La représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des institutions représentatives du personnel s’inscrit dans une volonté du législateur de permettre une juste représentation de la diversité de l’entreprise.

Après avoir procédé par voie de recommandation en posant le principe, mais sans prévoir de sanction, selon lequel   les organisations syndicales devaient examiner, lors de l’élaboration du protocole d’accord préélectoral, les voies et moyens permettant d’atteindre une représentation équilibrée des femmes et des hommes sur les listes de candidatures, le législateur a posé une obligation effective de parvenir à une représentation équilibrée dans les institutions représentatives du personnel de l’entreprise en imposant pour chaque collège électoral, une représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein de chaque collège électoral.

Ainsi, l’article L2314-30 du code du travail dispose :

« Pour chaque collège électoral, les listes mentionnées à l'article L. 2314-29 qui comportent plusieurs candidats sont composées d'un nombre de femmes et d'hommes correspondant à la part de femmes et d'hommes inscrits sur la liste électorale. Les listes sont composées alternativement d'un candidat de chaque sexe jusqu'à épuisement des candidats d'un des sexes. »

Ces dispositions s’appliquent tant aux listes des candidats titulaires qu’aux candidats suppléants.

Mais outre cette obligation, il résulte de l’article L2314-32 du Code du travail que la sanction du non-respect de ces dispositions est l’annulation de l’élection d'un nombre d'élus du sexe surreprésenté ou, en cas de non-respect de l’alternance, du ou des élus dont le positionnement sur la liste de candidats ne respecte pas cette obligation.

Face à ce risque, il convient dès lors de rappeler, notamment aux organisations syndicales, l’importance de respecter ces dispositions mais également les modalités à mettre en œuvre pour aboutir à une représentation équilibrée des femmes et des hommes.

Ainsi, la représentation équilibrée des femmes et des hommes s’apprécie au niveau de chaque collège électoral et pour ce faire il est indispensable que l’employeur informe les organisations syndicales de la part de femmes et d’hommes inscrits au sein de ceux-ci.

Pour ce faire, l’article L2314-13 du Code du Travail prévoit que le protocole préélectoral  mentionne la proportion de femmes et d'hommes composant chaque collège électoral.

En second lieu, la composition des listes électorales pour respecter la représentation équilibrée des femmes et des hommes procède d’ un calcul tel que défini à l’article L2314-30 qui dispose :

« Lorsque l'application du premier alinéa n'aboutit pas à un nombre entier de candidats à désigner pour chacun des deux sexes, il est procédé à l'arrondi arithmétique suivant :

1° Arrondi à l'entier supérieur en cas de décimale supérieure ou égale à 5 ;

2° Arrondi à l'entier inférieur en cas de décimale strictement inférieure à 5.

En cas de nombre impair de sièges à pourvoir et de stricte égalité entre les femmes et les hommes inscrits sur les listes électorales, la liste comprend indifféremment un homme ou une femme supplémentaire. »

Ainsi, si un collège électoral est composé à 60% de femmes et à 40% d’hommes et doit élire 10 titulaires et 10 suppléants, la liste devra présenter 6 candidates de sexe féminin et 4 candidats de sexe masculin.

Si ce premier calcul est aisé, il peut apparaitre des difficultés en cas d’absence de détermination d’un nombre entier de candidat. Ainsi, et par exemple, si un collège électoral est composé à 60% de femmes et à 40% d’hommes et doit élire 6 titulaires et 6 suppléants, la répartition de la liste aboutira à 3,6 femmes et 2,4 hommes. En application, des dispositions ci-dessus, la liste devra être composée 4 candidates de sexe féminin et 2 candidats de sexe masculin.

De même, l’article L2314-30 dans sa rédaction issue des ordonnances du 22 septembre 2017, montre  une volonté réitérée de permettre une véritable mixité en ajoutant une règle consistant à assurer une représentation des deux sexes lorsque l’application du calcul ci-dessus viendrait à entrainer l’absence de représentation d’un sexe. En effet, il était possible qu’un sexe surreprésenté au sein d’un collège puisse aboutir à la non représentation de l’autre sexe. Ainsi, un collège composé à 90% d’hommes pour deux sièges à pourvoir entrainait la non représentation des femmes. Pour lutter contre cette situation, l’article L2314-30 prévoit que lorsque l'application des règles de calcul de répartition conduit à exclure totalement la représentation de l'un ou l'autre sexe, les listes de candidats pourront comporter un candidat du sexe qui, à défaut ne serait pas représenté. La seule limite étant que ce candidat issu du sexe non représenté ne peut être en première position sur la liste.

Si l’usage du verbe « pouvoir » semble évoquer une simple possibilité et non une obligation, il convient de considérer cela comme une imprécision de rédaction dès lors que le Conseil Constitutionnel a jugé que les règles de calcul de l’article L2314-30 dans sa rédaction antérieure aux ordonnances étaient conformes sous réserve qu’elle ne fasse pas obstacle à ce que les listes de candidats puissent comporter un candidat du sexe sous représenté ( Cons Constit 19/01/20148 n°2017686).

Allant plus loin, la Cour de Cassation a confirmé l’obligation d’assurer une mixité des listes de candidats en jugeant que lorsqu’au moins deux sièges sont à pourvoir, chaque liste doit impérativement présenter au moins un homme et une femme et ce quelle que soit la proportion d’hommes et de femmes dans ce collège ( Cass.Soc 9 mai 2018 n°17-14.088).

De plus pour assurer l’effectivité de cette mixité, la Cour de Cassation dans ce même arrêt, interdit  aux organisations syndicales de présenter des listes  composé d’un seul candidat dès lors qu’au moins deux sièges sont à pourvoir. Si cela ne semble pas interdire totalement la présentation de listes incomplètes par les organisations syndicales, cela prohibe cependant les listes de candidat unique.

Enfin, outre le respect de la proportion de femmes et d’hommes au sein des listes, il convient également de veiller au respect de l’alternance au sein de la composition de celles-ci, faute de quoi, l’élection du ou des élus dont le positionnement sur la liste de candidats ne respecte pas cette obligation pourra être annulée.

Cependant, cette obligation semble être de seconde importance pour la Cour de Cassation qui a jugé que la violation de la règle d'alternance, dès lors qu'elle n'a pas eu pour effet pratique d'affecter la mixité au sein de la représentation du personnel, ne justifie pas d'annuler de mandat (Cass. soc., 9 mai 2018, n° 17-60.133).

C’est par conséquent à l’aune des résultats de l’élection que s’appréciera la gravité de la violation de la règle de l’alternance et ce n’est que si le non-respect de celle-ci venait à entrainer un déséquilibre dans la représentation des sexes qu’une annulation sera encourue.

C’est pourquoi, il ne peut qu’être conseillé à l’employeur, dans le cadre de l’organisation des élections d’appeler les syndicats à la plus grande vigilance dans la composition des listes de candidats. En effet, si l’employeur ne peut se faire juge de la validité des listes de candidats avant l’élection, il aura l’obligation de procéder à de nouvelles élections partielles  lorsque l'absence de représentation d'un collège électoral ou la vacance d'au moins la moitié des sièges au sein du comité social et économique sont la conséquence de  l'annulation de l'élection de membres de ce comité prononcée par le juge en cas de méconnaissance des règles tendant à une représentation équilibrée des femmes et des hommes, la dispense prévue en ce sens par les ordonnances MACRON ayant été annulée par le Conseil Constitutionnel (Conseil Constitutionnel, Décision n°2918-761 DC du 21 mars 2018).

La juste représentation des femmes et des hommes au sein des institutions représentatives du personnel apparait dès lors comme un thème particulièrement important pour le législateur et le juge, et les entreprises doivent donc rappeler les organisations syndicales à leurs obligations bien que l’on puisse imaginer parfois les difficultés pour ces derniers d’arriver établir des listes de candidats équilibrées faute d’implication syndicales des salariés.

 

Maxime de Margeri, Capstan Avocats