Hachette Livre est le troisième groupe mondial d’édition et le premier en France. Avec environ 8 000 collaborateurs dans le monde, l’éditeur  a dépassé les 2,7 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2022 et vient d’être récompensé par la grand prix RH et environnement de l’ANDRH. Gaëtan Ruffault, DRH et directeur RSE groupe, explique la stratégie environnementale et les engagements du leader français de l’édition.

 

Décideurs. Votre objectif est de réduire de 30% vos émissions globales en carbone d’ici 2030. Quelle est votre feuille de route pour atteindre cet objectif ?

Hachette a été pionnier dans son secteur en matière d’environnement puisque dès 2009, nous avons calculé et publié notre bilan carbone en scope 3 pour nos activités en France. L’étiquetage carbone en quatrième de couverture de nos livres a également été instauré dès 2013.  Dorénavant, nous allons plus loin en modélisant et en nous engageant sur notre stratégie 30/30 : réduire de 30% nos émissions d’ici 2030 à l’échelle internationale. Différents leviers d’action ont été identifiés : réduire la surproduction et la surfabrication de livres en diminuant le nombre de tirages, s’appuyer sur nos datas  pour mieux réallouer nos stocks et diminuer les retours. D’autres axes sont cruciaux comme le fait de grouper davantage les livraisons pour réduire les émissions liées aux flux de transport, choisir des matériaux moins consommateurs de carbone dès la conception, ou bien encore travailler sur les émissions de nos bâtiments et de nos déplacements. Notre feuille de route s’inscrit sur le long terme et la trajectoire est cohérente avec l’Accord de Paris sur le climat.

Comment maintenir le cap de cet objectif avec la crise de l’énergie et du papier ?

Nous avons un objectif sur le long terme. Nous sommes déjà parvenus à réduire notre empreinte carbone de 20% sur les douze dernières années et nous atteindrons les 30 % supplémentaires d’ici 2030. Par ailleurs, la crise économique n’est pas toujours l’adversaire des intérêts écologiques. En effet, réduire l’empreinte carbone contribue souvent à diminuer le coût de la facture. Ainsi, RSE et maîtrise des coûts ne s’opposent pas nécessairement.

Vous avez développé des semaines d’éco-conception auprès de vos collaborateurs afin de les sensibiliser. Comment se déroulent-elles ?

Ces semaines ont pour objectif de mener notre politique RSE comme une véritable stratégie globale d’entreprise : les équipes échangent et expérimentent sur la façon de créer des produits éco-conçus et, par ailleurs des fiches éco-réflexes sont également rédigées afin de partager sur le long terme les bonnes pratiques. Ces initiatives ont pour vocation de sensibiliser l’ensemble des collaborateurs. Très prochainement, tous nos nouveaux arrivants seront également  formés aux enjeux environnementaux du secteur de l’édition. Nous sommes très fiers d’avoir été récompensés pour la « semaine de l’éco-conception » avec le prix de l’ANDRH car ce projet représente la complémentarité que nous souhaitons entre le développement des ressources humaines et les enjeux du climat.

Comment inscrivez-vous le livre numérique au sein de ces enjeux ?

Sensibiliser au green IT fait partie de notre stratégie et nous travaillons ainsi à réduire l’empreinte environnementale du livre numérique. Toutefois, ce dernier n’est pas moins émissif que le livre papier et, d’une manière générale, les consommateurs savent que la dématérialisation n’équivaut pas à un bilan carbone inférieur.  En réalité, le livre papier possède de réels atouts inégalables en termes d’éco-conception, de durabilité, de réemploi et de recyclage.

Vous possédez la double casquette DRH et directeur de la RSE. Comment conciliez-vous ces deux stratégies ?

Au cours de ma carrière chez Hachette, j’ai eu l’opportunité d’occuper des fonctions RH mais aussi des fonctions opérationnelles, ce qui m’a permis de bien connaître les rouages de la production éditoriale. Par ailleurs, l’engagement auprès de l’environnement m’a toujours animé. Allier les deux directions au sein d’un même poste représente pour le groupe un enjeu stratégique : au travers des ressources humaines faire porter le développement écologique. La RSE devient alors un réel projet d’entreprise. Les collaborateurs attendent d’être acteurs de la transition écologique alors qu’il faut les inviter à y prendre part.  Il s’agit également d’une promesse que nous faisons aux talents qui nous rejoignent de s’inscrire dans un projet qui porte leurs valeurs.  Allier les ressources humaines et la RSE représente un cercle vertueux.

Propos recueillis par Elsa Guérin