La Chancellerie propose d’expérimenter le statut d’avocat en entreprise et par là même la confidentialité des avis des juristes au travers du legal privilege. Parmi les professionnels du droit, certains sont farouchement opposés au projet là où de nombreuses institutions et personnalités l’approuvent.

La très discutée création du statut d’avocat en entreprise n’a pas fini de faire parler d’elle. Le rapport Gauvain, du nom de son auteur le député LREM Raphaël Gauvain, rendu public en juin 2019, proposait l’instauration d’un legal privilege à la française afin de protéger les entreprises nationales contre les mesures extraterritoriales de la justice américaine. Le rapport Perben de juillet 2020, relatif à l’avenir de la profession d’avocat en France, avait éludé le sujet sans toutefois prendre position, en raison des nombreuses divergences qui agitaient la profession : "La proposition de permettre l’exercice de la profession d’avocat en entreprise ne figure pas parmi les préconisations de la mission."
Le ministre Éric Dupond-Moretti avait déclaré à l'Assemblée nationale au mois de novembre dernier son souhait d’expérimenter le statut d'avocat en entreprise. La Chancellerie a tout récemment proposé un pré-projet de loi, prévoyant cette expérimentation pour une durée de cinq ans pour certains barreaux choisis par arrêté du garde des Sceaux.

Atout de compétitivité des entreprises françaises

Les membres fondateurs de Paris place de droit, le tribunal de Commerce de Paris, le barreau de Paris, la chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Paris, la chambre de commerce internationale (ICC), l’Association française des juristes d’entreprise (AFJE), Paris Arbitration, l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et le Cercle Montesquieu, ont voté à l’unanimité une motion en faveur du projet de loi sur le statut d’avocat en entreprise et l’instauration du legal privilege en France.

"Dans ce contexte de mutations économiques complexes et de concurrence accrue, le statut d’avocat en entreprise dont la France pourra se doter me paraît un atout de compétitivité pour les entreprises françaises, tant sur le plan national qu’international, réagit Frank Gentin, le président de Paris place de droit. Je l’appelle naturellement de mes vœux."  Pour ses défenseurs, ce statut, permettant à l’avocat de rendre des avis et des analyses juridiques couverts par la confidentialité, contribue en effet à renforcer la compétitivité de la France, l’attractivité du droit français et la protection des entreprises françaises des mesures extraterritoriales. L’introduction du legal privilege à la française protégera ces avis et ces analyses de leur saisie et divulgation dans des procédures civiles, pénales ou administratives, dès lors qu’ils portent la mention "avis juridique confidentiel". Le legal privilege concourt à la promotion du droit dans la vie économique et renforce la position des juristes d’entreprise vis-à-vis du management. "Ce projet est essentiel pour la compétitivité de la France en ce qu’il permettrait aux entreprises françaises de bénéficier d’un statut pour leurs fonctions juridiques similaire à ce qui existe dans les autres grandes économies", affirme Jacques Bouyssou, avocat et secrétaire général de Paris place de droit. L’introduction du statut d’avocat en entreprise s’inscrit dans la mission première de l’association, à savoir la valorisation de Paris comme la capitale internationale du droit.

Projet incomplet pour le CNB

Le Conseil national des barreaux (CNB) a pour sa part adopté une position radicalement différente en votant une motion contre ce projet de loi : lors de son assemblée générale du 22 janvier dernier, l’instance représentative des avocats s’est opposée à 77,23 % des voix à l’expérimentation de ce statut. Selon le CNB, celui-ci porterait atteinte à l'indépendance de l'avocat et à l'intégrité du secret professionnel. Aussi, l’institution dirigée par Jérôme Gavaudan exige "le retrait de ce projet qui crée de réelles insécurités juridiques, outre qu'il viole de très nombreuses règles d'ordre public (droit de la concurrence, droit du travail, principe d'égalité...)" et s’oppose à la création, même à titre expérimental, d’un statut d’avocat salarié d’une entreprise tel que préconisé dans cet avant-projet. Le CNB appelle ainsi le gouvernement à revoir sa copie et refuse pour l’instant de statuer sur un projet qu’il juge incomplet car renvoyant à des textes dont il n'a pas eu intégralement communication et qui portent sur des enjeux majeurs de la profession. Il semblerait que le blocage ne se limite pas à contester la méthode.

Marine Calvo

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