Promotion, télétravail, augmentation de salaire… Nombreux sont les points de négociation entre un employé et son supérieur. Auteur du livre #négo, Éric Blondeau, expert des stratégies décisionnelles, nous dévoile ses secrets pour négocier en entreprise.

Décideurs. En tant que professionnel de la négociation, quels conseils donneriez-vous à un salarié qui souhaite obtenir une augmentation de salaire ou une promotion ?

Éric Blondeau. Dans ce scénario, l’erreur numéro un est que le négociateur ne parle que de lui. Or tout réside dans la compréhension du fonctionnement de la personne en face. Il faut trouver le moyen de prouver que, si un employé demande une augmentation, c’est une bonne chose pour son patron, sans se concentrer sur sa propre problématique. Je l’explique dans mon livre avec cette phrase  : « Comment faire pour que l’autre accepte librement ma proposition en utilisant son mode de pensée ? » C’est là que réside la clé de la réussite d’une négociation. Chaque personnalité est différente mais la mécanique est la même. Dans ce cas de figure, l’employeur ne cédera à la demande du salarié que parce qu’il y verra un bénéfice futur pour lui.

 

La psychologie a-t-elle sa place lors d’une négociation ?

Lorsque nous avons compris que 100 % des décisions sont le fruit d’une projection mentale, la zone de négociation entre deux personnes se niche dans celle de l’autre. Pour cela, il convient d’essayer de comprendre comment son interlocuteur réfléchit. Les moyens d’y parvenir sont la perception, la connaissance, l’impact que les autres ont sur vous, vos émotions, vos croyances, vos talents et points forts, etc. Cette grille de lecture mentale permettra au salarié de mener l’employeur jusqu’à l’acceptation de sa promotion.

Négocouv

Comment bien préparer son discours ?

La préparation demande 80 % du temps lors d’une négociation. Il faut identifier les besoins des parties prenantes. Par exemple, l’employeur peut être lui-même l’employé d’actionnaires, donc il est important de prévoir l’impact d’un départ du salarié.

Existe-t-il une attitude à adopter ?

Si l’employé craint qu’on ne lui refuse une augmentation, il ne peut pas négocier. Le non est déjà acquis dans l’approche. Cependant, nous sommes responsables à 50 % de nos relations. Bien que ce salarié ait en tête les possibles raisons d’un refus, il doit trouver un axe qui ajoutera une information à la décision pour amener son patron à réfléchir aux conséquences d’un non. La posture est sereine, préparée et raisonnée. Si nous donnons à l’employeur la possibilité de nous rendre heureux, nous lui donnons également le pouvoir de nous rendre malheureux. L’employeur est libre de refuser, tout comme le salarié est libre de faire ses propres choix dans le cas où il n’obtiendrait pas ce qu’il souhaite. Il n’y a pas de bon moment pour négocier si ce n’est maintenant car, si nous attendons trop longtemps, nous accumulons de la frustration.

Y a-t-il des pièges à éviter ?

Tout ce qui est d’ordre à limiter l’employeur dans son libre arbitre est à proscrire. Cela entraîne une résistance. Toutes les questions où le trait est forcé sont à bannir, au risque que nous soyons traités comme un intrus sans obtenir de réponse. Par exemple, mieux vaut remplacer la formulation « est-ce que » par « qu’est-ce que » : qu’est-ce que je peux faire pour améliorer mes objectifs ? au lieu de est-ce qu’il y a quelque chose que je peux faire pour les améliorer ? La réponse ne sera pas la même, elle sera plus complète, vous obtiendrez votre réponse. Quel est le but de votre livre ? Développer l’art et la science du questionnement est ce que j’essaie d’introduire dans ce livre car on nous a appris à répondre aux questions mais jamais à les poser. Le livre pose ces questions qui viennent ouvrir l’esprit de l’autre en utilisant son propre mode de pensée, pour y trouver un intérêt commun à l’issue d’une négociation.

Propos recueillis par Marine Fleury

#Nego : qu'oseriez-vous négocier si vous n'aviez pas peur ? de Éric Blondeau, Plon, 20 euros.