Affable, les yeux rieurs, Benjamin Kantorowicz ne laisse pas indifférent. Dans une autre vie, il aurait été publicitaire. Dans celle-ci, il est un avocat qui manie l'art de la communication et la matière sociale. Il vient de lancer Bianca avec son épouse Laura Chicheportiche Kantorowicz, après huit ans chez Fromont Biens.

Rendez-vous pris dans un restaurant de l’ouest parisien. L’ambiance est feutrée, discrète. À peine arrivé, Benjamin Kantorowicz affiche un large sourire et évoque d’emblée "la joie que [sa] mère aura à lire son portrait". La conversation se tisse d’elle-même. L’ambiance est chaleureuse.

La culture avant tout

Avec un père artiste-peintre connaissant quelques succès importants et une mère psychanalyste, Benjamin Kantorowicz grandit dans un HLM du 18e arrondissement de Paris. Tout le destine, comme ses frères, à embrasser une carrière artistique. Toutefois, le jeune homme choisit très tôt d’évoluer dans un secteur stable et rémunérateur : « Mon père avait une certaine renommée internationale. Mais quand on est artiste, il existe une certaine instabilité et incertitude parfois difficiles à gérer. Il me fallait faire des études qui laisseraient de la place à l'univers créatif dans lequel j'ai grandi et qui m'a toujours habité tout en me permettant de limiter autant que possible ces difficultés. » Adolescent, il se rêve publicitaire. Ce qu’il aime ? Rendre un produit attractif, le storytelling et l’entrepreneuriat. Mais les écoles de commerce, trop coûteuses, lui ferment leurs portes et c'est un peu à contrecœur qu’il s’inscrit dans les années deux mille en faculté de droit à Assas.

Droit du travail

La matière juridique lui plaît sans pour autant qu’il adhère pleinement à l’idée de devenir avocat. Le charme n’opère qu’à la fin de sa licence avec le droit social, pour lequel il a un coup de cœur. "J'ai commencé à travailler très tôt. Le droit social faisait écho à mon quotidien, je m’intéressais déjà à la relation employeur/salarié." Il décide alors de poursuivre dans cette voie. Il obtient une thèse conventionnée. Son sujet ? Le portage salarial. "Il s’agissait d’une pratique illégale dont la popularité a forcé le droit à s’adapter à elle. Ce dispositif a rebattu les cartes du Code du travail et est parvenu à faire bouger les lignes." Il y consacre deux ouvrages en 2013 et en 2015 qu’il publie chez Lexis Nexis. C’est aussi pendant ces années d’études qu’il rencontre sur les bancs de la fac Laura Chicheportiche, qui deviendra sa femme.

"La qualité d’un service n’a pas de prix, j’ai compris cela très tôt même lorsque j’étais serveur"

Une fois sa thèse obtenue (avec mention), il décide de partir pour New York puis pour Londres. "Je ne parlais presque pas anglais, mais je souhaitais me familiariser avec le droit anglo-saxon. De nombreuses différences existent entre les deux systèmes juridiques, notamment une plus grande liberté concernant l’obtention de la preuve." En 2014, il revient en France chez Mayer Brown. Mais c'est avec Fromont Briens, prestigieux cabinet de droit social, qu'il signe son contrat de collaboration. "Leur renommée était impressionnante et, surtout, je savais que je pourrais y trouver une certaine latitude." Il y fait ses armes pendant plus de huit ans et y développe sa propre clientèle, principalement auprès d’acteurs dans le secteur de la tech.

Une idée qui ne le quitte pas

Il aurait pu devenir associé, mais voilà, ce qu’il aime avant tout c’est "le service client. Répondre à une demande de A à Z". Et de renchérir : "La qualité d’un service n’a pas de prix, j’ai compris cela très tôt même lorsque j’étais serveur. Cela m’anime encore en tant qu’avocat."  Alors, pour avoir les mains libres, Benjamin Kantorowicz saute le pas et crée sa propre boutique. Seul ? Non, avec sa femme Laura, à l’époque avocate chez Raphaël : "Depuis notre master 2, nous avons le même parcours. Nous avons soutenu notre thèse en même temps, étions ensemble à l’école d’avocat. Nous avions même effectué un entretien 'à deux' au stand Fromont Briens lors de la job fair de l’EFB avec Charlotte Bertrand ! Ce projet était en réalité une évidence, nous le souhaitions tous les deux." Bianca voit donc le jour en septembre 2021. Bernard, un organisme de formation au soutien de l’offre du cabinet, émerge dans la foulée. Au-delà de ce clin d’œil aux rongeurs de Walt Disney, il faut comprendre que le duo partage une ambition commune : celle de faire du droit du travail un levier de communication externe et interne pour n’importe quelle entreprise.

Les clients Benjamin Kantorowicz, provenant du milieu du Web3, du gaming et du secteur bancaire, le suivent. Le bouche-à-oreille fonctionne. Avec Bernard et Bianca, les deux avocats parviennent à concilier à merveille vie de famille et vie professionnelle. Avec deux fils et une fille qui vient tout juste de naître, l’équation était complexe.

Raccrocher la robe pour, un jour, exercer dans une agence publicitaire ? Peut-être, mais pas maintenant, assure Benjamin Kantorowicz alors que nous quittons le restaurant pour nous rendre dans ses locaux. Si la fierté de sa mère lui importe beaucoup, le regard de son père ne semble pas le quitter. Des peintures de l’artiste trônent dans son bureau, quand d’autres sont précieusement rangées dans un tiroir comme l’on garde ce qui nous est le plus cher à l’abri des regards indiscrets. On devine qu’un nouveau projet occupe déjà les pensées du jeune avocat. En effet, une galerie d’art ouvrira bientôt ses portes sur la rive gauche de la Seine… Une manière de cultiver son regard d’esthète et son goût pour l’entrepreneuriat.

Elsa Guérin