Le secteur sanitaire et médico-social a toujours été un secteur à fortes contractions et dépendant de nombreuses réglementations. Le pilotage institutionnel et réglementaire, l’actualité de ces secteurs et la forte pression de la financiarisation, qui s’y est invitée, imposent à chaque opérateur de spécifier sa stratégie et son fonctionnement courant. Dès lors comment se démarquer ? Comment s’imposer dans l’offre de soins ? Comment maintenir son positionnement ?

Plusieurs leviers sont à disposition de l’opérateur, tant en interne qu’en externe pour déterminer son positionnement dans l’offre de soins (territoriale ou à plus large échelle). Bien sûr, sa nature même et sa forme juridique vont influer sur les éléments à mobiliser ou à créer pour affirmer sa position comme offreur de soins et par la suite, la faire reconnaître ou la maintenir.

Évaluer ses besoins et ressources en tenant compte de sa nature

En tout premier lieu, l’opérateur qu’il soit établissement de santé, médecins, structure de coopération ou de partage d’équipements ou d’activités, doit en fonction de sa nature et de son objet juridique même, analyser ses besoins et définir son projet médical et médico-économique.

Le projet médical est à calibrer principalement autour des ressources humaines, professionnelles, qualifiées ou de support, des ressources immobilières (sites, implantations, géographie de l’accès aux soins), des besoins du ou des territoires santé ou filières de soins couverts, et des relations avec les autres opérateurs. De cette définition, découlera l’édification du projet médico-économique.

Cela déterminera les ressources financières affectables ou affectées à sa contribution à l’offre de soins et à la participation à divers projets : coopération, mutualisation des moyens techniques, maison de santé, prise en charge de soins non programmés, communauté professionnelle de territoire, etc.

"L’opérateur fait face à diverses pressions sur son activité"

L’opérateur n’aura ni n’affichera les mêmes attentes et objectifs selon qu’il est lui-même un établissement de santé, privé ou public, un groupe de médecins libéraux ou une structure de partage de moyens, etc.

Déterminer les enjeux juridiques, techniques et économiques.

Analyser son environnement structurel, économique comme réglementaire est également nécessaire. D’autant qu’actuellement, les projets régionaux de santé sont en cours de révision ; leurs définitions préciseront pour des territoires identifiés les principales orientations retenues par les Agences régionales de santé en matière d’offre de soins et de satisfactions des besoins des patients.

Influer sur son environnement

Les opérateurs devront donc adapter leurs pratiques et organisations à ces objectifs et attentes pour se faire identifier comme opérateur efficient et se démarquer ensuite des autres opérateurs, concurrents ou non. L’opérateur devra donc se positionner parmi et au sein des actions des opérateurs de même nature que la sienne ; il devra également identifier les enjeux qui vont s’offrir à ses activités ainsi que ses partenaires ou concurrents potentiels.

S’inviter et influer sur les révisions réglementaires en cours seront nécessaires, comme en suivre l’application et susciter leurs évolutions. Ces temps d’intervention, souvent négligés, sont pourtant fondamentaux. C’est de ces réseaux que naîtront les organisations amendées ou futures ainsi que les coopérations éventuelles.

Être force de proposition et moteur dans la concertation

Il peut être préférable d’être à la proposition d’un projet innovant ou d’une prise en charge complémentaire d’une offre de soins plutôt que celle-ci soit imposée à l’opérateur à l’occasion d’un autre de ses projets ou d’une mise en oeuvre ou d’un suivi d’une ou plusieurs autorisations administratives.

L’organisation économique comme fonctionnelle peut être dictée par des facteurs externes et imposée, par exemple, en conditionnant certaines autorisations ou subventions à des coopérations ou contractualisations. Selon que l’organisation et les actions seront anticipées, négociées, imposées ou subies, l’efficience en sera différente et la capacité de l’opérateur à s’adapter également.

"S’afficher comme promoteur peut contribuer à spécifier le positionnement dans son axe moteur et disruptif dans les organisations déjà en place"

S’afficher comme promoteur peut contribuer à spécifier le positionnement dans son axe moteur et disruptif dans les organisations déjà en place. Faire avec les contraintes existantes peut aussi, parfois, se révéler une stratégie d’attente, dans l’objectif de préserver ses ressources en vue d’un meilleur positionnement à terme.

S’accommoder et/ou assimiler

Accommodation ou assimilation sont deux techniques différentes, qui peuvent servir le même but – se positionner – mais nécessiteront un déploiement différent de moyens, eux-mêmes différents.

En outre, s’afficher comme promoteur peut contribuer à spécifier le positionnement dans son axe moteur et disruptif dans les organisations déjà en place. Cela nécessitera, outre les temps de préparation et de relationnel évoqués, de mobiliser des compétences et structurations sur divers items : économiques, investissements, ressources humaines, conventions, obligations, etc. ; une programmation sera nécessaire, les chantiers n’avançant pas tous sur les mêmes rythmes.

Savoir programmer et (ré)agir

Une fois les objectifs fixés et les moyens déterminés, il faut par ailleurs tenir le cap ; une évaluation régulière des objectifs et moyens demeure nécessaire. De même, maintenir la concertation entre les intervenants est impératif. S’assurer de l’information donnée en interne aux associés comme aux personnels permet de mieux maîtriser les communications faites ou à faire. Les temps institutionnels de validation sont à programmer également (assemblée, conseil d’administration, de direction, etc.), avec leurs aspects formels légaux.

Le parcours peut être émaillé de nombreuses difficultés : changements de réglementation, modification des gouvernances, conditionnalité, tensions dans les recrutements, retards de chantiers… Les impacts de ces événements doivent être mesurés mais peuvent aussi être retournés au support de l’objectif visé. L’agilité est une des aptitudes nécessaires pour acquérir comme conforter sa position dans l’offre de soins.

Une maîtrise des atouts et enjeux, pour une action calibrée, sans dispersion

Rien n’est figé : ni acquis ni inné. À chaque opérateur, en fonction de sa nature et de son cycle propre, de déterminer ses attentes et objectifs et la programmation des moyens et projets pour arriver à ses fins. Toutefois, pour cela, il lui sera nécessaire de bien se maîtriser et de déterminer les options les plus efficientes en fonction des contraintes et enjeux tant internes à son organisation qu’externes. La réactivité face à tout changement, contrainte ou opportunité, se révélera également un facteur clé pour asseoir son positionnement ou le faire évoluer, sans pour autant se disperser ou se tromper d’objectif. L’histoire appartient peut-être à ceux qui l’écrivent.

SUR L’AUTEUR. Maître Alix Domas-Descos intervient en droit de la santé et des sociétés, plus particulièrement au support de la structuration des opérateurs de santé (médecins, établissements, sociétés et groupements de moyens d’exploitation ou d’exercice) leur regroupement et leur coopération.