Le plan présenté mardi 9 juin inclut des dispositifs de soutien financier à l’exportation ainsi qu'à l'offre. L'armée intervient également en accélérant son programme de commandes de matériel militaire. Le gouvernement met l'accent sur l'aspect écologique de la relance.

C’est une industrie qui ne connaissait pas la crise depuis trente ans. Mieux : l’aéronautique pouvait se targuer d’une belle croissance. En 2018, son chiffre d’affaires pour la France pesait 58 milliards d’euros. Un groupe comme Airbus était l’un des symboles de la réussite européenne et 35 000 ingénieurs en R&D continuaient à alimenter la machine pour le futur. Mais le coronavirus est venu assombrir ce ciel sans nuage. Les aéroports sont fermés ou fonctionnent en sous-régime, les commandes d’avions sont reportées voire annulées et 300 000 emplois se retrouvent menacés dans l'Hexagone de manière directe et indirecte, tout comme 1 300 entreprises. Afin d’éviter la catastrophe, l’aéronautique a pu se raccrocher aux mesures d’urgence mises en place par le gouvernement dès la fin mars. Cette industrie hors norme, tant par son positionnement stratégique que par sa taille, nécessitait toutefois un plan de soutien et de relance adapté sur la durée. C’est désormais le cas puisque ce mardi 9 juin, le gouvernement dévoilait un plan de 15 milliards d’euros d’aides, d’investissements ainsi que de prêts et garanties.

Mesures d’urgence

La filière a déjà  bénéficié des mesures d'urgence instaurées par le gouvernement et communes à l’ensemble des entreprises. À la mi-mai, pas moins de 1,5 milliard d’euros de prêts garantis par l’État (PGE) avaient été accordés aux sociétés de la filière de construction aéronautique et spatiale. Au sein du secteur de fabrication de matériel de transport hors industries automobiles, qui inclut la filière aéronautique, 651 sites industriels ont demandé l’autorisation de mettre en place l’activité partielle depuis le 1er mars, pour quelque 110 000 salariés. “Des discussions sont en cours entre l’État et les partenaires sociaux pour créer un nouveau régime d’activité partielle de longue durée qui permettra de sauver les emplois dans un cadre négocié, avec un co-financement de l’État”, précise Bercy.

Mesures à plus long-terme

Afin de faire face aux défis sur le plus long-terme, le gouvernement prévoit d'accroître le soutien de Bpifrance Assurance Export pour les exportations du secteur. Par ailleurs, il souhaite mettre en place un moratoire sur les remboursements des crédits à l’exportation octroyés aux compagnies aériennes pendant douze mois à partir de fin mars 2020. En contrepartie de ce moratoire, les compagnies bénéficiaires s’engagent, jusqu’au complet remboursement de la partie reportée du crédit, à ne pas verser de dividendes ou d’autres montants à leurs actionnaires (incluant les prêts d’actionnaire), et à ne pas mettre en œuvre de programmes de rachat d’actions. 

Autre mesure : Bercy veut proposer avec les États membres de l’Union européenne un assouplissement temporaire de l’accord aéronautique de l’Arrangement OCDE. “La France défendra, dans le cadre de cette négociation, la prise en compte d’une ambition environnementale forte afin que la mise en œuvre d’un tel assouplissement temporaire incite les bénéficiaires à déployer des stratégies de mesure et de réduction ou de compensation de leurs émissions de gaz à effet de serre”, poursuit Bercy.

Soutenir l’offre

Bruno Le Maire insiste en outre sur la nécessité de soutenir parallèlement l’offre. Il annonce la création d’un fonds d’investissement aéronautique afin de préserver les savoir-faire critiques et d'améliorer la compétitivité des PME et ETI. À terme, l’enveloppe pourrait atteindre le milliard d’euros en dette et en fonds propres. Une première levée de fonds de 500 millions est prévue dès le mois de juillet. “Les quatre principaux industriels du Gifas (Airbus, Safran, Dassault-Aviation et Thales) ont, pour la première fois, pris l’engagement d’investir ensemble et conjointement avec l'État via Bpifrance dans un fonds d'investissement destiné à soutenir, renforcer et développer les entreprises françaises du secteur aéronautique fragilisées par la crise sanitaire et économique actuelle”, indique le locataire de Bercy, qualifiant cette initiative de “révolution”. 

L’État prévoit également de créer un fonds d’accompagnement public à la diversification, à la modernisation et à la transformation environnementale des procédés pour un montant de 300 millions d’euros. Il affiche aussi son ambition de développer un avion décarboné d’ici à 2035 au lieu de la date de 2050 initialement prévue. En tout 1,5 milliard d’euros seront consacrés à l’accélération de la recherche et à la construction de cet avion. “Le fil rouge de la relance française est la décarbonisation de l’économie”, martèle Bruno Le Maire.

L’armée en soutien

Le gouvernement active également un autre levier afin de faire face à la crise : celui de l’armée. La ministre en charge de ce portefeuille, Florence Parly a pris la parole mardi 9 juin pour annoncer un plan d’anticipation des commandes d’avions, d’hélicoptères et de drones militaires. Le montant total de ces commandes sera de 832 millions d’euros et apportera un soutien concret notamment aux PME et ETI. Cette accélération permettra de sauvegarder 12 000 emplois sur trois ans. Car, comme l’a rappelé la ministre, la défense de la France passe aussi par la défense de son économie. 

Olivia Vignaud

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