Alors que le digital ne cesse de s’ancrer dans les usages, les démarches en matière de sobriété numérique connaissent un essor sans précédent. Comment se caractérisent-elles ? Focus sur quatre points-clés de leurs enjeux.

La production, majeure partie de la pollution 

Au cœur de la crise énergétique, éteindre ou débrancher ses appareils connectés constituent des petits gestes du quotidien en hausse. Pourtant, la majeure partie de la pollution produite par nos ordinateurs, télévisions et smartphones est émise lors de leur fabrication. Loin du monde occidental, l’amalgamation, le traitement et le raffinage de l’aluminium, l’argent ou le cobalt, sans parler de l’extraction, s’effectuent en Chine, au Congo, en Guinée vers l’empire du Milieu mais également au Chili. Autant de métaux qui servent notamment à la production des composants microélectroniques. Outre une consommation astronomique d’eau, le recours aux énergies fossiles pour alimenter les machines finit d’alourdir les comptes. À ce titre, le marché des produits électroniques reconditionnés est sur la bonne voie. En plus de miser sur des produits moins connectés, il est donc essentiel d’augmenter la durée de vie de nos appareils. 

Le stockage énergivore des données  

Services de cloud, objets connectés et comptes numériques s’ajoutent à la liste des éléments polluants. Si Internet semble immatériel, les hébergeurs qui stockent nos informations se servent de data centers physiques. En état de marche 24/24h et 7/7j, ils s’alimentent pour la plupart en énergies fossiles. En parallèle, la surchauffe qui en découle nécessite leur réfrigération. Pour y remédier, le spécialiste du e-commerce chinois Alibaba utilise une méthode d’immersion des serveurs dans des bains d’huile. Ce procédé tire ainsi profit du caractère conducteur de la chaleur de l’huile pour un meilleur refroidissement que les méthodes dominantes telles que le "free cooling".

Les plateformes de streaming gagnent du terrain 

Déjà, lors du premier confinement lié à la crise du Covid-19, Netflix s’était vu contraint de réduire la résolution de ses vidéos afin de libérer de la bande passante. Sur l’ensemble du trafic de données en ligne, les flux vidéo en représenteraient 60%, soit 300 millions de tonnes de CO2 par an. Films et séries à la demande (31 %), contenus pornographiques (27 %), vidéos en ligne telles que Youtube (21 %) ou, encore, celles disponibles sur les réseaux sociaux (18 %) composent le palmarès de cette pollution. Depuis quelques années, de nombreux acteurs diffusent leurs bonnes pratiques pour en contrer les effets. Parmi les plus populaires, réduire la résolution de vos vidéos et désactiver la lecture automatique figurent en tête. 

Le législateur à l’action 

Promulguée le 15 novembre 2021, la loi REEN (Réduction de l’empreinte environnementale du numérique) s'annonce inédite. Si l’État ne freine pas son grand plan de dématérialisation, il se fixe pour objectif d’accélérer les actions en matière de sobriété. En premier lieu, celle d’éveiller les consciences sur l’impact environnemental du numérique devrait contribuer notamment à limiter le renouvellement des appareils électroniques et inciter les utilisations numériques respectueuses de l’écologie. Enfin, le gouvernement entend promouvoir les réseaux et data centers moins énergivores ainsi qu’une stratégie numérique responsable sur tout le territoire français. De grandes ambitions pour un chantier colossal. 

Léa Pierre-Joseph