Décideurs. Que proposez-vous pour assurer une certaine flexibilité aux employeurs tout en maintenant la sécurité nécessaire aux employés ?
Michel Sapin. La réponse, c’est la sécurisation de l’emploi. La loi est en cours de discussion au Parlement. Vous dites « flexibilité », moi je dis « sécurisation de l’emploi ». « Flexibilité », pour le salarié, renvoie souvent à quelque chose de subi. Le modèle que nous avons choisi n’est pas celui-là, il est celui de l’adaptation négociée. J’y tiens beaucoup : donner de la souplesse aux entreprises et leur permettre de s’adapter à la conjoncture économique, non pas en précarisant davantage l’emploi mais, au contraire, en augmentant les droits des salariés ! Voilà la différence, voilà le « nouveau modèle français », ainsi que le définit le Premier ministre. Je crois que les salariés sont prêts à des efforts pour sauver leur emploi. Ils sont même les premiers défenseurs de leur entreprise, mais à une seule condition : qu’ils aient voix au chapitre.
Demain, certains entreront dans les conseils d’administration des grandes entreprises, ils seront par ailleurs davantage associés à l’anticipation de l’activité et des compétences et ils seront dotés de nouveaux pouvoirs de négocier. C’est cela la sécurisation de l’emploi : pouvoir trouver des accords, et le faire dans le respect des droits de chacun, avec des garanties. Ainsi, un accord de maintien de l’emploi ne sera possible que si la difficulté économique de l’entreprise est avérée. Il nécessitera l’accord des organisations représentant 50 % salariés, de sorte que les directions d’entreprises devront faire ce qu’il faut pour convaincre. Les plus bas salaires seront épargnés et les dirigeants et actionnaires devront faire aussi des efforts. C’est la condition pour apporter souplesse et sécurité et, surtout, pour fonder des compromis positifs qui permettent d’avancer.