Par J.-L. Ferrein, dirigeant du Groupe Ferrein, et C. Aranda, avocate associée chez Fromont Briens. Groupe Ferrein
Pour envisager l’évolution des enjeux sociaux dans l’entreprise, le concept de l’Intelligence Projective s’avère une clé de compréhension intéressante. Ce concept analyse la capacité des individus et des organisations à se créer du futur.


L’entreprise est traversée en permanence par l’avancée des connaissances scientifiques. Elle s’adapte au changement en créant en permanence des produits, des services, de nouveaux modes de production et de distribution. Le changement qui traverse l’entreprise est traditionnellement compris comme étant soit économique (changements d’actionnaires, réorganisations…) soit technologique (numérique…). Mais ce changement concerne aussi ce que l’on sait du fonctionnement de l’humain dans sa dimension individuelle et collective. Ces connaissances viennent impacter les systèmes organisés que sont les entreprises et éclairer les enjeux de droit social.

Une quête légitime de sens individuel et collectif
En matière de législation sociale c’est la notion de salarié «?sujet?» qui guide les négociations entre partenaires sociaux. Il s’agit de respecter le salarié dans son autonomie d’action et d’engagement au sein du collectif de l’entreprise. Les concepts de l’intelligence collective (moyens mis à la disposition de la communication : internet, mails, réunions…) et de l’intelligence collaborative (structuration des échanges) cherchent depuis plus de dix ans à évoluer pour intégrer une notion de «?sens?» à toutes ces actions qui se mettent en place au bénéfice de l’individu et du collectif auquel
il appartient.
Cette notion de sens, à la base de la motivation, pose la légitimité des attentes individuelles et collectives. Elle permet d’approcher les limites de ces attentes, les manquements individuels et ceux de l’organisation et, sur le fond, une éthique de fonctionnement. Longtemps laissée au «?bon sens?», porté - ou pas- par des managers «?humains?», cette éthique trouve des fondements dans les dernières avancées de la neurophysiologie et de la psychologie sociocognitive.

Neurophysiologie et psychologie sociocognitive
Que nous apprennent ces avancées ? La neurophysiologie et la psychologie nous apprennent que nous avons tous «?un cerveau projectif?» c’est-à-dire que biologiquement nous sommes sans cesse en train de construire des projets. Mais ces projets ont pour référentiel la vision singulière de chacun d’entre nous en fonction de son parcours de vie. Concrètement si nous confions la même tâche à dix personnes différentes elles auront dix motivations différentes pour bien effectuer leur travail… en fonction de leur histoire personnelle (je fais plaisir à mon manager, je suis intéressé par la matière, le résultat, je veux gagner plus…).
La neurophysiologie (Alain Berthoz) et la psychologie sociocognitive (Albert Bandura) nous apprennent que nous sommes tous «?agentifs?», c’est-à-dire que nous cherchons à être les acteurs de notre propre développement. Pour ce faire, nous sommes en particulier capable d’autorégulation et d’autoréflexion pour nous adapter au collectif à condition que nous en recevions des signaux utilisables (évaluations de fin d’année, récompenses, conventions collectives…). Il s’agit de revisiter en permanence sa propre vérité pour s’adapter, accepter, refuser, s’engager pour s’améliorer individuellement ou améliorer le fonctionnement
du collectif.

L’Intelligence Projective : un concept innovant
Le schéma suivant illustre de façon simplifiée ce va-et-vient constant qui permet la mise en place de l’Intelligence Projective. Elle concerne tant le salarié que le collectif qui l’accueille. Le droit social accompagne ce va-et-vient permanent pour éviter les dérives d’un individualisme forcené ou d’un collectif oppressant. Il n’y a pas de futur individuel sans futur collectif et il n’y a pas de futur collectif sans futur individuel.
Neurophysiologie et psychologie nous apprennent également que la motivation d’un individu est fondée sur l’émotion (Antonio Damasio) et que le collectif fonctionne quand cette émotion est partagée. Trouver le dénominateur émotionnel commun est le rôle de l’organisation et du leader : il s’agit de partager une émotion commune, quelles que soient les circonstances heureuses ou difficiles («?du sang, de la sueur et des larmes…?» -Winston Churchill).
Ce que nous appelons les risques psychosociaux trouve ici un éclairage : ils adviennent lorsque le réel devient trop difficile pour une personne en fonction de son histoire personnelle, ou lorsque le changement mis en place par l’entreprise est brutal et n’a pas sollicité la capacité agentive des salariés…
Dans son livre «?Albert Bandura, une psychologie pour le XXIe?siècle?» Philippe Carre, président d’Interface Recherche et directeur de publication de la revue Savoirs, appelle à la mise en place d’une «?agentivité sociétale?».
La psychologie s’est longtemps intéressée aux pathologies pour y découvrir ses fondamentaux ; elle s’intéresse désormais, avec la «?psychologie positive?», à l’amélioration des potentialités humaines (résilience, bien-être…). Face à cette évolution nous devons nous interroger sur la place du droit social. Quel droit social demain pour quel fonctionnement optimisé de l’Intelligence Projective individuelle et collective ?

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