Par Éric Hebras, avocat associé. Genesis Avocats
La loi de finances est une fois encore l’occasion de redéfinir les contours de la fiscalité du capital-risque qui subit les interminables modifications de la fiscalité des plus-values de particuliers. Si le législateur essaie au demeurant de faciliter le capital développement, les recettes semblent peu efficaces et trahissent l’incapacité du législateur à proposer des mécanismes simples et pérennes.

L’année 2013 avait apporté son lot de changements pour le régime fiscal des porteurs de parts de FCPR et d’actionnaires de sociétés de capital-risque, à savoir l’adaptation du régime fiscal au nouveau régime des plus-values sur valeurs mobilières des particuliers et l’imposition des personnes physiques non-résidentes (ne respectant pas notamment l’engagement de conservation de cinq ans) au taux de 45?% au lieu de 19?% à raison des plus-values nettes de cessions de titres de la nature de ceux retenus dans le quota d’investissement, distribuées par les SCR.

Une modification marginale du régime fiscal du capital-risque
La loi de finances pour 2014, en révisant les règles de détermination des plus-values des particuliers, modifie une fois de plus le régime fiscal des porteurs de parts de FCPR et l’applique aux gains réalisés et aux distributions perçues depuis le 1er?janvier 2013. De ce fait, les anciens abattements ne trouveront jamais à s’appliquer. Un nouvel abattement de 50?% après deux années de détention et de 65?% après huit ans de détention a en effet désormais vocation à s’appliquer certaines distributions de SCR et répartitions d’actif par les FCPR, y compris pour les parts ou actions de «?carried interest?» (du moins celles visées à l’article 150-0 A I 8. du CGI qui ont vocation à s’appliquer aux FCPR créés à compter du 30?juin 2011 et aux actions de SCR émises à compter de cette date). Rappelons que le délai de détention des titres se calcule à compter de la date d’acquisition ou de souscription des titres du fonds, de l’entité ou de la société de capital-risque concernée. Toutefois, les abattements de 50?% (délai de détention de 2 ans), 65?% (délai de 4 ans) et 85?% (délai de 8 ans), prévues par l’article 150- 0 D 1. quater du CGI, ne trouvent pas à s’appliquer aux porteurs de parts de FCPR ou d’actions de SCR, ce qui génère une distorsion de traitement fiscal difficilement explicable. Pour les répartitions d’avoirs de FCPR au profit de personnes physiques non-résidentes, une imposition selon le régime des plus-values n’est possible que pour autant que le porteur de parts ait détenu plus de 25?% des parts de FCPR à un moment quelconque au cours des cinq années précédant la cession (article?244 bis B) : le gain net sera imposé au taux de 45?% (après application de l’abattement de 50?% ou de 65?%). S’agissant des actions de SCR détenues par des non-résidents personnes physiques, si les cessions d’actions sont soumises au même régime d’imposition (exonération des plus-values sauf en cas de détention de plus de 25?% des actions de la SCR), les distributions prélevées sur des plus-values nettes de cessions de titres restent soumises à retenue à la source de l’article 119 bis, 2 du CGI (sauf application du régime d’exonération), mais à un taux qui est ramené de 45?% à 30?% (à l’exception des bénéficiaires situés dans des ETNC pour lesquels la retenue à la source reste de 75?%). Enfin, Il est mis fin au régime de report d’imposition qui permettait aux personnes physiques de placer leurs plus-values de cession de valeurs mobilières en report d’imposition (sauf pour les prélèvements sociaux), sous condition de réinvestissement d’au moins 50?% de la plus-value dégagée, notamment par voie de souscription de parts de FCPR ou de sociétés de capital-risque respectant le quota d’investissement fixé par l’article L 214-28 du code monétaire et financier. On constate en définitive peu de changements réels, si ce n’est des modifications techniques liées pour l’essentiel au régime fiscal des plus-values des particuliers. En définitive, la véritable innovation de la loi de finances réside plus dans le soutien aux PME innovantes.

Un soutien relatif aux PME innovantes
C’est en définitive un soutien plus général, mais relatif, aux PME innovantes, qui est recherché. Soulignons déjà la prorogation du régime des JEI et son extension, pour les exonérations de cotisations patronales d’assurances sociales et familiales, aux cotisations des personnels affectés aux activités d’innovation (ainsi que le rétablissement d’une exonération de cotisations au taux plein pour les sept années suivant la création de l’entreprise). Par ailleurs, la loi de Finance rectificative pour 2013 prévoit un nouveau dispositif qui permet aux entreprises soumises à l’IS d’amortir sur cinq ans certaines de leurs souscriptions au capital de ces sociétés, soit directement, soit indirectement par l’intermédiaire de certains véhicules de capital investissement. La notion de PME innovante est bien connue puisqu’elle correspond à la définition des investissements éligibles au quota des FCPI. Les souscriptions sont bien entendu les souscriptions en numéraire, à l’exception des acquisitions. Soulignons que sont également éligibles les souscriptions au capital de FCPR, de fonds professionnels de capital-investissement, de SCR, soumis à certains quotas d’investissements. Les participations doivent rester en tout état de cause, et ce de manière continue, minoritaires (20?% au maximum du capital de la PME innovante, même en cas d’investissement intermédié), ce qui suppose de prendre en compte toutes les participations détenues par ailleurs par les entreprises liées dans cette PME. Ce régime fiscal instaure un amortissement linéaire sur cinq ans des souscriptions au capital, plafonné toutefois à 1?% du total de l’actif de l’entreprise réalisant l’investissement (déterminé à la clôture de l’exercice de souscription), mais suppose une détention d’au moins deux ans des titres de PME. Cet avantage est néanmoins temporaire puisque la plus-value de cession des titres est en définitive taxée au taux de droit commun, à hauteur de l’amortissement pratiqué. S’agissant des répartitions d’avoirs par les fonds, le correctif prévu par le texte laisse néanmoins entrouvrir la voie à certaines possibilités d’optimisation. On n’aura en tout état de cause de cesse de souligner que ce n’est qu’en pérennisant les différents soutiens au capital-développement et en les simplifiant que l’objectif visé par les gouvernements successifs pourra être atteint. Il n’est pas sûr que le législateur en prenne
le chemin…