La métropole alsacienne fait partie des grandes villes susceptibles de tomber dans l’escarcelle de LREM. Mais le combat s’annonce rude pour son candidat Alain Fontanel, confronté à une liste EELV dynamique et à un « PS canal historique » qui peut jouer les faiseurs de roi.

Décideurs. À Strasbourg, la campagne municipale se joue en grande partie sur l’écologie. Dans les sondages, vous êtes au coude à coude avec la candidate EELV Jeanne Barseghian. Que dire aux électeurs qui hésitent entre les deux listes ?

Alain Fontanel : Tout simplement que l’écologie doit être pragmatique, ancrée dans le quotidien, sans pour autant être punitive et idéologique. Il s’agit d’une question vitale mais qui n’est pas la propriété d’un seul parti. Ma liste comporte plusieurs personnalités actives dans l’écologie réelle. Je pense notamment à la numéro deux Laetitia Hornecker, maraîchère à la Robertsau, ou encore à Martin Guillaume, paysagiste et président de l’association l’Arrosoir qui figure en quatrième position.

Le programme que je porte propose de mettre en œuvre des mesures de bon sens en faveur de l’environnement. Je préconise de développer l’agriculture de proximité, le 100% bio dans les cantines scolaires. Il s’oriente également vers une ville moins dense, qui ralentit le rythme des constructions qui a été très rapide ces dernières années. Ce ne semble pas être le cas des autres projets…

Ne craignez-vous pas que cela porte atteinte au dynamisme de la ville et augmente le prix de l’immobilier ?

Non, je ne le pense pas. La ville compte déjà 10 000 logements vides. La municipalité peut tout à fait faire baisser ce nombre en se portant garant ou en incitant, par le dialogue, les propriétaires à louer leur bien. La priorité est également d’améliorer la qualité des logements existants, notamment en mettant l’accent sur la rénovation.

S’ajoute également la question d’Airbnb qui est en pleine croissance à Strasbourg…

Effectivement, 4 000 logements strasbourgeois sont référencés sur la plateforme. La plupart aux abords de la cathédrale ou dans le quartier de la Krutenau. Bien souvent, il s’agit de petites surfaces, ce sont donc les étudiants qui pâtissent de la situation. Je propose de renforcer les contrôles pour interdire aux propriétaires de louer plusieurs biens sur la plateforme. Encadrer les nuitées permettra également de classer en meublés touristiques les logements habités loués plus de 120 jours par an. Cela devrait inciter les propriétaires à ne pas tout miser sur Airbnb. S’il est illusoire de vouloir interdire ce type de locations, il est nécessaire de les règlementer.

Comment définir la sociologie de Strasbourg ?

C’est une ville qui a une dimension frontalière, européenne et profondément centriste. Cela explique en grande partie les bons scores de La République en marche lors de la présidentielle de 2017, des législatives et des dernières élections européennes. En mélangeant des profils issus du centre-droit, d’autres du centre gauche et la moitié de personnes issues de la société civile, ma liste incarne parfaitement la sociologie de la ville.

D’après l’Insee, Strasbourg est une ville qui se rajeunit, qui se féminise mais aussi qui s’appauvrit. Richesse et pauvreté coexistent sur un même territoire et les inégalités sont fortes, comme dans toutes les métropoles françaises. J’espère les réduire si je deviens maire.

Quel regard portez-vous sur le bilan de Roland Ries ?

Sous ses deux mandats, la ville s’est profondément transformée et modernisée. Elle est désormais une métropole qui rayonne au-delà de l’Alsace. De nombreux travaux ont amélioré l’esthétique de la ville mais aussi la qualité de vie. Je pense par exemple à l’extension des lignes de tramway, notamment vers Kehl en Allemagne, à la rénovation de la manufacture des tabacs. La politique culturelle de la ville est dynamisée. C’est un bilan positif que j’assume totalement (le maire sortant Roland Ries, issu du PS, soutient la candidature d’Alain Fontanel malgré la présence d’une liste socialiste menée par Catherine Trautmann).

En revanche, nous n’avons peut-être pas suffisamment pris en compte l’impact de la pollution et du réchauffement climatique sur l’urbanisme. Pour changer cela, mon projet pour Strasbourg comporte plusieurs propositions concrètes : garantie d’un îlot de nature à moins de 300 mètres de chaque habitation, lancement d’un grand plan de végétalisation des rues et des places, des toitures et des façades, grand plan « canopée » pour climatiser naturellement la ville…

Propos recueillis par Lucas Jakubowicz