuellement plus de 300 collaborateurs et se distingue par son organisation innovante. La semaine de 4 jours payée 5 est actée depuis 2019. Jérémy Clédat, l’actuel CEO et cofondateur, explique ce choix et ses résultats.

Décideurs. Pourquoi avoir choisi le modèle de la semaine de 4 jours ?

 Jérémy Clédat. L’idée initiale de Welcome to the Jungle est de rendre le travail plus soutenable. Offrir la meilleure expérience candidat mais aussi en interne, travailler pour la satisfaction des collaborateurs. Nous savons bien que l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle représente un facteur d’engagement pour les collaborateurs. En 2018, nous avions de nombreuses discussions à ce sujet. Notre but : maintenir notre productivité et améliorer la QVT. Nous avons aiguillé notre réflexion vers le temps de travail. Différents dispositifs peuvent être choisis : les congés illimités, l’ultra-flexibilité des horaires. Nous avons opté pour la semaine de 4 jours qui nous a semblé la meilleure solution pour notre organisation. Tout le monde peut en bénéficier et cela nous permet d’être plus inclusifs, c’est un modèle très favorable pour les parents, les aidants, les personnes malades, etc. Il était important pour nous d’aller dans ce sens.

Quatre jours de travail dont certains télétravaillés. Comment maintenez-vous une culture d’entreprise ?

Une phase de test de six mois a été réalisée. Avec l’aide d’un cabinet de conseil, nous avons pu encadrer cette expérience. Par exemple, nous avons observé que l’amplitude horaire journalière restait la même qu’auparavant. Très vite, les collaborateurs ont été satisfaits de ce système. Concernant la culture d’entreprise, elle n’a pas été affectée. Avoir plus de temps pour soi offre le temps de réfléchir davantage au "pourquoi" nous travaillons, à la valeur de nos échanges. L’engagement n’en est que plus soutenu.

 Quels ont été les impacts sur la productivité ?

Le premier mois, l’activité a chuté de façon mathématique de moins 20%. Nous avions cinq mois pour résoudre ce problème. Il a donc fallu rationaliser nos efforts, revoir nos process et être plus explicites concernant nos enjeux. Les réunions ont été réduites d’un tiers. À l’issue des six mois, la productivité avait repris son rythme normal, nous pouvions pérenniser le système. Sur l'ensemble de nos recrutements depuis 2019, seuls quatre  avaient pour objectif de compenser la réduction du temps de travail.

"Sur l'ensemble de nos recrutements depuis 2019, seuls quatre avaient pour objectif de compenser la réduction du temps de travail"

 Quel conseil donneriez-vous à des entreprises qui souhaitent adopter ce modèle ?

Savoir précisément pourquoi vous voulez le faire. Bien sûr, cela a un impact direct et très efficace sur la rétention et l’attractivité des talents. Mais ce n’est pas une raison suffisante. Le changement à venir est important et pour bien le piloter, il faut être accompagné, se donner des indicateurs et les suivre de près. Si cela était à refaire chez Welcome to the Jungle, j’accompagnerais davantage les équipes. Comme pour le télétravail, il s’agit d’un changement structurel important. Les collaborateurs étant davantage responsabilisés, il incombe alors à l’entreprise de bien définir les objectifs et périmètres d’action de chacun. 

Vous venez de lever 50 millions d’euros et annoncez l’ouverture d’un bureau aux États-Unis.Quelle sera votre devise pour piloter cette croissance ? 

La croissance ne doit pas se faire au détriment de la qualité de l’expérience collaborateur. Le marché américain est le plus mature sur le sujet de la marque employeur. Le projet est excitant mais peut être redoutable si nous ne sommes pas prudents. Encore une fois, il ne faut pas perdre de vue son objectif initial, miser sur le long terme.

Propos recueillis par Elsa Guérin