Le parti majoritaire a subi une cuisante défaite lors des élections municipales. Mais celle-ci n’est pas forcément un vote sanction contre la politique menée par le gouvernement.

"Ne nous cachons pas, c’est un échec." Au soir du second tour des élections municipales, les macronistes invités dans les médias ont évité la langue de bois et les euphémismes, tant la déception de leur camp était difficile à dissimuler. Et pour cause ! Dans les villes encore "prenables", LREM a fait chou blanc. Coté conseillers municipaux, l'objectif raisonné de 10 000 conseillers municipaux a-t-il été atteint ? C'est possible, mais les chiffres seront connus sous peu.

L’alliance LREM-LR montre ses limites

Lyon et Strasbourg étaient, dès le début des villes convoitées par la majorité. Hélas pour les stratèges marcheurs, dès le premier tour, les Verts sont arrivés en tête. Qu’à cela ne tienne, le parti a opté et tenté pour une alliance avec la droite. Dans le même temps, toujours dans une logique de rivalité face aux listes écologistes, les candidats LREM ont fusionné leurs listes avec la droite à Tours et à Bordeaux. Avec, à la clé, principalement des déconvenues. 

Quelles en sont les causes ? Les électeurs de droite, alors que LR durcit son discours globalement anti-Macron, ne semblent pas avoir pleinement suivi le mouvement localement. De leur coté, certains macronistes de gauche ont parfois préféré opter pour les listes vert-PS. Les limites du "en même temps" dans le jeu complexe des municipales.

Désillusions et consolations au Havre et à Pau.

Le parti majoritaire espérait un résultat favorable à Aix-en-Provence où les sondages donnaient la députée LREM Anne-Florence Petel au coude à coude avec la maire LR sortante Maryse Joissains-Masini. C’est finalement cette dernière qui l’emporte avec 45,53% soit plus de 12 points d’avance sur sa rivale. À Paris, Agnès Buzyn enregistre une triste contre-performance,  réunissant un plus fort pourcentage de voix au premier tour (17,26%) qu’au second (13,76%). Enfin, dans de nombreuses villes telles que Rennes ou Lille, les candidats de la majorité ont cette fois-ci été victime du "vote utile".

Le temps des enseignements

Quelle conclusion tirer de cette contre-performance ? Est-elle le signe d’un rejet de la politique menée par le Président et son gouvernement ? Ce n'est pas le cas, car LREM et Emmanuel Macron gardent un socle solide dans l’opinion. 

Les candidats n’ont pas bénéficié de l’effet "parti présidentiel" qui avait joué si fortement aux "législatives", et permis au président d’obtenir la majorité à l’Assemblée nationale. Désigner un maire, c'est élire un exécutif et une figure incarnée. La prime aux sortants a donc joué contre LREM, accentuée par le manque d’implantation locale du jeune parti présidentiel. Désormais, le socle local est posé, bien souvent dans un role d'opposition (constructive?). Au jeune mouvement de faire  fructifier cet actif acquis de haute lutte.

Ainsi est rappelé à tous que la conquête de mairies est un travail de longue haleine: il faut former ou rassembler des centaines et milliers de professionnels de la gestion de ville. Il a fallu plus de 30 ans au RN et aux écologistes pour obtenir leurs premières victoires. Comparativement, LREM avance bien plus vite qu'eux.  Mais cela n'induit pas que le mouvement ait trouvé une solution magique. Localement, il faut donner du temps au temps.

EELV et le RN ont mis des années à décrocher leurs premières mairies

Le parti a également été pénalisé par une stratégie mal expliquée sur des alliances tantôt avec à droite (66 cas), tantôt à gauche (33 cas), tantôt en cavalier seul. Surtout, plusieurs dissidences, comme à Paris, à Lyon ou Lille, ont coûté de possibles victoires. Avec des listes unies, les résultats auraient été probablement différents.

Merci aux poids lourds

Comme au premier tour, la majorité peut remercier ses poids lourds. Le 15 mars, Gérald Darmanin à Tourcoing, Franck Riester à Coulommiers et dans une certaine mesure Bruno Béchu à Angers ont permis à la majorité de garder la face. Le 28 juin au soir, seules deux bonnes nouvelles ont permis d’éclairer une soirée de dépit. François Bayrou, confortablement reconduit à Pau avec 56,91% des suffrages face au candidat de gauche Jérôme Marbot. Et surtout Édouard Philippe qui s’impose au Havre avec 58,8 des voix. De quoi lui permettre de peser davantage dans la majorité, a fortiori si Emmanuel Macron prolonge son bail à Matignon.