Décideurs. Selon vous, quelles sont les qualités principales d’un leader ?

Olivier Piani. Pour être un leader, il est nécessaire de comprendre qui est l’autre. Un leader gère, explique et communique. Communiquer est une chose que l’on ne fait jamais assez : on croit que tout est compris, acquis, mais il faut varier les formats et les moyens de communication pour que le message soit réellement intégré. Le leadership passe également par la confiance. C’est primordial. Cela dit, la confiance n’exclut pas le contrôle : plus on a confiance, plus on doit contrôler. Mais contrôler au sens où je l’entends, c’est poser les bonnes questions qui permettent un vrai degré d’échange, mais aussi de challenge. Une bonne question permet d’affirmer sa légitimité, d’éviter les évidences, d’impulser des idées. Et parfois, les réponses apportées défient le leader qui les a posées.

 

Décideurs. Vous êtes un des rares Français à diriger une plate-forme d’un groupe allemand, Allianz Real Estate. Quelle est la place de la diversité au sein de la notion de leadership

?

O. P. Mon principal regret est de ne pas avoir réussi à m’entourer de femmes à haut niveau décisionnel. Elles sont généralement affectées aux fonctions dites « supports » : DRH, directrice de la communication ou directrice juridique par exemple, plutôt qu’aux postes décisionnaires. Au sein d’Allianz Real Estate, de nombreuses et brillantes jeunes femmes d’une trentaine d’années travaillent actuellement au sein du pôle asset management, mais peu seront amenées à progresser dans la hiérarchie. Je comprends parfaitement le besoin de concilier vie professionnelle et vie privée : moi-même, j’ai toujours travaillé en posant des limites à mon emploi du temps. C’est une question de choix personnel, même s’il est plus facile d’être en haut de la pyramide pour tenir ce genre de discours. La diversité se reflète à travers les nationalités, mais peu via la parité hommes femmes. C’est un fait contre lequel je me bats.

 

Décideurs. Quelle différence faites-vous entre leadership et management, pouvoir ou charisme ?

O. P. Un manager est différent d’un leader, bien que les grands dirigeants soient à la fois des managers et des leaders. Le leadership englobe une vision, une direction, le pouvoir d’entraîner les autres, alors que le management correspond à la gestion des personnes et du business. Quant au pouvoir, il se regarde, se mesure, alors que le leadership est impalpable, il est seulement reconnu par les autres. Enfin, je pense qu’une personne peut être charismatique sans pour autant être un leader. Le charisme permet de rayonner alors que le leadership est une notion beaucoup plus complexe.

 

Décideurs. Quels sont les trois leaders qui vous inspirent le plus ?

O. P. À titre personnel, Jack Welch, homme d’affaires et ancien président de General Electric de 1981 à 2001 m’a beaucoup inspiré lorsque je travaillais au sein de ce groupe. Ce fut l’un des dirigeants les plus emblématiques aux États-Unis au cours de la période 1980-2000. Il m’a aidé à gravir les échelons hiérarchiques au sein de GE et il a accompagné mon apprentissage du leadership. Dans un groupe comme GE, chaque métier est mondial et Jack Welch a su créer une culture d’entreprise commune à l’ensemble des collaborateurs. Je m’inspire également d’André Lévy- Lang, ancien président du directoire du groupe Paribas. Il dispose d’une réelle capacité pour promouvoir le changement. Les vrais leaders savent comprendre et s’inscrire dans le changement et y entraîner leurs équipes, malgré les structures figées ou les résistances. Enfin, je citerai également deux Steve ! Le premier, je l’ai rencontré en 1980 lorsque j’étudiais à Stanford. Il était venu animer un cours. Personne ne le connaissait, mais il était déjà impressionnant : il s’agit de Steve Jobs. Le second, Steve Ballmer, était un camarade de classe, aujourd’hui à la tête de Microsoft. À l’époque, on sentait déjà son leadership. C’est un homme hors du commun.

 

Décideurs. Existe-t-il un ingrédient caché du leadership ?

O. P. Je dirais la capacité d’action : le leadership n’est pas seulement une posture intellectuelle.