Que la situation économique se dégrade ou qu’une entreprise sous-performe pour des raisons qui lui sont propres, l’affacturage reste la ligne de crédit la moins chère et la plus stable: un financement qui doit retenir l’attention des directions financières et des acteurs du restructuring, particulièrement en 2023. Entretien avec Gaëtan du Halgouët, fondateur de Fibus (ex-Chateaudun Crédit) et Romain Chaufour, directeur affacturage.

DÉCIDEURS. Pouvez-vous nous rappeler ce qui rend l’affacturage spécifique ?

Romain Chaufour. L’affacturage permet de transformer une grande partie du poste clients en liquidités. Cet outil de financement est parfois mal connu des décideurs financiers. Pourtant, il est particulièrement intéressant pour les entreprises BtoB, payées en moyenne à 60 jours. Pour ces sociétés, l’affacturage est la plus grande ligne de crédit à court terme possible, c’est un levier de trésorerie très puissant.

Gaëtan du Halgouët. Autre avantage de l’affacturage: il est déconsolidant et n’apparaît donc pas sur les bilans. Quelle que soit la santé financière de l’entreprise, il doit retenir l’attention des fonds d’investissement comme des DAF. Contrairement à une idée reçue, les contextes de restructuring n’empêchent pas la mise en place ou la renégociation de contrats d’affacturage.

Justement, quels sont les avantages de l’affacturage dans les dossiers de restructuring ?

R. C. Ils sont nombreux ! Le premier atout de l’affacturage est la rapidité de sa mise en place. Quand l’entreprise tangue, il faut trouver des solutions efficaces tout de suite, car les enjeux sont vitaux. Nous sommes capables de mettre en place un programme d’affacturage en quelques jours, et le financement des factures est effectué dans les 48 heures qui suivent: c’est un avantage considérable par rapport à d’autres financements.

G. H. Après l’urgence, l’autre point crucial est la taille du financement obtenu: avec l’affacturage, on peut encore obtenir un financement important, même dans une situation de sous-performance. L’affacturage va compléter ou même remplacer les financements bancaires comme le RCF, le découvert ou la Dailly. Quand une entreprise ne peut plus rembourser ses dettes, ses banques perdent confiance et souhaitent diminuer ou supprimer leurs concours bancaires, fragilisant plus encore l’entreprise. L’affacturage donne une alternative à l’entreprise et offre une pérennité de financement.

R. C. Dernier atout en cas de restructuring : l’affacturage n’est pas incompatible avec les procédures amiables et collectives. Les factors restent ouverts à la discussion et n’hésitent pas à accompagner l’entreprise en difficulté. Dans ces cas-là, notre rôle est de négocier avec le factor déjà présent, si c’est le cas, et en parallèle de trouver un nouveau partenaire. Nous connaissons bien les attentes de chaque factor.

"L’entreprise ne se laisse plus dicter sa stratégie par son environnement, et transfert la pression vers un tiers sur lequel les banques ont moins de prise"

G. H. Plus largement, notre rôle est de faire redescendre la pression mise sur les directions financières par les banques. Il n’est pas rare de voir les banques pousser leurs propres filiales de factoring. Or ce n’est pas toujours la solution la plus pertinente pour l’entreprise. En permettant à la direction financière de faire un choix libre et éclairé, nous lui rendons de la marge de manoeuvre. L’entreprise ne se laisse plus dicter sa stratégie par son environnement, et transfert la pression vers un tiers sur lequel les banques ont moins de prise. Grâce à l’affacturage, l’entreprise retrouve un levier de négociation avec ses créanciers.

Avez-vous des projections à partager à nos lecteurs pour 2023 ?

G. H. Lors de la mise en place du PGE, les entreprises pouvaient tout à coup emprunter jusqu’à 25% de leur chiffre d’affaires annuel, sans conditions ou presque. Aujourd’hui, ces prêts doivent être remboursés avec des échéances très importantes qui vont consommer une grosse partie des cash-flows. Mettre en place un programme d’affacturage va permettre d’aider à rembourser tout ou partie de ces prêts. Le poste clients d’une entreprise représente entre 15 et 20 % de son chiffre d’affaires annuel.

R. C. En 2023, on va cumuler ralentissement de la croissance, inflation sur les prix des matières premières et de l’énergie, et hausse des taux : ces risques accrus vont engendrer une baisse d’appétit des banques, notamment en termes de financement. Elles vont devoir resserrer leurs critères d’octroi de crédit auprès des entreprises, critères auxquels échappe l’affacturage. En effet, il se calcule sur le poste clients de l’entreprise, et non sur ses fonds propres et sa rentabilité.

G. H. L’affacturage sera d’autant plus attractif qu’il permet d’éviter de multiplier le nombre de ses partenaires bancaires. Prenons le cas d’une ETI à la recherche d’une ligne de 10 millions d’euros : si son poste clients est au moins équivalent, elle va trouver ce financement très rapidement et auprès d’un seul factor. Si elle se tourne vers un crédit bancaire classique (RCF, découvert, Dailly), elle sera contrainte de négocier avec plusieurs banques. De plus, sa solvabilité financière déterminera les montants accordés. L’affacturage ne représente qu’une seule ligne à mettre en place. Le délai d’obtention sera beaucoup plus court et le montant de la ligne sera stable dans la durée.

 

LES POINTS CLÉS

  • En 2022, Fibus (ex-Chateaudun Crédit) refonde son identité et valorise la complémentarité de ses trois domaines d’expertise : les marques Fibus Factoring, Fibus Trade et Fibus Digital voient le jour ;
  • Fibus affiche une croissance de 30 % sur son dernier exercice ; 48 % de son chiffre d’affaires est réalisé à l’international ;
  • Les équipes Fibus ont traité plus de 50 dossiers ETI et grands comptes et 100 dossiers TPE/PME en 2022 ;
  • Fibus compte 42 collaborateurs répartis entre Paris, Poitiers, Lyon et Londres ; un bureau sera ouvert à Francfort en 2023 ;
  • En 2023, Fibus lancera ARI, une solution digitale pour optimiser les programmes d’affacturage et d’assurance-crédit sans équivalent sur le marché.

 

SUR LES INTERVIEWÉS

Gaëtan du Halgouët fonde Fibus (ex-Chateaudun Crédit) avec Thibaut Robet en 2005. Ils font du financement du poste clients leur spécialité, jusqu’à devenir premier courtier en affacturage en Europe, et leader du courtage en assurance-crédit. Fibus conseille tous types d’entreprise, de la PME au groupe international, et intervient notamment dans des contextes de private equity et de restructuration. Romain Chaufour est directeur affacturage, en charge du développement.

 

Photo : Gaëtan du Halgouët, fondateur de Fibus et Romain Chaufour, Directeur affacturage de Fibus