Après une année décevante du côté de la Chine, avec des politiques restrictives donnant lieu à un impact négatif sur la Bourse et à un ralentissement de l’économie nationale, l’environnement financier s’attend en 2022 à une réponse plus souple et favorable à la croissance de la part des autorités. Cela devrait être confirmé dans les mois qui viennent par la croissance de crédit et la croissance monétaire. Entretien avec Bruno Vanier, président chez Gemway Assets.

DECIDEURS. Quelles sont les tendances sur les marchés émergents pour cette année ? 

Bruno Vanier. L’élément le plus important pour 2022 se trouve du côté de la Fed qui risque d’accentuer son tapering à mesure que l’inflation reste un sujet et que la Banque centrale décide de sortir progressivement du quantitative easing. Tous les ingrédients sont réunis pour que nous arrivions à un quantitative tightening, réduisant ainsi, et de manière générale, la liquidité mondiale. Nous n’estimons pas cette tendance trop forte, mais néanmoins c’est un environnement duquel nous ne devrions pas échapper. Dans un second temps, la politique de la Banque centrale chinoise tend vers un assouplissement monétaire, après nous avoir habitué ces dix-huit derniers moins à une politique restrictive importante tant au niveau fiscal, réglementaire que monétaire. A contrario, les États-Unis et l’Europe bénéficiaient de politiques plus souples, mais devraient en 2022 se tourner vers un durcissement, d’abord de la part de la Fed, puis peut-être de la BCE. Ces tendances donneront le la sur la liquidité mondiale, sans doute sur le niveau du dollar également, et sur le prix des actifs en général. Enfin, nous avons une reprise de l’inflation depuis plus d’un an et demi dans beaucoup de pays dont le Brésil et la Russie, moins fortement en Asie, atteignant des niveaux autour de 10 % en Amérique latine, 8-9 % en Russie. Nous restons sur des niveaux inférieurs en Asie avec un taux à 5 %.  Face à cela, les Banques centrales, notamment russes et brésiliennes ont remonté leurs taux d’intérêts, néanmoins la Banque centrale brésilienne reste encore légèrement derrière la courbe et devrait donc de nouveau augmenter ses taux sur le premier semestre.   

"Le resserrement de la part de la Fed ne sera pas extrêmement violent et tout cela semble être très anticipé"

Les investisseurs redoutent un durcissement de la politique de la Fed, quelles conséquences pour les marchés émergents ?  

Globalement, cela signifie qu’il y aura moins de dollars qui circuleront dans le monde, avec une tendance à s’apprécier et à faire baisser les prix des actifs émergents. Cela étant, le resserrement de la part de la Fed ne sera pas extrêmement violent et tout cela semble être très anticipé du fait que le dollar ait été une devise assez forte en 2021 face à de nombreuses devises émergentes, dont certaines d’entre elles ont fortement baissé. En revanche, certaines devises asiatiques n’ont pas été affectées.  

Quels sont les impacts de la crise sanitaire sur ces marchés ? 

Le variant Omicron est encore assez peu présent en Asie mais commence à s’installer, notamment en Corée du Sud et en Inde. En Asie du Nord, il y a une politique restrictive assez forte appelée "Zéro Covid", venant limiter les déplacements. Naturellement, cela engendre un impact négatif sur l’activité économique et la croissance des pays, et cette politique très dure va continuer au moins jusqu’aux Jeux olympiques d’hiver à Pékin.  

"Nous nous attendons à un grand retour des actions chinoises"

Quelles sont les marchés à surveiller cette année ? 

La Chine bien sûr, le marché de loin le plus liquide et le plus important, surtout par rapport à une performance décevante en 2021 dû à une baisse considérable notamment sur les titres chinois cotés à Hongkong. Pour 2022, nous nous attendons à un grand retour des actions chinoises. Du côté de l’Amérique latine, le Brésil donne le ton sur le continent avec l’approche des élections présidentielles, un choix qui sera difficile entre le président sortant Jair Bolsonaro et Luiz Inàcio Lula da Silva, candidat du parti des travailleurs (PT).  

Propos recueillis par Marine Fleury